Tour des Mondes – Chapitre 190

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Bastion

Je finis par laisser les deux guides dans la tour des guerriers pour pouvoir retrouver ce Bastion. Je ne sais pas trop sur qui je vais tomber, mais j’espère qu’il ne se passera rien de bizarre ou de dangereux, cela me changera.

Les deux guides devraient s’en sortir pour acheter du matériel de base avec les conseils que je viens de leur donner, mais je leur ai dit que dans le doute, ils n’auraient qu’à m’attendre ou me retrouver. Ce sont des Guides après tout, ils devraient être capables de me retrouver s’ils sont vraiment liés à moi, non ?
Ils m’ont sauvé des deux envoûteurs il y a moins de deux heures alors qu’ils ne m’avaient jamais rencontré jusque-là et que j’étais dans un endroit inhabituel.

Je réajuste la capuche sur ma tête et l’écharpe sur mon visage et m’avance à travers la tour des guerriers en laissant les deux guides devant le grand brasero au centre de la tour secondaire. Je demande rapidement mon chemin à un garde en essayant de faire attention à ce que personne ne m’observe. Avec le visage masqué, personne ne peut savoir qui je suis, mais j’ai sans doute l’air un peu louche. Ce serait normal près de la tour des voleurs, mais ici où il n’y a que des hommes en armures…

D’après Yuu, tout va bien et je ne devrais pas m’en faire, mais c’est assez difficile d’oublier mes deux précédentes rencontres. Entre l’envoûtement sur la lame et la vision de Micha, puis la rencontre douloureuse avec Balthazar et Angela, je me sens plutôt fatigué, et j’ai encore des souvenirs de la douleur que j’ai ressentie. Bien sûr, la potion de Balthazar m’a permis de récupérer un peu, mais je serai content d’aller dormir ce soir.

Je finis par arriver devant une échoppe qui a l’air d’être celle que je cherche. Le seul problème, c’est une armoire à glace qui attend devant. Un homme faisant au moins deux têtes de plus que moi semble bloquer l’entrée. Il a l’air de cacher une armure sous sa cape et j’ai l’impression qu’il sert de vigile, mais je ne peux pas l’affirmer. Il me regarde de haut et je ne sais pas trop quoi faire. Il a une main sur ce qui a l’air d’être une épée de bonne qualité et, d’après le regard qu’il me jette, ce n’est probablement pas un jeune grimpeur débutant. Pourtant, il a l’air d’avoir le même âge que moi.

Je m’arrête devant lui pour lui faire comprendre que je veux passer, mais il n’a pas l’air de vouloir bouger.

— J’aimerais passer si c’est possible.
— Bien sûr, montre-moi ton visage, dis-moi la raison de ta venue, ta classe principale ainsi que ton nom, et tu pourras entrer.
— Je préférerais éviter d’avoir à faire ça. Je viens juste acheter ou commander une arme. On m’a recommandé l’endroit.
— Malheureusement, il n’y a pas de dérogation possible. Pour entrer, il faut me donner les informations que je viens de te demander.
— Je peux savoir pourquoi ?
— Une mesure de sécurité.
— Contre qui ?
— Contre tout le monde.
— Est-ce que j’y suis obligé pour entrer et faire des achats ?
— Oui.
— La journée commence à vraiment être mauvaise…
— Pardon ?
— Non non, j’ai juste eu une mauvaise journée, je ne pensais pas que cela continuerait aussi longtemps. Vous êtes le garde du magasin, un inquisiteur ou quelque chose du genre ?
— Chevalier. Je ne fais que poser des questions. Sans les réponses –
— J’ai bien compris, mais je ne veux pas répondre.
— Qui t’a recommandé de venir ici ?
— On dirait un interrogatoire. Je veux juste rentrer. C’est bien un magasin et pas un club privé ?
— Qui ?
— Quelqu’un dont une connaissance a déjà eu une arme forgée ici. Si c’est bien le magasin d’un certain Bastion. Je ne peux pas non plus rentrer dans les détails.
— Il semble que tu aies beaucoup de secrets pour quelqu’un qui vient juste acheter une arme. Au moins tu ne me mens pas, mais tes réponses sont insuffisantes.
— Je ne sais pas qui vous êtes, ce que vous faites devant le magasin et si je peux vous faire confiance.
– Soit. Dans ce cas, que peux-tu me dire qui pourrait me faire avoir confiance en toi ?
— Je vois pas trop quoi dire de plus. Le plus simple serait encore de me conseiller un autre magasin dont l’artisan est aussi bon que ce Bastion et dont la porte est ouverte.
— Bastion n’a pas de concurrence. Ce sera difficile de te recommander quelqu’un d’autre d’aussi qualifié que lui, j’ai déjà cherché pendant longtemps.
— … Est-ce qu’il y a autre chose que je peux faire à part répondre aux questions pour entrer ?
— Dire à tes acolytes de partir serait un bon début.

