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Tate no Yuusha no Nariagari – Chapitre 43.5.1

Épilogue : Le devoir du Porte-Bouclier
Traducteur : Team Yarashii

— Oui, c’est une malédiction.

Nous étions retournés au village et avions couru rendre visite au médecin afin qu’il puisse soigner Raphtalia.

— Et très puissante, de surcroît. Le dragon des montagnes était-il porteur d’un tel fléau ?
— Bah… non… en fait…

Je ne savais pas trop si je devais me montrer honnête. J’étais perdu.

— Oui, j’ai accidentellement touché la viande de dragon, et c’est ce qui m’a brûlée…

Raphtalia parla et accrocha mon regard, comme pour confirmer que ce serait notre petit secret.

— Est-ce que vous pouvez l’aider ? On est prêts à payer ce qu’il faudra.

Raphtalia était une femme. Elle ne méritait pas de passer le reste de sa vie avec des cicatrices aussi noires que disgracieuses.

— Ma foi, il y a bien quelque chose…

Le docteur repartit dans sa chambre et revint avec une bouteille remplie d’un liquide clair.

— C’est quoi ?
— De l’eau bénite. La puissance du sacré est ce qui convient le mieux pour lever une malédiction.
— Oh…

Le Bouclier du Courroux ne se contentait pas de blesser ses victimes, il empêchait les plaies infligées de guérir.
Il paraissait de plus en plus dangereux. Il offrait une contre-attaque qui ne faisait aucune distinction entre alliés et ennemis.
Et j’avais vu l’arbre du bouclier, qui ne présentait toujours aucun progrès.
Cela n’avait duré qu’un court instant, mais je savais à présent que je ne pourrais pas le débloquer.

— Nous allons tremper ces bandages dans l’eau bénite pour le moment…

Il joignit le geste à la parole et les enroula ensuite autour des cicatrices noircies de Raphtalia.

— Je ne garantis pas le résultat… Si vous le pouvez, rendez-vous dans une ville plus grande et procurez-vous de l’eau bénite conçue par l’Église.
— Il en faudrait combien pour la soigner ?
— Pour être franc… cette malédiction est très puissante. J’ignore si vous pouvez totalement la lever… Comment est-ce que ce dragon…

C’était moi… J’étais entièrement responsable. Cependant, le mal qui la frappait était apparemment assez fort pour que des gens croient qu’il soit originaire d’un dragon.

— D’accord… Vous avez produit quelle quantité de remèdes ?
— Juste un peu. Cher saint, veuillez aider les malades, je vous prie.
— Bien sûr.

Je laissai Raphtalia entre les mains du médecin et me rendis au bâtiment où étaient logés tous les malades.
On pouvait affirmer que ce médicament avait été fait par un professionnel.
Il soigna entièrement l’affliction que j’avais été incapable de supprimer avec mon propre remède.

Je contemplai les patients réunis là, visiblement endormis, et me sentis soulagé.
Je désirais plus de force… Être suffisamment puissant pour ne plus avoir à dépendre de ce bouclier.
Je souhaitais pouvoir guérir les gens, pas les maudire ! Tout cela était dû à ma propre faiblesse. Elle en était la cause. Je la détestais.

Filo avait survécu. Elle allait bien. Mais viendrait un temps où ce ne serait pas nécessairement le cas, où elle aurait besoin de moi. Lorsqu’elle avait disparu sous mes yeux, j’avais complètement perdu les pédales.
Je laissai ces pensées dériver dans ma tête. Rien de cela n’était un jeu.

Si une personne mourait, elle ne reviendrait pas à la vie. Je me surpris à regarder le cimetière derrière le bâtiment.
Ils m’avaient trahi… Ils m’avaient piégé ! Raison de plus… pour protéger ceux qui avaient foi en moi.
Je retournai auprès du docteur et découvris que Raphtalia était assise, ceinte de multiples bandages. Je lui présentai mes excuses.

