Chapitre 84 : Les montagnes ne bougent pas, donc elles sont plus simples que les gens.
Le chevalier Karcan, qui avait réussi à repousser la soudaine attaque de monstres avant que la ville ne subisse de dégâts, se trouvait dans une situation bien particulière.
« Pourquoi y a-t-il eu une ruée de monstres et l’apparition d’un nouveau donjon à un moment pareil ? » se demanda-t-il.
Une partie de la compagnie qu’il dirigeait avait été gravement blessée, mais heureusement, aucun de ses hommes n’était mort. Le seigneur de la région, le vicomte Niarki, l’avait même remercié.
Cependant, une grande partie des mérites étaient revenus à l’Épée à la Flamme Bleue, Heinz, celui dont on disait qu’il deviendrait probablement le second aventurier de rang S du royaume d’Orbaume. Les monstres avaient scandé « Tuez Heinz » comme une incantation, et tous s’étaient jetés sur lui.
Dans ce contexte, Heinz aurait pu être accusé d’avoir attiré les monstres et provoqué un désastre en ville, mais il avait déjà une bonne réputation et était adoré par beaucoup.
Au lieu d’être blâmé, sa renommée n’en avait été que renforcée en tant que « champion qui avait affronté la horde de monstres sans fuir ». Les gens louaient même le fait que Heinz ait été ciblé, disant que c’était un signe que les dieux maléfiques, encore serviteurs survivants du Roi Démon, le craignaient — autrement dit, Heinz était un héros redouté même des dieux.
Puisque c’étaient Heinz et les autres membres des Lames aux Cinq Couleurs qui avaient éliminé la majorité des monstres, il était naturel qu’ils soient couverts d’éloges.
Dans ce cas, on pourrait se demander pourquoi les aventuriers et les hommes de Karcan avaient participé à la défense, mais… ce genre de question ne se pose qu’après coup. Rien ne prouvait, au moment de l’attaque, que les monstres viseraient uniquement Heinz. Et même si cela avait été le cas, ils n’auraient pas pu dire simplement : « Très bien, cela ne nous concerne pas, » et rester les bras croisés.
Ainsi, la compagnie de Karcan s’était épuisée dans une bataille féroce. Heinz et son groupe étaient maintenant en train d’explorer le sinistre donjon apparu dans la forêt proche de la ville.
Et Karcan avait été informé que la prochaine expédition de sa compagnie n’était pas nécessaire.
« En vérité, ce n’est pas le moment pour une expédition. Les hommes de la compagnie sont complètement soignés grâce à la magie de soin de Froto, mais ils ne sont pas encore en état de bouger facilement. »
L’origine de cette ruée de monstres était presque certainement liée au donjon nouvellement formé, mais ce n’était pas encore confirmé. Jusqu’au retour de Heinz et de son groupe, Karcan et ses hommes, affectés à la défense de la ville, ne pouvaient pas se déplacer.
Même après leur retour, mettre en place un système pour surveiller et contrôler le donjon prendrait du temps. Karcan n’était pas obligé d’y participer, mais s’il ignorait ouvertement les attentes du vicomte Niarki, qui comptait sur lui, sa position sociale en pâtirait.
Mais cela ne signifiait pas pour autant que Karcan serait forcément tenu en haute estime même s’il répondait aux attentes du vicomte. Après tout, le projet de colonisation au sud, dont il était censé avoir la charge, avait été complètement abandonné.
« Le plus tôt possible pour agir, ce sera l’hiver… » soupira Karcan. Il ne savait même plus combien de fois il avait poussé ce soupir.
La ville de Niarki n’avait toujours pas reçu la nouvelle du naufrage du château du duc, construit par Nineroad, ni du scandale qui avait ébranlé le royaume d’Orbaume, ni même que le Maître de la Guilde des Mages ainsi que plusieurs nobles avaient été révélés comme ayant des liens avec des Vampires.
Luciliano, le Dégénéré. C’était un aventurier humain de classe C, et lorsqu’il avait rencontré Vandalieu pour la première fois, il travaillait encore dans la nation-bouclier de Mirg.
Il avait créé une Vivante-Morte à partir de la femme qui allait devenir Pauvina, et s’en était servi comme familier pour infiltrer le village de l’Orque Noble Bugogan afin de recueillir des informations.