Ah.
Non, la journée ne sera vraiment pas simple. Il faut croire qu’on m’a suivi, puisque je peux voir deux personnes de chaque côté du couloir.
Par réflexe, je demande aussitôt à mes animaux de se préparer, et j’ai l’impression que le chevalier a remarqué un mouvement, vu comment il me regarde silencieusement. Un problème de plus à gérer.
Il n’y a pas beaucoup de monde dans cette tour qui doit avoir une souris et un serpent sur eux et je n’ai pas spécialement envie qu’il comprenne que je suis dresseur. Avec un peu de chance, il ne sait probablement pas encore ce qu’il a vu.
Je demande à Yuu de partir en reconnaissance voir combien ils sont vraiment. Il y en a probablement plus, sinon ce ne serait pas vraiment une embuscade.

Ma vie va être très fatigante dans le futur.

— Ils ne sont pas avec moi. Probablement un problème de plus que je vais devoir gérer aujourd’hui. Désolé pour le dérangement, je vais aller m’occuper de ça.
— Je ne pense pas qu’ils soient là pour toi et tu n’es pas de taille. Entre, ne dis rien et tiens-toi tranquille, sinon je vais avoir des problèmes.
— Ah ?

Sans vraiment me laisser le temps de dire quelque chose, il ouvre la porte et me fait signe d’entrer avec un coup de tête. Merci ?
Je demande à Yuu de revenir assez rapidement avant d’entrer dans le magasin. S’il veut s’en occuper et me faire confiance, je ne vais pas dire non.
À l’intérieur du magasin, il y a plus de monde que ce que je pensais. C’est bien sûr plus un atelier qu’un magasin, mais la pièce est assez grande. Pour preuve, en face de moi se trouve une quinzaine d’hommes en armure blanche et la pièce est loin d’être pleine.
Ils se tiennent derrière un homme ayant la quarantaine et installé sur une chaise, qui fait face à un garçon debout qui doit avoir… dix ans ? Le trait le plus significatif reste sa chevelure noire extrêmement longue qui traîne par terre.

Bien sûr, ils sont tous tournés vers moi en ayant l’air de demander ce que je fais là.
Derrière moi, la porte se ferme sur le chevalier disant que je ne fais que passer et qu’il s’occupe de quelques vermines.
Rapidement l’homme sur la chaise se contente de faire un signe et deux chevaliers se dirigent vers moi. Ils ont besoin de tous être aussi grand ? Vu la manière dont ils s’approchent, je ferais mieux de rester sur mes gardes, je n’ai pas l’impression qu’ils me veulent du bien, même s’ils n’ont pas encore dégainé leurs épées.

— Je te déconseille de t’en prendre à ma clientèle. C’est toi qui t’imposes ici.
— Regarde-le. Ce n’est qu’un débutant. Tu ne vas pas quand même pas me dire que tu vas t’occuper de lui.
— Il m’intéresse plus que ce que tu as à me dire. Vous deux, si vous faites quelque chose que je n’apprécie pas, je risque de devenir désagréable.

Les deux chevaliers s’arrêtent assez vite alors que quelques mètres me séparent d’eux. Sur les derniers mots du garçon, les épées, ainsi que les autres armes présentent dans la pièce, se mettent à trembler légèrement, comme pour conclure la menace. Sachant qu’autour de moi je peux en voir partout accrochées au mur ou sur des présentoirs, cela donne presque l’impression que la pièce tremble.

— Attendez. Artisan, nous avons encore beaucoup de choses à nous dire et je ne souhaite pas qu’un inconnu écoute.
— Tu aurais dû y réfléchir avant de venir alors que le magasin est ouvert. Encore heureux que ton prodige, là-dehors, ne l’ait pas empêché d’entrer.
— Je ne compte pas repartir avant d’en avoir fini avec cette conversation.
— Très bien. Dans ce cas tu n’as qu’à attendre que j’en aie fini avec lui.

