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Chapitre 393 : Les liens qui nous unissent

Je me redresse alors que Juliette me prévient que quelqu’un est devant ma cellule. Il fait nuit, mais il y a suffisamment de lumière venant de l’extérieur pour que je sois capable de voir une silhouette.
D’après la forme du vêtement qui ressemble à une robe, j’ai bien l’impression que c’est ma geôlière qui est venue me voir.

Son souffle est lourd. Bien trop pour être normal. Je place mon dos contre le mur en bois de la cellule en la regardant. Sa manière de respirer me dérange, mais je préfère éviter de trop me concentrer sur les détails. Elle est à la limite de se faire passer pour un fantôme à cause des ténèbres. Je soupire en activant le vermillon. Ghg… C’est mieux, mais un peu douloureux vu la quantité de corruption qui se dégage de son corps. Je ne savais pas que c’était possible, mais l’excès de corruption qui se dégage d’elle me brûle littéralement les yeux.

Je peux plus facilement voir le contour de sa silhouette en tout cas. Malheureusement, sa respiration s’accélère. C’est sans doute de voir mes yeux s’illuminer dans le noir qui la fait réagir ainsi.

Elle s’approche et attrape les barreaux de ma cellule en tremblant. Elle étouffe presque un rire maintenant. J’imagine qu’un sourire bien trop grand se trouve sur son visage et je suis bien content de ne pas le voir. L’inconnue commence à sérieusement m’inquiéter maintenant.

Je soupire en chassant ce sentiment et je fais un geste de la main pour la saluer simplement. Elle va probablement faire quelque chose d’étrange en réponse, mais si elle a autant de corruption elle est sans doute folle. Je peux peut-être jouer là-dessus plus tard pour sortir d’ici. Pour l’instant… Je dois surtout récupérer de ma blessure.

En réponse à mon geste, elle regarde sa propre main avant de la secouer en la regardant. Elle se met ensuite à la secouer frénétiquement dans ma direction. Oui. Elle est folle, plus de doute là-dessus. En ramenant la couverture sur moi, je désactive le vermillon pour dormir. Je dis à Juliette de garder un œil sur elle pendant que je dors. Je ne compte pas m’en occuper plus longtemps.

J’ai besoin de dormir pour récupérer. Si la ville est aussi grande, je vais probablement avoir besoin de toute mon énergie pour comprendre ce qu’il s’y passe et m’enfuir de cette prison si nécessaire, ou même m’évader si la folle commence à agir d’une façon déplaisante…

*

Je me réveille en secouant la tête pour chasser un frisson. Mon premier réflexe est de regarder les barreaux de ma cellule et je peux voir qu’elle est toujours là à me regarder.

« Bon sang ! »

Rien de mieux pour se réveiller que de se dire que quelqu’un d’inquiétant a passé la nuit à nous observer dormir. Juliette me confirme qu’elle n’a rien fait de plus avant d’aller dormir à son tour, maintenant que je suis réveillé. L’inconnue commence à murmurer et j’ai l’impression qu’elle répète ce que je viens de dire de plus en plus fort.

Je décide de me lever en l’ignorant. Je m’étire un peu avant de vérifier ma blessure. Je suis en voie de cicatrisation, mais il me faudra sans doute quelques jours de plus pour ne plus en sentir la présence. Cela va de pair avec la bosse que j’ai à l’arrière du crâne.

Je me tourne finalement vers l’inconnue pour commencer la discussion.

« Mon nom est Nomad. Quel est le tien ? »

Elle me regarde en ayant l’air choqué de m’entendre lui poser une question. À peu de chose près, j’ai la sensation qu’elle ne s’attendait pas à une question de ce genre. Elle bouge les lèvres et balbutie sans faire de sens puis s’arrête en secouant la tête. Je croirais presque qu’elle est muette si je ne l’avais pas entendue parler un peu plus tôt.

Je me frotte les cheveux en soupirant. Il est de toute façon temps pour moi de m’habiller. Mon armure n’a pas résisté à ma confrontation contre les chasseurs, mais j’ai toujours mon armure légère « tactique » de côté. Je n’avais juste pas le temps de l’enfiler. Entre dormir quelques minutes de plus et enfiler des vêtements qu’ils allaient de toute façon être détruits en quelques attaques, le choix était rapide.
Vu ma situation et la présence de la princesse de la corruption, je ne sais pas à quoi m’attendre. Avoir des vêtements est sans doute un plus si je dois m’échapper. S’ils sont aussi forts que les chasseurs là-dehors, je n’ai aucune chance et cela ne me sert à rien. Je ne le crois pas, mais j’ai besoin de le confirmer. La princesse devant moi n’était pas si puissante quand elle m’a poignardé. Même le coup que j’ai reçu derrière le crâne n’était pas si fort que ça. Si le niveau de force des chasseurs est la norme, le soldat qui m’a frappé m’aurait mis une attaque qui m’aurait arraché la tête sans même s’en rendre compte.
Vu que je suis toujours en vie, je peux assumer que mes vêtements me protégeront de leurs attaques. Moins que mon armure habituelle, mais mieux que rien.