Et après la bataille entre les Goules et les Orques, il avait rencontré Vandalieu à travers la Vivante-Morte, mais…
C’est donc ça, son vrai visage. C’est vrai que maintenant que je vois son corps physique, il me fait une impression différente, pensa Vandalieu.
À l’époque, quand il n’avait que trois ans, il ne savait pas à quoi ressemblait le visage de Luciliano. Même s’il l’avait su, Luciliano avait maintenant les joues creusées et une barbe en bataille. Si Gopher et les autres ne lui avaient pas dit qu’un ancien aventurier humain se trouvait parmi les esclaves, il ne l’aurait même pas reconnu.
« Alors, pourquoi es-tu ici ? » demanda Vandalieu une nouvelle fois, puisque Luciliano n’avait pas répondu la première fois… mais il n’y eut toujours pas de réponse.
Plutôt que de faire exprès de se taire, il semblait s’être évanoui.
Eleanora leva discrètement le pied.
« Eleanora, il a l’air de pouvoir se casser si tu lui marches dessus, alors évitons ça, » dit Vandalieu.
« Oui, Vandalieu-sama. »
Toujours dans les bras d’Eleanora, Vandalieu fit suinter un peu de médicament régénérant de ses griffes, puis l’appliqua sur le visage de Luciliano à l’aide de Télékinésie. Aussitôt, Luciliano se redressa comme un jouet à ressort… mais comme il était toujours ligoté, il perdit l’équilibre et retomba au sol.
« Kahah ?! Hah ! A-attendez, je vous en supplie, ne me tuez pas ! Et si vous devez me tuer, laissez-moi au moins mourir dans le confort ! Et donnez-moi un dernier repas ! »
« Tu sembles étonnamment en forme, » dit Vandalieu. « Pour commencer, vu ton comportement, on dirait que tu te souviens de qui je suis. »
« I-il est impossible que j’oublie quelqu’un d’une race aussi rare qu’un Dhampir. Mais attendez, ce n’était pas mon intention de vous croiser ici ! » supplia Luciliano.
« Non, je serais franchement surpris si c’était le cas, » répondit Vandalieu.
Il semblait que Luciliano se souvenait parfaitement de qui était Vandalieu. Y compris de la menace qu’il lui avait faite : « La prochaine fois que je te vois, je te tuerai. »
« Vandalieu-sama te demande ce que tu fais dans un endroit pareil. Réponds-lui, » dit Eleanora pour inciter Luciliano à parler. « Et au passage, je ne suis pas la mère de Vandalieu-sama, mais sa servante, » ajouta-t-elle, plusieurs personnes ayant déjà fait la même erreur.
« D’accord, je vais répondre, » dit Luciliano. « Après cette affaire, j’ai pris mon argent, quitté Balcheburg et migré vers le royaume d’Orbaume. J’ai continué mes recherches sur les morts-vivants tout en travaillant comme aventurier. Mais un jour, malheureusement… »
Selon le récit de Luciliano, il s’était retrouvé mêlé à une dispute entre le seigneur Belton et le seigneur Lucas.
Le troisième fils d’un certain noble affilié à la faction de Belton avait comploté pour que son père change de camp et rejoigne la faction de Lucas, tout en le nommant comme successeur. Pour cela, il avait prévu de faire assassiner son père et de le transformer en marionnette Vivante-Morte.
Son regard s’était porté sur Luciliano, un aventurier solitaire sans compagnon ni groupe, pour créer ce Vivant-Mort.
Bien sûr, Luciliano ne voulait pas s’impliquer dans une telle conspiration, mais il avait été kidnappé et menacé, sans avoir le choix. Il fit semblant d’obéir, mais utilisa en secret une souris Vivante-Morte comme familier pour chercher de l’aide. La conspiration du troisième fils fut stoppée avant même de commencer, et les conspirateurs furent arrêtés.