Sur un autre geste venant de ce qui semble être le chef des chevaliers, qui a l’air passablement irrité, les deux hommes reculent et retournent où ils étaient. Le garçon s’approche alors de moi en souriant et je ne sais pas trop quoi penser, mais je pense que c’est une bonne chose que je n’ai pas ramené Blue et Pete ici.

— Ne fais pas attention à eux et dis-moi plutôt ce que tu veux. Je suis Bastion, le propriétaire de cet atelier. Si tu pouvais te découvrir un peu, j’apprécierais. Je traites avec tout le monde sans distinction. Si tu as de l’argent, je me fiche de savoir si tu es un monstre ou un ange. Et puis qui que tu sois, ils ne feront rien puisqu’ils ont trop à perdre, et je ne ferai pas d’affaires avec quelqu’un dont je ne sais rien. J’ai ta parole Alexander, tu ne feras rien ?
— Que veux-tu que je fasse à ce qui à l’air d’être un simple voleur débutant. Je n’ai pas de temps à perdre, alors dépêche-toi.
– Toujours aussi aimable. Heureusement que tu ne t’occupes pas d’un magasin, tu ferais faillite. Et puis on ne sait jamais sur qui on peut… Oh ?

Quoi qu’il se passe ici, je n’ai qu’à faire quelques pas en arrière pour sortir d’ici, c’est largement suffisant avec mon boost pour pouvoir sortir et échapper à des hommes en armures. En tout cas, ils étaient là pour rencontrer le garçon qui me parle, et pas pour me tendre un piège, donc je ne pense pas avoir à m’inquiéter. Même Yuu a l’air d’accord avec moi, ce qui reste quelque chose de rare. De toute façon, je n’irais pas loin si je ne prends pas des risques de ce genre. Si je considère que tout le monde est un ennemi, je ne survivrai pas.

Autant prendre le risque et partir si c’est nécessaire. J’ai besoin de ses armes. Chaque pourcentage de plus de survivre à Charade ou à d’autres que je peux obtenir vaut le coup si je trouve un forgeron de confiance.

Je retire l’écharpe de mon visage et la capuche de ma tête. C’est clairement plus agréable pour moi, mais vu la réaction du garçon…

— Tiens tiens, je ne m’attendais pas à voir une célébrité chez moi. Dis Alexander, tu ne penses pas qu’il est plus célèbre que toi ? Plutôt pas mal pour un voleur débutant.
— Aucune importance. Ce n’est qu’un novice, dernier dresseur ou non.
— Au moins, tu as la confirmation que personne ici ne te veut du mal. Je ne m’attendais pas à te voir chez moi, mais j’imagine que tu as une bonne raison.

Le chef des chevaliers a l’air intéressé par ma présence maintenant, puisqu’il me regarde du coin de l’œil, mais à part quelques chuchotements inaudibles entre ses hommes, il n’a pas l’air de vouloir agir et semble attendre la suite.
Je ne suis pas forcément rassuré, mais je ne devrais pas avoir de problème pour l’instant. Je vais quand même rester sur mes gardes et je demande à Micha de garder un œil sur les chevaliers. Juliette est prête aussi. Yuu a très envie d’aller visiter l’échoppe, mais je préfère éviter de faire quelque chose qui serait considéré comme malpolie, donc je lui dis qu’il ferait mieux d’éviter, invisible ou non.

— Je viens pour trouver une arme. On m’a recommandé l’endroit. L’argent n’est pas un problème si ça doit en être un.
— Très bien. Par curiosité qui t’a dit de venir ici ?
— Un homme appelé Balthazar.
— Oh ?! On va de surprise en surprise avec toi ! Un dresseur et un assassin ! Je serais toi, j’essaierais de le recruter, Alexander. Débutant ou pas, ce gamin est plein de surprises.

Alexander continue de m’observer silencieusement depuis sa chaise. J’aurais préféré entendre quelque chose comme « dépêchez-vous » ou « aucune importance », cela aurait été moins inquiétant. Les chevaliers derrière lui continuent de chuchoter des choses entre eux, mais impossible de savoir quoi.
Bon, puisque cela va finir par m’irriter, je demande à Yuu de s’approcher et d’écouter ce qu’ils racontent. Maintenant qu’ils savent à peu près tout sur moi, je ne vois pas pourquoi je me priverais d’informations sur eux en retour.