— Je suis désolé.
— Ce n’est pas grave.
— Mais je…
— Je craignais davantage que vous partiez…. que vous me laissiez là pour continuer de votre côté.
— Quoi ?
— Ce pouvoir, il aspire à vous emmener très loin. C’est du moins ce que j’ai ressenti. Alors, si j’ai pu vous en empêcher, vous permettre de rester ici, ces blessures sont une contrepartie raisonnable.

Elle me sourit et je sentis mon cœur étreint par l’émotion.
Je devais la protéger. Il le FALLAIT. Je me promis de ne plus jamais me laisser dominer par ce bouclier.
Et ensuite, je pris conscience que fuir ce risque d’abandon, de perte… était déjà une perte en soi.

— Raphtalia… tu as sauté dans la bataille pour empêcher ça, pas vrai ?
— Pardon ?
— Quand on affrontait ce dragon, je t’ai ordonné de te retirer. Mais, si tu m’avais obéi, tu n’aurais pas pu me protéger.

Je me trompais. Une simple protection… une simple fuite en avant… ne suffirait pas.
Je ne pouvais que défendre.
Toutefois… toutefois, en agissant de la sorte, je devais m’assurer que nos ennemis soient vaincus… afin de ne pas perdre mes amis.
Tout cela… toute cette souffrance existait parce que je désirais fuir cette perte.

— Vous vous trompez ! Je me suis jetée en avant pour ma propre satisfaction.

Raphtalia se pencha vers moi et rejeta en bloc ma théorie.

— Le courage et la témérité sont deux choses distinctes. Je me suis montrée imprudente, et vous n’avez eu de cesse de tenter de me protéger… Mais, j’ai… j’ai…

Sans vraiment y penser, je tendis ma main et touchai sa joue. Une larme dévala mes doigts.

— Tout comme courage et témérité ne sont pas identiques, c’est pareil pour la prudence et la lâcheté. Tu n’es pas une lâche. Personne ne peut défendre un tel individu.

Ainsi, je voulais mener l’assaut. Je souhaitais me tenir devant elles dans le but de pouvoir protéger Filo et Raphtalia.
Dans ces montagnes, si j’avais pris la tête, j’aurais pu envoyer un Bouclier d’Air sur lequel aurait pu s’appuyer Filo. Le dragon n’aurait donc pas pu la manger.
J’avais peur de la perdre.

— Alors, ne t’en fais pas. Regarde un peu tout cet entraînement qu’on a eu, sans avoir laissé personne sur le carreau. On va pouvoir se servir de cette expérience pour la suite. Nous sommes plus forts aujourd’hui que nous ne l’étions hier.

Les yeux de Raphtalia s’emplirent de larmes et elle acquiesça.

— Oui… Ne pas aller trop en avant… Ne pas rester trop en arrière… Trouver l’équilibre est difficile.
— Exact, mais je pense qu’on en est capables. Garde juste en tête que le Héros Porte-Bouclier, c’est-à-dire moi, se tient en première ligne. Priorise toujours ta sécurité et, si tu en as les moyens, alors protège les autres. C’est facile.
— Présenté ainsi, cela paraît effectivement simple.
— Ça va le faire.
— Ma grande sœur va bien ?

Filo venait de jeter un œil dans la pièce et fixait nerveusement Raphtalia.

— Je vais bien.

Aujourd’hui, elle se reposerait. Filo et moi sortîmes.

— Mon Maître !
— Quoi ?
— Je pensais que je voulais rester sous forme humaine pour toujours… parce que je vous voyais si proches, tous les deux.

Elle avait revêtu son apparence humaine et souriait.

— Mais j’ai pas pu. C’est amusant de tirer cet attelage et je me persuadais à tort juste parce que je voulais que tu m’aimes. Même si je prétends qu’on est pareils, je peux pas le faire !
— …
— Mais, mon Maître ? Je suis la même Filo, quelle que soit ma forme.
— En effet.

J’avais été surpris de constater sa transformation, mais je ne croyais pas que cela avait modifié mon attitude envers elle. Ce qui ne m’avait pas empêché de la traiter comme une enfant.

— Je suis moi, mon Maître est mon Maître et ma grande sœur est ma grande sœur, pas vrai ? On peut pas être autre chose que soi-même, et je… je peux pas être une vraie humaine. Mais, quand même, il n’y a personne qui peut me remplacer, hein ?