« Mais j’ai été arrêté aussi, » expliqua Luciliano. « Cette famille noble semblait vouloir étouffer l’affaire. J’ai été immédiatement emprisonné, puis envoyé ici en tant qu’esclave criminel. Grâce au collier d’esclave, je ne peux pas utiliser la magie. Bon, même dans ces conditions, mes attributs numériques sont plus élevés que la moyenne, donc j’ai réussi à survivre jusqu’à maintenant, mais… Je suppose que c’est la fin. Ah, j’aurais aimé au moins goûter un peu de vin doux, une soupe chaude, une salade fraîche, du pain moelleux, un plat de poisson bien frais, un plat de viande avec de bons morceaux épais… et un dessert avant de mourir. »
« … Ce n’est pas plutôt un repas complet que tu demandes là ? » fit remarquer Vandalieu.
Le visage ovale de Luciliano était devenu si maigre qu’il en paraissait encore plus misérable, mais sa requête était étonnamment luxueuse. Il était possible qu’il s’entende plutôt bien avec Vandalieu, contre toute attente.
« Alors, Vandalieu-sama, allez-vous le tuer ? » demanda Eleanora.
« Que devrais-je faire ? » répondit Vandalieu, l’air perplexe.
Luciliano entretenait une relation assez particulière avec Vandalieu. Ce n’était pas un allié, donc il n’y avait aucune raison de lui venir en aide. À choisir, il était plutôt un ennemi. Mais Vandalieu ne pouvait pas vraiment dire s’il valait la peine d’être tué dans cette situation.
Pour Pauvina, qui n’était pas présente, Luciliano était l’homme qui avait manipulé le corps de sa vie précédente sans autorisation et en avait fait un jouet pour Orque Noble… mais il n’était pas directement responsable de sa mort, et Pauvina n’avait montré aucun signe de haine envers lui après sa réincarnation. En fait, ne l’avait-elle pas simplement oublié ?
Cependant, si Vandalieu le laissait partir, il y avait de fortes chances que des informations sur ce qui s’était passé dans cette mine finissent par fuiter.
Mais Vandalieu hésitait à le tuer.
Contrairement aux esclaves criminels qui avaient réellement commis des atrocités, Luciliano n’était pas une personne foncièrement mauvaise, et Vandalieu ne nourrissait pas de rancune personnelle contre lui. Compte tenu des circonstances de sa réduction en esclavage, Vandalieu ressentait même une certaine compassion pour lui.
« Je suppose que je vais d’abord demander l’avis de Pauvina, » décida Vandalieu.
Il suspendrait son jugement pour l’instant, en attendant de demander à Pauvina s’il était acceptable de ramener Luciliano à Talosheim.
Après cela, Vandalieu réveilla les nobles et les soldats de la mine et les rassembla au même endroit.
« Ce n’est pas grave si leurs membres se détachent ou si leurs têtes éclatent, mais essayez de ne pas les écraser complètement. Ah, mais les réduire en bouillie, c’est totalement acceptable, » dit-il.
Ses paroles menaçantes n’étaient pas adressées aux prisonniers conscients mais paralysés qui se tenaient derrière lui, mais aux nouveaux habitants de Talosheim, qui soufflaient bruyamment par le nez en tenant des massues, pelles et pioches.
« E-enfoiré ! Qu’est-ce que tu comptes faire ?! » lança une voix particulièrement forte, parmi les innombrables supplications de pitié.
« Une exécution publique, » répondit Vandalieu.
« Tu te fous de moi ! » répliqua la voix avec fureur. Vandalieu trouva cela plutôt désagréable.
Mais ce seraient là les dernières paroles des personnes sur le point d’être exécutées de manière atroce.
Ce serait puéril de leur en vouloir parce qu’ils me crient dessus, pensa Vandalieu en se retournant.
« Je suis le vicomte Besser, celui à qui Son Excellence le duc a confié la gestion de cette mine ! Je proteste fermement contre ce traitement injuste ! » cria le vicomte, la bouche si grande ouverte qu’on aurait dit que son visage entier n’était qu’une bouche.
Vandalieu le regarda d’un air perplexe. « Un traitement injuste, dis-tu… ce n’est pas normal, ça ? »
Le vicomte et ses soldats avaient fait des choses que Vandalieu hésitait même à exprimer à voix haute. Les rôles avaient simplement été inversés à présent, alors… n’était-ce pas là la norme ?
En réalité, ils allaient mourir en moins de dix minutes sans subir les mêmes tortures qu’eux avaient infligées. Donc en vérité, n’étaient-ils pas chanceux ?
« Ne te leurre pas ! Je suis un noble ! » s’écria le vicomte.