Je peux entendre l’autre folle derrière moi qui s’agite alors que je mets des vêtements. C’est sans doute un manque de gêne de ma part qui la fait réagir. Tant pis ou tant mieux pour elle, selon ce qu’elle en pense. Je pense que l’ignorer est mieux vu la situation. Je suis en prison, n’espérons pas avoir une vie privée.

Je réajuste le harnais en me tournant dans sa direction. Pour une fois, ce n’est pas moi qu’elle regarde, mais mon armure qu’elle étudie attentivement. Elle ne sait sans doute pas comment j’ai fait apparaître des vêtements maintenant que j’y pense. Le principe de l’inventaire est sans doute un peu étrange pour une non-grimpeuse.
Malheureusement, vu son regard, j’ai l’impression d’avoir encore plus attisé son intérêt pour moi…

Elle se met soudainement à hurler sans que cela ne fasse de sens. Elle dit une suite de mots décousue en me pointant du doigt à quelqu’un que je ne peux pas voir. Assez vite, j’entends toute une série de bruits et une porte qui s’ouvre. Elle continue à hurler sans que j’arrive à donner un sens à ses paroles. Je me frappe les oreilles par réflexe en me demandant si je n’ai pas cassé le système de traduction automatique. Bien sûr, cela ne change rien, mais cela me donne l’impression d’essayer quelque chose.

J’attrape mon dernier stylet et Juliette décide d’apparaître hors de mon bras pour commencer à menacer la vingtaine de soldats en armure en bois blanc et brandissant d’énormes boucliers. Elle n’est vraiment pas contente de ne pas pouvoir dormir après avoir passé la nuit à surveiller l’elfe aux barreaux. Les soldats se rassemblent devant la porte de la cellule alors que l’un d’eux est en train de déverrouiller la porte.

La princesse continue de hurler en me pointant du doigt. C’est maintenant le moment de vérité sur la force de ses types. La porte de la cellule s’ouvre en grand alors que les soldats avancent en gardant les boucliers braqués dans ma direction. Je jette un de mes derniers fumigènes au sol en espérant que ce sera suffisant pour me sortir de là.

Sans réfléchir, je décide de sauter au-dessus du mur de bouclier en frappant l’un d’eux au visage. Il s’effondre assez rapidement alors que je passe au suivant qui me bloque le passage. Les boucliers ne m’aident absolument pas et, malgré la fumée, ils continuent à entrer dans la cellule en se poussant les uns les autres. Ma cellule n’est pas si grande ou haute que ça. Cinq hommes en armures et avec de tels boucliers sont déjà beaucoup, mais ils sont maintenant dix.

Je me fais frapper par un bouclier et son propriétaire continue à pousser avec la force de tous les hommes derrière lui pour l’aider. Alors que j’essaye d’escalader le bouclier pour me sortir de là, je frappe violemment le mur dans mon dos. Je suis coincé, mais je tends le bras pour lancer Juliette sur mon assaillant. Elle entre dans son corps et il commence à hurler. Cependant, les hommes derrière lui s’en moquent et le poussent lui aussi contre moi.

… Je suis coincé. J’ai maintenant un bouclier de chaque côté de moi et neuf hommes qui poussent pour me coincer contre le mur. La fumée n’aura servi à rien dans ce désordre. J’ordonne à Juliette de revenir et de se cacher dans mon corps alors que j’ai des difficultés à respirer en étant écrasé ainsi.

De chaque côté, des soldats attrapent mes bras et les immobilisent contre le mur. Je serre les dents en me demandant s’ils vont les couper, mais rien ne se passe.
En activant le vermillon, je suis capable de voir à travers la fumée que la princesse de la corruption approche de moi.

Quelqu’un tire soudainement sur mon bras pour l’approcher d’elle alors que j’ai du mal à respirer sous la pression des boucliers. J’ai peut-être encore une chance si je fusionne en Sigu et c’est exactement ce que j’essaye de faire, mais je n’en aurai peut-être pas le temps.

Alors que je me prépare, je peux sentir quelque chose sur ma main. Mes doigts sont tendus de force et on glisse quelque chose dessus.

Un anneau.
…
C’est une blague ?!
Est ce que la princesse de la corruption vient de m’épouser sans me demander mon opinion ?! Même pas de dîner romantique ou de jolie déclaration ? Je mange des boucliers après l’avoir entendu hurler et maintenant elle me passe la bague au doigt ?

Avant même que j’ai le temps de comprendre ce qu’il se passe, je peux sentir quelque chose d’étrange… Un… un lien ?
Mon cerveau est en irruption alors que je sens une connexion se former avec la folle.

Je pensais avoir passé un cap à cause du dressage de Yuu, mais c’est trop. Trop de choses se déversent en moi dans ce lien. Je suis pourtant capable de ressentir une émotion toute particulière qui vient de la « chose » avec qui j’ai maintenant un lien alors que je perds graduellement connaissance. De la joie. Une profonde et pure joie.

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Correction : Hastin

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