C’était pour ÇA qu’elle avait pris forme humaine ?
Je hochai la tête devant cette avalanche de questions.

— Mais tu sais quoi ? Je t’aime bien, mon Maître ! Autant que ma grande sœur t’aime ! Je vais être la meilleure Filo possible !
— C’est… une bonne chose.

Qui aurait cru que Filo me ferait la leçon dans ce domaine ?
Défendre les gens était censé être MON boulot, mais je remarquai à mon grand étonnement que je n’étais plus en colère que ce rôle me soit dérobé. Je me demandais pourquoi…

— Vous savez quoi ? Pour mon Maître et ma grande sœur, je vais tout donner ! Ouais, je vais vraiment essayer du mieux que je peux !
— J’espère bien. Te protéger est ma responsabilité, après tout.
— Ouais !

Nous passâmes le reste de la journée à nous détendre au village.

Le lendemain, nous fîmes beaucoup d’efforts pour tenter d’éradiquer la maladie pour de bon.
Le médecin me demanda si je pouvais faire quoi que ce soit et je proposai de fabriquer des remèdes. Nous finîmes notre tâche plus tôt que je ne l’imaginais. J’avais pensé qu’il aurait pu m’enseigner des choses sur l’art de la guérison, mais mes connaissances sur ce sujet étaient insuffisantes, et je ne voulais pas représenter une gêne.

— Merci beaucoup, cher saint !

Une jeune fille du bâtiment des malades me salua et me remercia.
Les avais-je… protégés ?
J’étais désormais résolu à ne plus fuir. Dans le cas contraire, je serais incapable de défendre les gens que je devais protéger, je me contenterais alors de sauver ma peau… mais cela ne vaudrait rien.
Je n’étais plus seul.
Maintenant, j’incarnais un parent pour Filo et Raphtalia et il me fallait tout mettre en œuvre pour façonner un monde meilleur, afin d’en faire un lieu où les gens puissent vivre heureux.

— M. Naofumi ?
— Mon Maître !
— Hein ? Qu’y a-t-il ?

Je déambulais dans ce village à présent en paix quand elles m’interpellèrent.

— Vous avez l’air vraiment… soucieux ?
— Ouais !
— Faites pas gaffe à ça.
— Mais, mon Maître ! Tu t’inquiètes toujours pour tout ! Bien sûr que ça nous préoccupe.
— Comment ça, je m’inquiète toujours pour tout ?
— Oui, oui. Tu passes ton temps à demander si ça va, en ce moment.
— Elle a raison. Néanmoins, vous n’avez plus à vous en faire.
— Mais je…
— Cessez de nous considérer comme des enfants. Nous pouvons gérer nos propres affaires.
— Ouais !
— Je sais désormais que vous prenez soin de nous… mais cela fonctionne aussi dans l’autre sens, M. Naofumi. Tout ira bien tant que l’on reste ensemble.
— Ouais !
— Tu as raison.

Raphtalia mûrissait. Elle possédait des sentiments et des réflexions propres, comme si sa personnalité s’était développée pour correspondre à son apparence. Je ne pouvais plus la traiter comme une enfant.
Nous formions une équipe, maintenant. Enfin, je le supposais.

Me ronger les sangs dans mon coin n’apporterait rien de bon. Je ne parviendrais pas à restaurer la paix dans ce monde par moi-même. Un simple coup d’œil vers les vagues de destruction rendait ce constat évident, et il était encore plus vrai pour moi, le Héros Porte-Bouclier, qui ne pouvais pas attaquer.
Si je voulais vraiment mettre un terme à cette catastrophe cyclique, je devrais le faire accompagné.

— Très bien. Allons-y… ensemble.
— Oh ! Mon Maître a souri !
— Tout à fait. Et ce n’était pas un de ces sourires faux et bizarres. Il était authentique.

Les deux me sourirent en retour.
Hé… elles parlaient de moi ? Je ne souriais jamais ?
Qu’importe.
Ce n’était plus le cas.
Je n’étais plus seul.
Car j’avais des amis sur lesquels compter.

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