« … Oui, je sais. Et alors ? » répondit Vandalieu.
Il avait expliqué la situation au vicomte et à ses hommes. Il pensait que faire cela, plutôt que de les tuer sans qu’ils comprennent quoi que ce soit, permettrait de les transformer en Morts-Vivants plus puissants.
« Misérable ! Même en temps de guerre, le bon sens veut que l’on fasse des prisonniers parmi les nobles et qu’on leur accorde un traitement approprié à leur rang ! Tu ne le sais même pas ?! » hurla le vicomte.
« Non, je ne savais pas. Désolé. » Vandalieu, qui venait d’apprendre quelque chose de nouveau, grava les paroles du vicomte dans sa mémoire. S’il devenait un jour aventurier, il pourrait être amené à participer à des guerres, donc autant apprendre ce genre de choses dès maintenant. « Je le ferai la prochaine fois, » dit-il.
« Non, fais-le maintenant ! » exigea le vicomte. « Tu crois que tu peux t’en tirer en me tuant ?! »
« Je compte bien faire en sorte que ce soit le cas, » répondit Vandalieu.
« C’est impossible ! Je suis un noble ! Si tu fais une chose pareille, vous, les êtres de basse naissance, serez tous condamnés à mort ! Mon royaume mettra son prestige en jeu pour traquer ceux qui tuent des nobles et les exterminer sans pitié ! » hurla le vicomte Besser.
À ces mots, certains des anciens esclaves Titans pâlirent de peur ; ils commencèrent à baisser les armes qu’ils tenaient.
C’était là toute la différence de statut qui existait entre roturiers et nobles dans le monde de Lambda. Toutes les vies n’étaient pas égales : celles des nobles et de la royauté étaient clairement considérées comme plus précieuses. C’était un fait bien connu.
« Tu comprends maintenant, espèce de petit rustre ?! » hurla le vicomte Besser à Vandalieu, roi actuel de Talosheim.
À cet instant, une soif de sang montante émanait de Borkus et d’Eleanora, mais Vandalieu leva la main pour les calmer.
Ce qui importait ici, ce n’était pas de réagir au fait qu’il avait été insulté par le vicomte, mais de faire comprendre aux nouveaux citoyens de Talosheim sa puissance. S’il s’en remettait trop à Borkus et aux autres, certains pourraient changer d’avis et conclure qu’ils ne pouvaient pas le suivre. Et si les anciens esclaves criminels ne le prenaient pas au sérieux, cela poserait problème à l’avenir.
« Tout le monde, approchez s’il vous plaît, » dit Vandalieu.
« D’acc~ » répondit une voix joyeusement.
Pensant qu’il devait démontrer sa puissance, Vandalieu invoqua Levia et les autres fantômes, puis leur transféra de la mana. Il leva les yeux vers la mine… cette petite montagne qui jaillissait de la surface de la terre, haute d’environ cinq cents mètres.
« … Bombardement de Destruction de la Prison de Flammes Cadavériques. »
De petites flammes apparurent, semblables à une myriade de lucioles. Mais, l’instant d’après, elles se transformèrent en une infinité de crânes faits de flammes noires.
Les crânes gloussaient en se ruant vers la montagne que Vandalieu pointait du doigt.
Ce qui s’ensuivit était terrifiant à contempler.
Plus d’une centaine de crânes enflammés plantèrent leurs crocs dans la montagne rocheuse. Les rochers durs devinrent friables, se brisèrent, brûlèrent et s’effondrèrent. Ce processus se poursuivit sans relâche, et sous les yeux de tous, la montagne changea de forme, littéralement déchirée hors du sol. Un grondement tonitruant accompagna la chute des roches, mais même ce bruit fut étouffé par la magie de Vandalieu.
« G-gamin, la montagne va disparaître, » dit Borkus.
« Ah, tu as raison. »
Quand Borkus l’arrêta, la montagne avait déjà perdu un tiers de sa hauteur. Ce n’était pas une montagne très grande au départ, mais cette démonstration de puissance laissa sans voix non seulement le vicomte et ses soldats, pourtant bruyants jusque-là, mais aussi les anciens esclaves, bouche bée.
