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Chapitre 343 : Un rideau de sang sur une scène pourpre
Cette fois-ci, c’est fini pour le Dresseur. Charade a suffisamment joué et subi les gamineries du jeune grimpeur. Le gamin sous lui aurait mieux fait d’acheter une mitraillette que de s’occuper d’animaux, cela aurait sans doute rendu le combat plus intéressant. Il est maintenant temps de lui transpercer le cœur.
Alors que Charade lève le bras, il peut sentir une pression sur sa nuque. Une sorte d’aiguille qui s’enfonce profondément. Trop profondément.
Il se retourne en frappant avec son couteau, mais il ne trouve personne derrière lui. Est-ce que ce serait le renard ? Il ne l’a pas oublié, mais vu qu’il ne s’est pas manifesté depuis le début de l’affrontement, Charade s’est simplement dit qu’il n’était pas en état d’intervenir.
Il se touche rapidement la nuque et peut sentir une plaie qui aurait pu être dangereuse si elle avait été plus profonde de quelques millimètres. Il serre les dents en se relevant tant bien que mal. Finalement, il ne peut pas ignorer les animaux plus longtemps. Impossible de savoir si les animaux ne l’achèveront pas dès qu’il en aura fini avec le Dresseur. Un dernier élan de rage que Charade préfère tuer dans l’œuf.
En attrapant une poignée de pièces dans son inventaire, il les jette au-dessus de lui en chantonnant une prière. L’instant suivant, les pièces commencent à retomber en une pluie d’or et d’étincelles tout autour de lui. Les gouttes d’or qui tombent sur lui commencent à former une pellicule protectrice couvrant ses plaies et forçant même le serpent à sortir de son corps, comme chassé par une force incompréhensible.
Charade sourit alors qu’il jette à nouveau des pièces d’or au-dessus de sa tête. Cette fois-ci, il entonne un chant différent pour qu’un nouveau miracle apparaisse. Les dizaines de pièces d’or se figent quelques instants dans les airs avant de foncer vers le sol comme autant de projectiles mortels.
Il peut voir la souris et le serpent fuir alors que son rire résonne dans le sous-sol. Même le renard qui a tenté de le tuer d’une seule attaque doit avoir fui. Toutes ces attaques venant d’animaux ridicules… Cela l’amuse énormément.
En levant la tête pour regarder les pièces tomber, il se met à rire en laissant l’eau rouge entrer dans sa bouche. Il en avale une gorgée pour se désaltérer tout en savourant le résultat de son miracle.
Il tourne son regard vers le Dresseur pour voir que celui-ci est encore conscient et le regarde. La gueule béante a disparu de son visage. L’armure de tissu qui le recouvrait et lui a sauvé la vie jusqu’à présent n’est plus sur lui.
Il regarde son pied posé sur le torse du Dresseur pour y voir le tissu.
« Dévore. »
Le mouvement des lèvres du Dresseur n’échappe pas à Charade. Même en étant à moitié étouffé par le sang dans sa bouche, il est capable de le comprendre. Ce salopard ne s’est pas encore rendu à l’évidence et continue à résister. Pendant qu’il s’occupait des autres en lançant deux miracles, il a trouvé un moyen de l’attaquer.
Sans même réfléchir, Charade plante le couteau dans sa jambe pour empêcher le tissu de monter plus haut, mais de la même façon que celui-ci était capable de s’écarter pour laisser passer ses attaques sur le Dresseur, le tissu esquive simplement la lame qu’il plante dans sa jambe. Un effet électrique le paralyse quelques instants alors que le tissu continue son ascension.
Il lâche le couteau pour en attraper un autre dans son inventaire alors qu’il peut sentir des milliers de petites aiguilles se planter dans sa peau et commencer à le dévorer. Même sa bénédiction protectrice n’arrête que quelques instants le monstre.
Il décide d’être plus radical cette fois-ci et plante la lame en haut de sa cuisse. Mieux vaut qu’il se coupe une jambe que de se laisser dévorer pitoyablement par un bout de tissu.
Il commence à découper alors que l’effet se révèle être… un miracle de soin. Un foutu miracle de soin ! Sa blessure se guérit presque aussitôt en rendant inutile ce qu’il fait. Les dents de Charade commencent à grincer alors qu’il attrape un autre couteau. C’est là qu’il peut sentir le serpent autour de son bras. Son miracle protecteur empêche bien le serpent d’entrer dans son corps, mais il peut quand même sentir la pression anormale que celui-ci commence à exercer sur son bras en le bloquant. La brûlure divine ne semble être qu’un inconvénient pour le serpent qui continue sa constriction. La souris s’y met aussi en frappant sa main de toutes ses forces et manque de le désarmer.
Alors qu’il se débat, il peut sentir un poids sur son épaule et une nouvelle piqûre lui transperce cette fois une partie de la gorge sans qu’il ne puisse réagir. Le tissu continue de monter sur sa jambe et vient d’atteindre son bassin. Même le Dresseur, qui semble sur le point de mourir, se met lui aussi à l’attaquer en se servant d’une de ses jambes pour lui frapper le bas du dos à plusieurs reprises en se contorsionnant.
Les coups sont lents et manquent de précision, mais il a l’impression de recevoir à chaque fois un coup de marteau.
