Chapitre 12 – Jeux Interdits
Emmitouflé dans un pull en laine épaisse déroulé jusqu’au cou et les doigts engourdis à la pulpe tachetée d’encre noire, Alexander se cambrait derrière son écritoire et rédigeait une lettre. La pénombre noyait sa chambre faiblement éclairée par le halo diaphane des chandelles. Aucun bruit n’était perceptible hormis le tintement de la pendule, les grattements de la plume contre le vélin ainsi que le chuintement des chouettes qui, en pleine cession de chasse, sillonnaient le jardin en quête d’une proie.
Dehors, la neige tombait en abondance. Surplombant la voûte céleste dépourvue de nuage, la lune gibbeuse régnait, entourée de son armée d’étoiles. L’astre auréolait l’ensemble du domaine maculé de blanc d’une clarté grisâtre. Une constellation d’empreintes, sabots et coussinets, avait d’ores et déjà foulé le tapis nivéen, formant divers sentiers enchevêtrés tandis que les flocons s’amoncelaient sur les branches nues aux couleurs ternies et venaient se déposer sur le rebord de la vitre fardée d’une pellicule de buée. L’air froid envahissait la pièce humide dépourvue de chauffage. La seule source de chaleur émanait de la bassinoire, placée au fond du lit, sous une volumineuse couche de draps et de couvertures.
Le carillon tinta vingt et une heures lorsque Désirée entra dans la chambre du baronnet. La domestique tenait entre ses mains une tasse de thé fumante dont les vapeurs exhalaient un enivrant parfum de mûre. Après l’avoir posée sur le bureau, elle caressa le bras de son maître et rapprocha sa tête de la sienne, allant jusqu’à sentir la tiédeur de son haleine qui se diluait dans l’air. Elle demeura immobile et regarda ce qu’il écrivait avec un vif intérêt.
« Mon cher ami, je vous présente tous mes compliments pour cette fabuleuse nouvelle et souhaite une longue vie au futur marquis de Lussac. Je ne doute point que vous serez un modèle pour votre cousin et que vous lui apprendrez tout ce qu’il faut savoir sur le bon fonctionnement de notre admirable société… »
Composée d’un unique feuillet, cette courte lettre était destinée à Léandre. L’écriture du baronnet était fine et élancée, dépourvue de toute souillure, à l’instar de celle des gens instruits.
— Tu n’as rien de mieux à faire, petite fouineuse ? finit-il par dire d’un air mesquin en la dévisageant du coin de l’œil.
— Le marquis de Lussac vient d’avoir un fils ? demanda-t-elle avec un étonnement mêlé d’inquiétude.
— Léandre est couronné oncle pour la troisième fois, en effet. Léopold vient d’avoir son premier héritier mâle après ses deux filles aînées. Maintenant, Antonin de Lussac sera le détenteur du titre de marquis à la mort de son père.
— Et ça change quelque chose pour Léandre ?
— Non pas vraiment, répondit-il avec amusement, il était déjà loin dans la succession. Cela ne le fera reculer que d’un échelon. Comme son père Albert envers son jumeau Léopold, Léandre devra se contenter de vivre dans l’ombre de son cousin. En termes de prestige et de fortune, j’entends. Après, Antonin n’est encore qu’un enfançon, la mort peut le frapper à chaque instant. Auquel cas, ce sera la fille aînée du marquis, Elizabeth, qui héritera du titre et l’octroiera à son futur époux. Si celui-ci est également détenteur d’un titre de marquis, alors le nom des de Lussac reviendra à la fille cadette. Et si cette dernière décède sans descendance, le titre reviendra soit à Albert puis à Léandre soit à l’un des enfants de son aînée en dehors du premier mâle né.
— C’est assez nébuleux…
— La généalogie ? Assez oui, d’autant que les codes évoluent à travers les siècles. Certains changent d’une famille à l’autre et d’autres demeurent obsolètes. Et je ne te parle pas des nombreux embranchements de nos lignages. Baron, comte, marquis, duc… le même sang coule dans nos veines depuis notre arrivée sur Norden. Comme les familles notables ne sont pas légion et qu’il a fallu nous reproduire, nos ancêtres ont pendant longtemps recouru à l’inceste. Ma mère Ophélia, par exemple, est l’enfant de ma grand-mère Aurélia Desrosiers, la sœur du marquis Lucius Desrosiers, et de mon grand-père, le baron Aristide von Tassle, qui était également son cousin germain. Je pense que c’est d’ailleurs pour cela que ma mère est née avec une santé si fragile, son sang n’était pas assez dilué. C’est pourquoi j’ai eu de la chance que mon père soit totalement étranger au lignage et apporte du sang neuf dans mes veines.