Eleanora et les autres étaient tout aussi stupéfaits. Même Pete, dont la tête dépassait des cheveux de Vandalieu, était figé sur place.
Jusqu’à présent, aucun sort lié à l’attribut de la mort ne possédait la capacité de détruire physiquement des cibles. Mais avec l’acquisition de la compétence Magie des Esprits Morts et l’aide de Levia et des autres, Vandalieu pouvait désormais accomplir les mêmes choses que la magie de l’attribut feu.
C’était la première fois qu’Eleanora et les autres voyaient le véritable potentiel de la Mana de Vandalieu.
« Bocchan, ne serait-il pas plus simple d’envahir directement le duché de Hartner ? » proposa Sam.
« Sam, c’est impossible parce que Heinz est là, » répondit Vandalieu. « Et puis, si je fais ça, ça reviendrait à déclarer la guerre aux autres duchés, voire à l’Empire Amid lui-même, non ? »
« Ouais, j’imagine, » dit Borkus. « Peu importe à quel point le gamin est puissant, il reste une seule personne. Si les aventuriers de classe A et les forces d’élite de plusieurs nations attaquent en même temps à différents endroits, on tiendrait pas longtemps. »
Comme il le disait, ce monde comptait de nombreuses personnes capables de faire ce que Vandalieu venait de faire.
« Et puis au final, une montagne, ce n’est qu’une montagne, » dit Vandalieu. « Elle ne bouge pas. Un aventurier de classe B ou A pourrait facilement éviter cette attaque. »
Contrairement aux montagnes, les gens peuvent être équipés de toutes sortes d’Objets Magiques et possèdent des compétences. Le Bombardement de Destruction de la Prison de Flammes Cadavériques manquait de précision, donc un surhumain pourrait y survivre sans trop de mal… bien que des gens ordinaires, eux, seraient réduits en cendres.
« C’est vrai que ça marcherait probablement avec moi, Vigaro, Eleanora-jouchan et les autres, mais… » dit Borkus en levant les yeux vers la montagne effondrée.
Normalement, ils auraient dû fuir les débris tombant, mais Vandalieu avait même détruit les décombres.
Il avait même effacé le bruit, ce qui rendait la scène moins réelle. Mais s’il ne l’avait pas fait, beaucoup auraient probablement perdu connaissance.
« Au fait, c’était vraiment une bonne idée de détruire la mine ? » demanda Borkus.
« Ce n’est pas un problème, » répondit Vandalieu. « J’avais l’intention de la détruire dès le début pour éliminer l’approvisionnement en ressources minérales du duché de Hartner. » Il se retourna vers les anciens esclaves. « Ce que je veux dire, c’est que j’ai le pouvoir. La vengeance des nobles n’est donc pas quelque chose à craindre. Vous ne trouvez pas ? » leur demanda-t-il.
Les anciens esclaves restèrent un moment bouche bée avant de reprendre leurs esprits.
« Je n’ai jamais vu un sort aussi puissant… C’est lui qui va devenir notre roi ? »
« Si notre roi est aussi fort, alors on n’a rien à craindre des nobles de ce royaume, non ? »
« Exactement. Même si le duché de Hartner ou les autres duchés, même si le roi lui-même envoyait une armée, elle serait avalée comme cette montagne, sans même laisser de cendres derrière. »
« Si cette personne est notre roi, alors on ne perdra même pas face à l’Empire Amid… on ne sera plus jamais chassés de notre patrie. »
La détermination revint dans leurs yeux, et les armes qu’ils avaient baissées plus tôt furent à nouveau levées.
En réalité, c’étaient maintenant le vicomte et ses hommes qui étaient livides. Après avoir vu la Magie des Esprits Morts de Vandalieu, ils savaient parfaitement que la famille Hartner telle qu’ils la connaissaient n’avait aucun moyen de gérer ce demi-vampire qui se proclamait roi.
« A-attendez. Si vous nous épargnez — non, au moins moi — je vous paierai tout ce que vous voudrez, » dit le vicomte.
Sa supplique déclencha une vague de supplications parmi les soldats.