— Bien, passons aux choses sérieuses maintenant. Montre-moi ton arme que je vois de quoi tu pars.
— Ce n’est qu’une arme de base, je voudrais quelque chose de plus efficace. Suffisante pour percer des armures épaisses.

Il y a quelques ricanements chez les chevaliers, mais Alexander les faits taire d’un geste. Le garçon devant moi est en train d’étudier l’arme en la tournant rapidement dans ses mains.

— Je ne peux rien faire avec une arme neuve, donne moi plutôt l’original.
— Une seconde. Voici les deux stylets dont je me suis servi jusque-là.
— Plus intéressant, oui. J’en apprends beaucoup sur les gens en regardant leurs armes. S’ils bloquent des attaques, s’ils se servent du tranchant, de la garde, comment ils tiennent leurs armes… C’est plus facile pour savoir ce qui te conviendra. Bien sûr, la plupart de mes clients veulent des épées, et je n’ai pas trop l’occasion de travailler sur des dagues, des poignards ou sur un stylet comme celui-ci. Est-ce que tu te sers des lames sur ce gantelet aussi ?
— Oui, ça m’arrive, mais j’ai dû laisser celui que j’utilise à son créateur pour qu’il le répare.
— Dommage, j’aurais bien aimé voir ça aussi. Tu faisais quoi avec les lames de ton gantelet ?
– Des griffures, principalement. Le gantelet est plutôt utile pour escalader des parois aussi.
— Vu les taches, tu te sers aussi de poison ?
— Somnifère et venin de serpent.
— Intéressant.

Bastion continue d’observer mes armes silencieusement. Il a l’air de prendre son temps alors qu’elles ont encore des traces du sang du roi de Lishnul que je n’ai pas nettoyé.

«  D’après les marques, tu te sers principalement de la pointe de tes armes. Mais j’ai l’impression que ce qui te pose le plus de problèmes, c’est le manche. Tu as sans doute plus de difficulté que tu ne crois à bien tenir ton arme. La pointe est émoussée, mais il faut s’y attendre avec l’usure. Tu es sans doute plutôt du genre à esquiver qu’à bloquer, même s’il y a quelques marques ici et là. L’arme n’est pas faite pour retenir le poison, c’est sans doute un problème en combat si tu dois t’en servir plusieurs fois. Vu les petites marques ici est là, ça t’arrive que ta lame soit bloquée par des protections, mais j’espère que tu ne t’en sers pas comme une arme de jet… »

Je n’ai aucune idée de comment il peut voir certains détails, mais pour l’instant, c’est un sans faute sur toute la ligne. J’ai bien l’impression que j’ai trouvé l’artisan qu’il me faut pour forger mes armes. Je ne sais pas encore ce qu’il va me proposer, mais je commence à me détendre. À chaque fois que je passe une porte dernièrement, j’ai l’impression que l’on va essayer de me tuer. Même s’il y a du monde, ça me rassure de voir que ce garçon de dix ans sait ce qu’il fait. Maintenant que j’y pense, il a probablement mal géré le dosage de sa potion rajeunissante. Falco s’était servi de quelque chose de ce genre si je me rappelle bien. En tout cas, il n’a pas l’innocence d’un enfant. Il continue de regarder mes lames quelques instants, et je me demande quel genre d’arme il va me proposer.

« Bien, maintenant, passons à une démonstration. Alexander, si tu veux bien me prêter un de tes hommes. »


Correction : Hastin



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Tipeee

4 thoughts on “Tour des Mondes – Chapitre 190

  1. Bonjour, peut être que je me trompe mais tu n’avais pas dis que Nomad avait laissé ses stylet sur Galatia et justement il a du en racheter ? Comment il peut avoir les anciens ? Ai je loupé une partie ? En tout cas c’est le premier message que je poste et pour l’instant, le Novel est un sans fautes ! C’est vraiment le COUP DE COEUR !! Je suis bluffé !

    1. Si je dis pas de bêtise, c’est le groupe de grimpeur du palais de Lishnul qui a redonné les stylets en même temps que les sacs de bijoux. Je me souviens plus exactement du chapitre par contre.

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