— Je comprends maintenant mieux pourquoi ceux des hautes sphères sont tous aussi aliénés. C’est la même chose sur la côte est tu penses ?
— Hélas, je ne saurais trop le dire. Je connais très peu les mœurs de Wolden et d’Exaden. Cela fait des lunes que la famille comtale de Laflégère et d’autres représentants ont décidé de s’expatrier à l’autre bout du territoire pour y fonder leur société. Mais vu nos origines communes, leurs us et coutumes ne doivent pas être si éloignés des nôtres. Surtout lorsqu’on voit la manière dont Séverine Deslambres a été chassée des siens pour avoir osé épouser votre père. L’arbre généalogique de votre famille maternelle doit être, comme le mien, une véritable chienlit.
Il eut un petit rire.
— Mais pour ce qui est de Léandre et d’Éric, je peux t’assurer une chose, jamais ils ne régneront. Ils ne seront que des fantômes vivant dans l’ombre des marquis, voués à demeurer dans les branches basses du lignage, sous les majestueuses ramures de leurs neveux et frères. Il faudrait un profond cataclysme pour renverser cet ordre bien établi.
Désirée prit une profonde inspiration puis soupira, la tête affalée sur l’épaule de son maître qui frissonna au contact de sa joue glacée contre la sienne.
— Oh ! quelle épouvantable tristesse ! Tu pourras leur envoyer mes sincères condoléances de ma part. Je suis tellement abattue à l’idée que tes meilleurs amis chancellent devant deux innocents nouveau-nés. Moi qui leur souhaite tout le bonheur que ce monde merveilleux puisse leur procurer.
Son insolence théâtrale fit rire le jeune homme qui manqua de tacher son papier après un geste incontrôlé de sa plume.
— Ton ironie me plaît ma douce. À trop me fréquenter, tu gagnes en mordant. J’ose espérer que tu ne finiras pas aussi aigrie que ton frère.
— Oh mais j’étais parfaitement sincère mon cher baron ! minauda-t-elle en se redressant, la nuque relevée et une main posée sur le cœur. Tout comme je me réjouis de la naissance du dernier de Malherbes. Il est vrai que notre île manquait cruellement de tyrans nombrilistes. Je suis donc très heureuse d’apprendre qu’il en existe une énième portée pour succéder à ses aînés.
Alexander opina. En l’espace d’une année et demie, une nouvelle génération de marquis était née. D’abord le fils unique du marquis Laurent de Malherbes, un prénommé Isaac, au grand désarroi d’Éric qui venait de reculer d’un échelon dans la succession. Dorénavant, s’il voulait devenir le marquis de Malherbes, il lui faudrait occire non seulement son frère mais également ce petit cousin à peine sorti du berceau. Quant à sa sœur Honorine, elle venait, elle aussi, d’accoucher d’un garçon qu’elle et son mari Wolfgang avaient baptisé Théodore, voué à devenir le prochain marquis von Eyre.
— Ne t’inquiète pas, ma friponne. J’arriverais à museler ces tyrans nombrilistes comme tu dis. Plus tard, tu verras, ils se prosterneront à nos pieds et demanderont grâce. Je tenterai de les soudoyer pour les rallier à ma cause et ferai payer à leurs parents tout ce qu’ils nous ont infligé. Je t’en fais la promesse.
Elle pouffa et déposa un baiser sur sa joue avant de lui chuchoter à l’oreille :
— Au fait, je viens de finir mon service, cher monsieur. Je suis montée pour retirer ta bassinoire et savoir si tu n’avais besoin de rien. Si tu veux un conseil, tu devrais dormir dans le salon, il fait encore plus froid dans ta chambre que dans la mienne et tu seras mieux loti en bas avec la grande cheminée.
Alexander s’aperçut qu’elle grelottait et claquait des dents.
— Je vais bien, ne t’en fais pas, la rassura-t-il en posant son porte-plume après avoir apposé sa signature puis cacheté sa lettre de cire purpurine en y estampillant ses armoiries. Et je suis bien plus tranquille ici plutôt qu’au rez-de-chaussée. Je n’aime pas entendre les rats couiner la nuit et mon père risquerait de me déranger tôt demain matin.