« V-vicomte-sama ?! »
« J’ai une femme et des enfants ; s-s’il vous plaît, épargnez-moi ! »
« Je n’ai tué ni violé personne ! C’est vrai, je vous en supplie, croyez-moi ! »
« Hmm, je peux gagner de l’argent autrement, donc ça ne m’intéresse pas vraiment, » répondit Vandalieu. « Violer alors que tu as une femme et des enfants, ce n’est pas très glorieux, si ? Et toi, le dernier, tu devrais éviter de mentir aussi grossièrement. »
Toutes les tentatives des soldats furent vaines.
« J’ai déjà mis de côté ceux d’entre vous qui faisaient simplement leur travail sans blesser, tuer ou violer inutilement les esclaves, » leur dit Vandalieu. Ceux qu’il avait jugés pas assez mauvais pour mériter la mort avaient été rassemblés ailleurs.
Il y avait là un vieux soldat resté fidèle à sa femme, ainsi que des employés amenés ici par le vicomte, comme des servantes et des cuisiniers — environ une dizaine de personnes au total. Ce n’étaient pas des gens particulièrement vertueux, ni animés d’une grande compassion envers les esclaves, mais ils avaient hésité à tuer.
Vandalieu prévoyait de les ramener à Talosheim comme esclaves, de les observer pendant un certain temps, et si tout allait bien, de les libérer et de les faire citoyens libres.
Il détestait tuer inutilement ; il ne pensait à tuer que lorsque c’était nécessaire. L’incident où on lui avait volé une seule pièce d’argent au marché ne lui était même pas resté en mémoire.
Mais lorsqu’il y avait une raison de tuer quelqu’un, il estimait qu’il fallait toujours les tuer.
Le vicomte et ses hommes faisaient partie de ceux qui méritaient de mourir.
« Maintenant, en tant que Roi de l’Éclipse de Talosheim, j’exécuterai votre sentence, » déclara Vandalieu.
Le cri de guerre de Gopher et des autres Titans, armés des armes qu’ils avaient choisies, se mêla aux hurlements du vicomte et de ses hommes en une mélodie des plus agréables.
Les cris devinrent progressivement plus faibles, mais la sensation plaisante, les sons de chair écrasée et d’os brisés apaisèrent le cœur de Vandalieu, et l’odeur épaisse du sang stimula son appétit.
« Bien, laissons cet endroit à la princesse Levia et aux autres pendant que nous nous préparons à manger. Je suis sûr que tout le monde veut remplir son estomac, » dit Vandalieu.
« Je suis certaine que Saria et les autres ont déjà terminé les préparatifs dans la cuisine. Au fait, qu’est-ce qu’elles préparent ? » demanda Levia.
Dans la cuisine se trouvaient des provisions fournies par le marchand itinérant. Les esclaves avaient été forcés de manger des aliments semblables à ceux qu’on donne au bétail, ou des légumes-racines semblables à des navets, cultivés dans le village des esclaves. Mais aujourd’hui, Vandalieu comptait leur préparer un repas à partir des ingrédients que les soldats eux-mêmes consommaient.
Cependant, Vandalieu et les autres trouvaient ces ingrédients plutôt étranges.
« Sam et les autres nous ont apporté d’autres ingrédients, alors utilisons-les aussi pour faire un ragoût, » dit Vandalieu.
« Oh, un ragoût au miso ? Ça, c’est du bon ! » dit Borkus.
Il n’y avait aucun produit laitier disponible, alors le ragoût contiendrait du miso pour lui donner plus de profondeur en goût. C’était un parfait exemple d’un plat maison de Talosheim.
« S’il y avait eu de la viande fraîche, non séchée, j’aurais aussi envisagé un barbecue, » dit Vandalieu.
« Vandalieu-sama, je dois remettre en question cette envie, » dit Eleanora.
Elle semblait être la seule à avoir remarqué qu’il serait difficile de manger de la viande grillée après avoir vu les cadavres calcinés.
『Les niveaux des compétences Magie des Esprits Morts et Commandement ont augmenté !』
« S’il vous plaît, permettez-moi de vous appeler Maître ! »
« Non. »
Après avoir vu la Magie des Esprits Morts, Luciliano supplia Vandalieu de l’accepter comme apprenti. Vandalieu se demandait bien ce qu’il avait en tête. Il doutait d’avoir des techniques à lui enseigner qui lui seraient vraiment utiles.
« Je n’ai aucun problème à rester esclave ! S’il vous plaît, enseignez-moi vos techniques suprêmes ! » dit Luciliano.