Puisque c’est la seule idée qui lui vient, il décide d’appuyer le plus fort possible avec sa jambe sur le Dresseur, qui manque de hurler en crachant du sang. Il se baisse en s’apprêtant à planter son couteau dans le cœur de sa victime comme il comptait le faire, mais le serpent l’empêche de finir son mouvement en bloquant son bras avec encore plus de force. Le renard plante sa queue dans son épaule en commençant à lacérer ses muscles et ses tendons et, petit à petit, il perd ses forces. La souris le frappe au visage comme une sorte de violent crochet du droit qui manque de lui briser la mâchoire.
Sans avoir trop d’options, il utilise ce qui lui reste de main à cause de l’attaque du tissu un peu plus tôt pour le frapper au visage, mais à chaque nouveau coup plus douloureux que le premier, le tissu continue de grimper sur lui en le dévorant lentement mais sûrement. Son miracle de protection semble incapable de résister aux milliers de dents qui se plantent sur lui.
Sa jambe finit par céder devant la morsure du tissu et il tombe en avant sur le Dresseur en étant à seulement quelques centimètres de son visage.
« Petit enfoiré. Tu penses avoir gagné, c’est ça ? »
Le visage défiguré par la colère de Charade contemple celui du Dresseur toujours aussi froid et noyé de blessures. Charade regarde autour de lui, mais personne n’est debout ou capable de l’aider dans le sous-sol. Il pense à sa guilde, mais ils sont tous morts ou ailleurs, à faire des tâches sans importance… s’ils ne sont pas simplement en train de se bourrer la gueule joyeusement.
Est-ce qu’il aurait fait une erreur de calcul ? Il avait pourtant tout préparé pour ce type en charpie qui le fixe du regard. Comment un gosse avec une classe aussi minable a pu réussir à le mettre à genou alors qu’il est sur le point de mourir en étant troué de partout ? Il ne l’acceptera pas.
Avec colère, Charade frappe la tête de Nomad en utilisant la sienne. Il le frappe ensuite avec son coude une dizaine de fois, mais quoi qu’il fasse et malgré les nouvelles blessures, le Dresseur continue de le fixer froidement avec son œil couleur or.
Le bras armé de Charade tombe ensuite mollement avec un craquement désagréable. Les attaques du renard et du serpent ont fini par en avoir raison. Qu’il soit brisé ou inutilisable ne change pas grand-chose à la situation qui ne fait qu’empirer pour lui. Le serpent passe à son deuxième bras en l’empêchant de s’en servir. La souris le frappe à la tempe et il perd connaissance un instant. En reprenant ses esprits, Charade s’agite ensuite pour faire descendre le renard de son dos avant qu’il ne décide lui aussi de l’attaquer à nouveau.
Il retourne ensuite son attention sur le Dresseur et s’en prend à des plaies ouvertes en frappant avec sa tête, il essaye même de le mordre, mais il n’obtient pas de changement alors que le tissu vivant finit par atteindre son cou.
Il peut déjà sentir son souffle s’affaiblir alors que sa poitrine se serre et disparaît, mastiquée par le tissu. Sa jambe a pratiquement disparu maintenant, mais il ne le sent même pas.
« Pourquoi… tu… crèves… PAS !? »
Charade le frappe à nouveau au visage avec sa tête, mais le regard déterminé du Dresseur ne change pas. L’instant suivant, la tête du Dresseur fonce vers son visage et il lui mord la joue au sang pour finir par en arracher douloureusement un morceau. Cela n’a pas d’importance pour Charade, mais le visage de Nomad semble s’illuminer de satisfaction quelques instants et cela le rend furieux.
Il peut sentir la douleur et son corps qui disparaît alors que le tissu dévore tout sur son chemin, mais il ne peut plus rien faire. Il frappe encore plusieurs fois le visage de Nomad alors que le tissu monte toujours plus haut et l’empêche définitivement de bouger en atteignant finalement son visage.
Il regarde le Dresseur une dernière fois. Un morceau de chair qui n’a plus grand-chose d’humain après tout ce qu’il a subi. Il n’arrive pas à accepter qu’il vient de le battre. Il n’y arrive pas, mais il s’y résout alors que le tissu couvre entièrement son visage comme un linceul. Il va mourir et cela ne fait aucun doute.
Maintenant, il ne voit plus rien et ne peut que sentir sa propre souffrance alors que son corps disparaît petit à petit. Il ne reste que quelques secondes et la fin approche. Il aurait dû demander plus de miracles à son dieu. Il aurait dû faire encore plus de planifications pour que cela n’arrive pas. Il aurait dû recruter plus de grimpeurs pour contrecarrer le Dresseur. Il aurait tout aussi bien pu tuer Maliel devant lui pour voir sa réaction ou tuer directement un des animaux pour le voir devenir fou en quelques instants. Il a simplement cru qu’il y arriverait. Qu’il ferait respecter la règle d’or de sa guilde. Tout ça à cause de la mort d’un guignol comme Léon. Quelle règle de merde.
D’autres pensées lui viennent à l’esprit, mais elles lui paraissent toutes plus stupides les unes que les autres alors que les millions de dents s’enfoncent dans son corps en brisant les os et en avalant la chair. Dans les ténèbres et le silence, alors que les sensations finissent par disparaître complètement, sa conscience s’efface ensuite, dévorée par un monstre.
Charade, Inquisiteur et chef d’Arcana, disparaît alors que la pluie pourpre qu’il a créée continue de tomber sur les cadavres des membres d’Arcana.
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Correction : Hastin
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