Il se leva et se dressa devant elle. Ses iris sombres luisaient de désir et les battements de son cœur s’accélérèrent.
— T’ai-je déjà dit que tu m’avais terriblement manqué aujourd’hui, ma friponne adorée ?
Il l’embrassa tendrement. Désirée épousa les mouvements de sa langue et vint se pelotonner contre lui, avide de caresses et de chaleur corporelle. Alors qu’il effectuait d’énergiques va-et-vient le long de son échine, il sentit le bout de ses doigts s’imbiber d’eau. Il s’écarta soudainement et étudia sa mise.
— Ma parole, tu es glacée ma friponne ! Ta robe est trempée !
— Je reviens des jardins, avoua-t-elle en tentant de maîtriser les tressautements qui l’agitaient, ses poils hérissés au garde-à-vous. J’ai été cherché du bois supplémentaire dans la remise. Mais quand je suis revenue, mon pied a buté contre une racine et je suis tombée à plat ventre dans la neige. Si tu te dépêches, tu pourras voir mes empreintes et l’endroit où j’ai fait mon vol plané. Juste à côté du saule pleureur.
Alexander empoigna la veste reposant sur le dossier de sa chaise et l’enveloppa. Trop ample pour elle, l’habit la recouvrait presque intégralement, ne laissant dépasser que sa tête et le bas de ses jambes. Puis il l’engagea à s’asseoir sur le lit et glissa entre ses mains bleuies la tisane qu’elle lui avait apportée. Désirée voulut décliner l’offrande mais il la lui tendit comme une injonction. Elle le remercia et y trempa ses lèvres, sentant la chaleur des parois se diffuser entre ses paumes.
Le garçon s’installa à ses côtés et la frictionna avec des gestes dynamiques pour tenter de la sécher. Après une poignée de minutes à opérer de la sorte et voyant qu’il parviendrait difficilement à la réchauffer, il l’engagea finalement à se déshabiller par crainte qu’elle ne tombe malade.
— Je ne voudrais pas que mademoiselle soit alitée des jours durant ! se justifia-t-il alors qu’elle le couvait d’un regard espiègle, conjugué d’un sourire folâtre. Qui m’apporterait mon déjeuner et préparerait mon bain sinon ?
— Oh ! mon frère pourrait bien s’en charger ! roucoula-t-elle en se frottant à lui, la tête posée sur son épaule. Je suis sûre qu’Ambroise sera ravi de me remplacer. Tu pourras lui demander de réchauffer ton lit et de te masser les pieds également. Même si, à mon humble avis, le renard préférerait mille fois se transformer plutôt que de s’abaisser à cette extrémité.
À cette image absolument incongrue, les deux amants s’esclaffèrent. En dépit de sa légère hypothermie, Désirée soupirait de contentement. Elle avait reposé la tasse vide sur la table de chevet et plongeait son nez dans le col de la veste. Le parfum du baronnet imprégnait les fibres du tissu et elle s’en délecta avec un plaisir notable, les yeux mi-clos et les narines évasées. Alexander ricana à cette vision. Il y avait quelque chose d’étrangement canin dans sa manière de renifler le vêtement.
Les mains désormais tièdes, le baronnet fit pianoter ses doigts sur la taille de sa friponne. Quand il la jugea suffisamment réceptive à ses câlineries, il écarta un pan de sa veste, retroussa sa robe noire et palpa avidement la chair ferme de ses cuisses.
À ce geste devenu coutumier depuis une pincée de mois, il sentit le désir poindre en lui. Désirée émit un pouffement et faufila ses paumes gelées sous son pull, lui arrachant un gémissement aigu dépourvu de dignité. Il la fit s’allonger sur le matelas et ôta hâtivement son pull ainsi que sa chemise, dévoilant un torse moiré de bleus, couturé de cicatrices et poinçonné de la vile morsure. Ses souliers retirés, il se plaça au-dessus d’elle, la dominant de toute sa masse.
— Tu crois que c’est raisonnable ? demanda-t-elle, les yeux rieurs en caressant ses cuisses qui la prenaient en tenaille. Je t’ai croisé ce matin alors que je faisais les courses avec maman et j’ai vu que tu vaguais en très belle compagnie.