« Il a l’air d’un homme prometteur, » dit Eleanora. Elle semblait s’être prise d’affection pour Luciliano. Elle était sans doute ravie de la manière dont il regardait Vandalieu, comme s’il le vénérait.
« Eh bien, enseigner à quelqu’un au lieu d’apprendre, ça peut être une bonne expérience aussi, » dit Borkus. « Je ne pense pas qu’il arrivera à faire les mêmes choses que toi, gamin. Il aura d’autres affinités magiques. »
« Pauvina-chan a oublié cette histoire et ça ne la dérange pas, donc ce n’est pas un problème, non ? » dit Rita. « Et puis, on aura un fonctionnaire civil en plus. »
« Dans ce cas… je vais t’enseigner, mais ce que j’utilise n’est pas de la magie de l’attribut de la vie, alors ne t’attends pas à ce que ce soit compatible, » dit Vandalieu.
« Je serais encore plus surpris si vous me disiez que c’est la même magie que la mienne, » répondit Luciliano.
Il semblait évident que le Bombardement de Destruction de la Prison de Flammes Cadavériques ne pouvait pas être confondu avec de la magie de l’attribut vie.
Quoi qu’il en soit, Vandalieu avait désormais un nouvel apprenti.
Après cela, Vandalieu et les autres restèrent deux jours dans ce qui était autrefois la mine gérée par des esclaves (en réalité, les tunnels souterrains s’étaient effondrés et étaient devenus un cimetière).
Pendant ce temps, ils firent divers préparatifs, laissèrent Gopher et les autres Titans récupérer un peu de leur endurance et de leur esprit, et Vandalieu procéda à des examens médicaux sur eux. Après avoir été exploités pendant de longues années comme esclaves, certains n’avaient pas la force nécessaire pour faire le voyage jusqu’à Talosheim… et il aurait été au-delà des capacités de Vandalieu de les y transporter en volant.
En conséquence, Vandalieu dut créer des chariots et des golems en forme de chevaux (semblables aux chevaux en argile des manuels scolaires sur Terre) à l’aide de sa compétence Transmutation de Golem.
« Les chariots de Lambda n’ont pas de suspensions, n’est-ce pas ? » dit Vandalieu. « Sam non plus, même s’il ne secoue pas grâce à sa compétence. »
« Bocchan, pourquoi tu parles de pensions ? » demanda Rita.
Naturellement, les ressorts et les amortisseurs n’avaient pas encore été inventés à Lambda.
Des planches et des poutres étaient assemblées pour réduire les chocs, mais il n’existait pas de ressorts métalliques.
Vandalieu les créa donc, et les intégra à ses chariots. Il pouvait tester immédiatement l’idée qu’il avait eue, si bien que ses compétences en Transmutation de Golem et en Menuiserie se réjouissaient.
« Vous possédez l’art d’un artisan de chariots, Sa Majesté ? Pourtant, la technologie a progressé depuis les deux cents années où nous étions en vie, » observa Levia.
« Non, Levia-sama, c’est le gamin qui a inventé ça lui-même, » lui dit Borkus.
En réalité, Vandalieu n’avait rien inventé du tout. Il se contentait de reproduire ses connaissances acquises sur Terre et dans Origin.
« Vous pouvez me féliciter davantage, » dit Vandalieu.
Il était heureux d’être complimenté, et ne faisait preuve d’aucune modestie. Même s’il s’appuyait sur des connaissances antérieures, c’étaient bien ses propres compétences et sa magie qui lui permettaient de les recréer, alors Vandalieu considérait cela comme son mérite.
Les brevets de la Terre ou d’Origin n’avaient aucune valeur à Lambda, de toute façon.
« Ce serait parfait avec des pneus pour golems, mais… Est-ce que c’était fait juste en durcissant du caoutchouc ? » se demanda Vandalieu.
Les pneus seraient pratiques à bien des égards, alors il essaierait d’en fabriquer une fois rentré.
Ainsi, pendant qu’il disait faire des examens médicaux, Vandalieu renversait le vieillissement des Titans. Ils avaient perdu deux cents ans de leur vie. C’était un service qu’il leur rendait pour qu’ils puissent vivre assez longtemps pour compenser cela.
Il avait obtenu leur permission — même si ce n’était que de manière indirecte — donc cela devait aller.
« Ce massage… Est-ce que les gens te disent parfois qu’ils se sentent plus jeunes après ? J’ai l’impression d’avoir rajeuni de cent ans, sans blague. »
Les choses se déroulaient ainsi.
Vandalieu ne pouvait pas accomplir cette tâche pour tout le monde en seulement deux jours, alors il comptait continuer sur le chemin du retour. Cela lui servait aussi d’entraînement pour sa réserve de Mana, donc c’était une façon de faire d’une pierre deux coups.
Il utilisa ensuite les os de monstres que Borkus et les autres avaient rapporté pour créer des Morts-Vivants leurres.
« J’ai une compréhension complète des squelettes de Titans et d’humains. Utiliser la Transmutation de Golem pour modifier la forme des os de monstres afin de les faire passer pour des squelettes de Titans n’est rien de plus qu’un peu de travail pénible pour moi, » expliqua Vandalieu.
« C’est du travail pénible ?! »
« J’en ai beaucoup à faire, c’est juste embêtant. »
Soit dit en passant, Vandalieu avait utilisé Décomposition sur les cadavres atrocement mutilés du vicomte et de ses hommes pour les faire pourrir, puis il avait rassemblé leurs os brisés et créé des Squelettes. Ainsi, même si les gens du duché de Hartner venaient à remarquer qu’il s’était passé quelque chose d’étrange à la mine, ils supposeraient simplement que quelqu’un avait massacré tout le monde ici et que tous les soldats et esclaves avaient été transformés en Squelettes.
Ils ne penseraient jamais que les esclaves avaient été secourus.
Après avoir terminé tous les préparatifs, tout le monde prit la route de Talosheim.
『Vous avez acquis le Titre : “Saint Enfant de Vida” !』
『Le niveau de la compétence Menuiserie a augmenté !』
*
Nom : Eleanora
Rang : 9
Race : Vicomte Vampire Noble-née
Job : Princesse Guerrière Subalterne
Niveau : 47
Historique de job : Esclave, Serviteur, Apprentie Mage, Apprentie Guerrière, Mage, Utilisateur d’oeil démoniaque, Guerrière Esclave
Age : 10 ans ( +20 ans avant la transformation en Vampire, 30 ans au total)
Compétences passives :
Amélioration personnelle, Subordonné : Niveau 6
Force Surhumaine: Niveau 6
Régénération Rapide : Niveau 4
Résistance aux effets de Statut : Niveau 6
Intuition : Niveau 4
Corruption Mentale : Niveau 3
Récupération automatique du mana : Niveau 5
Détection de présence : Niveau 4
Résistance au soleil : Niveau 4
Allure : Niveau 1
Compétences actives :
Minage : Niveau 1
Magie de l’élément Temps : Niveau 5
Magie de l‘élément Vie : Niveau 5
Magie de l’élément Neutre : Niveau 2
Contrôle du mana : Niveau 3
Vampirisme : Niveau 4
Technique à l’épée : Niveau 4
Technique à main nue : Niveau 3
Foulée Silencieuse : Niveau 4
Vole à l’étalage : Niveau 1
Tâches ménagères : Niveau 3
Technique au bouclier : Niveau 3
Technique en armure : Niveau 3
Limite dépassé : Niveau 3
Révocation du chant : Niveau 2
Compétence unique :
Charme des yeux démoniaque : Niveau 7
*
Explication du Job :
【Princesse Guerrière Subalterne】
Un Job pouvant être acquis par une femme née dans la noblesse ou ayant autrefois occupé un certain rang social, mais qui est actuellement subordonnée à une autre personne.
Selon les pays, posséder des guerrières avec ce Job est un grand symbole de prestige ; il n’est pas rare que des nobles ou des membres de la royauté les échangent à des prix très élevés. Beaucoup de harems comptent plusieurs esclaves féminines qui possèdent (ou sont forcées de posséder) ce Job et remplissent également un rôle de gardes du corps.
Ce Job offre des bonus aux compétences liées au combat, mais aussi aux compétences de Charme, Séduction et Relations intimes.
Dans le cas d’Eleanora, la condition « née dans la noblesse » est remplie par le fait qu’elle est une Vampire de sang noble.
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