— Est-ce que par hasard, ma petite servante aranoréenne serait jalouse de la merveilleuse, que dis-je ! de la sublimissime marquise Laurianne von Dorff ? la nargua-t-il.
— Pas du tout ! objecta-t-elle en faisant mine d’être offusquée. Je sais très bien à quoi je dois m’en tenir avec toi. Et tu n’arrêtes pas de me dire qu’elle n’est qu’une péliade impitoyable qui ne jure que par l’argent et la renommée… comme toutes celles que tu coyotes d’ailleurs.
— Hum… elle est quand même bien plus intelligente et calculatrice que les autres. J’irai jusqu’à la qualifier de redoutable. Von Dorff l’a éduquée à la dure et comme son frère aîné Alastair, ils ont été élevés sous la menace des coups et auprès des meilleurs précepteurs. Je me méfie davantage de ces deux-là que des chiens fougueux comme Léandre, Éric ou les frères Chastel dont je connais les failles.
Après un énième baiser, le jeune homme commença à la déshabiller, grisé par son parfum floral et par sa silhouette charnue qui n’appelait qu’à être étreinte. Ses chausses ôtées, les attaches de sa robe dégrafées et le laçage du tablier délié, il désenfila l’étoffe qu’il laissa choir sur le tapis, dévoilant ce corps tant convoité. Ces chatouillements la titillèrent. Elle gloussait et ondulait des hanches afin de l’émoustiller davantage. Enivré par le désir, Alexander chuchota quelques mots à son oreille. La suggestion surprit Désirée qui s’enfonça légèrement dans le matelas et se renfrogna.
— Qu’y a-t-il ? s’inquiéta le garçon, les sourcils froncés.
— C’est que… commença-t-elle timidement, c’est un peu dégradant ce que tu me demandes là, non ?
Il posa une main sur sa joue et la caressa avec douceur.
— Ma chère, crois-tu vraiment, au vu de l’admiration que je te voue, que je te demande ça pour t’humilier ?
Silencieuse et la bouche tordue en une moue songeuse, elle haussa les épaules. Lentement, il porta sa main à ses lèvres et y scella un baiser.
— Excuse-moi de t’avoir mis mal à l’aise, ma friponne. Ce n’était pas du tout mon intention. Et bien que je comprenne que ça puisse te répugner, sache que tu es la seule à qui je peux demander pareille chose sans risquer d’être pris pour un détraqué. Tu es la seule que je juge digne de confiance et avec qui j’aime explorer de nouveaux horizons. Et je tiens à t’avertir que jamais je ne t’en voudrais si tu me refuses ce service.
— Peut-être…
— Et puis, ricana-t-il, il n’y a rien de dégradant à voir une jolie petite chienne aboyer lorsqu’elle reçoit les tendresses de son adorable maître, non ?
— Ne m’appelle pas comme ça, méchant baronnet ! rétorqua-t-elle après un éclat de rire incontrôlable. J’ai horreur quand tu uses de mon animal-totem pour me désigner.
— Tu préférais quand je t’appelais ma levrette ?
À ce souvenir, elle pouffa à nouveau et lui accorda une chiquenaude sur le torse. Il embrassa sa main de baisers successifs, remontant progressivement le long de son avant-bras.
— Et si jamais tu exiges une contrepartie pour cela, alors je veux bien te promettre en retour d’exercer quelque chose que tu souhaites. Je t’en donne ma parole.
Elle le mira avec un certain amusement.
— Tout ce que je souhaite ? demanda-t-elle, mesquine.
Il lui adressa un sourire si radieux qu’elle succomba une nouvelle fois au charme de ce beau mâle qu’elle côtoyait quotidiennement. Le jeune homme était devenu fort attirant depuis ces derniers mois, ayant quitté définitivement les traits brouillons et ingrats de la jeunesse pour acquérir un faciès et une silhouette plus virile. Sa carrure s’était étoffée. Dorénavant, ses épaules solides affinaient sa taille élancée. Son visage anciennement crispé avait à présent les traits détendus et ses yeux sombres rutilaient du feu de l’ambition. Ses longs cheveux noir-ébène, d’ordinaire ternes, étaient redevenus lisses et soyeux.
Auprès de Désirée, il avait retrouvé confiance en lui, s’appuyant sur elle afin qu’elle l’aide à remonter la pente. Leurs jeux intimes, pratiqués en toute innocence, avaient su lui redonner le goût des plaisirs simples ; la découverte de cette vraie sensualité si longuement refoulée pour l’un comme pour l’autre à l’égard de leurs conditions respectives. Il était son maître et elle sa domestique. Pourtant, lors de ces instants, à aucun moment il n’usait de son statut pour lui soutirer des faveurs. Ils étaient égaux, deux jeunes avides d’attention et d’étreintes. Ces moments si tendres, sans l’ombre d’animosité ou de malaise, étaient ce qu’ils chérissaient le plus et ils attendaient sagement le soir venu pour s’y adonner en toute discrétion.
Comme à chacun de leurs rendez-vous clandestins, le temps paraissait défiler à la vitesse d’un cheval au galop. Pour patienter entre ces périodes de délivrance et dans un souci de masquer leur alliance, ils échangeaient des œillades furtives ou des effleurements lorsqu’ils se frôlaient dans les couloirs. D’humeur badine, Alexander glissait des mots doux dans les placards de la cuisine ou de la buanderie. Ulrich ne fréquentant guère ces endroits réservés aux domestiques, il était impossible qu’il mette la main dessus. En revanche, lorsque c’était Ambroise qui découvrait ces fameuses missives, il se contentait de lever les yeux au ciel et de les tendre à sa cadette, non sans ajouter une brimade à son intention.
Ce que le frère redoutait depuis sa prime jeunesse était enfin arrivé, sa sœur s’était amourachée du petit maître. Cela le chagrinait et le remplissait d’aigreur. Car, même s’il ne pouvait nier l’attachement sincère qu’éprouvait Alexander envers Désirée, il savait que tôt ou tard, le nobliau devrait épouser une concubine de sa caste et abandonner la domestique à son sort. Et Ambroise appréhendait le jour où il devrait consoler sa sœur brisée.
De ce fait, il était devenu le confident de son maître. Pieter et Séverine étaient également au fait de ces jeux interdits et suivaient le manège des deux amants avec amertume. Ils veillaient au grain, les avertissant lorsque le baron père traînait dans les parages ; une pointe de tristesse et d’angoisse aux creux de leur âme de peur qu’ils soient un jour démasqués.
Tous étaient cependant heureux que le baronnet daigne reprendre sa vie en main et défier de plus en plus son géniteur. Un espoir qu’ils n’auraient jamais cru possible tant la folie et la colère d’Ulrich s’aggravait au fil des années. Son esprit avait encore décroché de la réalité et il ne vivait à présent que pour sa dose de Wyvern qu’il avait abandonné plus d’un an avant de la consommer de nouveau presque hebdomadairement.
— Alors ? Qu’est-ce qui te ferait plaisir ma friponne ? s’enquit le jeune homme après l’avoir embrassée.
Désirée fit la moue et réfléchit. En balayant la pièce, son regard se posa sur la tasse en faïence qu’elle avait apportée.
— Tout ce que je veux ?
— Tout ce que tu veux ! Je peux aller t’offrir un vêtement ou même un bijou si ça te fait plaisir.
— Hum… non, rien de cela !
Elle scruta une seconde fois la tisane achevée puis, sûre de son choix, annonça d’une voix décidée :
— Je voudrais qu’un jour, peu importe quand, ce soit toi qui m’apportes mon petit déjeuner au lit !
Surpris par sa demande, Alexander resta quelques instants immobile puis rit à son tour.
— Tu es vraiment sérieuse ?
— Oui mon cher maître, dit-elle en se frottant à lui. Mais attention, je tiens à ce qu’il y ait un vrai chocolat chaud préparé par tes soins et au moins une viennoiserie !
— Oh, mais que mademoiselle est exigeante ! se moqua-t-il. Aurait-elle du sang de duchesse dans les veines par hasard ?
Une expression hautaine se dessina sur le visage de la domestique qui, après un battement de paupières, se racla la gorge et annonça d’un ton châtié :
— C’est à prendre ou à laisser, monsieur von Tassle !
— Dans ce cas, c’est d’accord ma chère !
Il la reprit dans ses bras, l’enserra vigoureusement puis plongea sa tête dans ses boucles châtain pour s’imprégner de son parfum.
— Maintenant, si tu le veux bien, commençons à nous amuser un peu. L’heure défile et les précieuses minutes perdues le seront à jamais.
Pour toute réponse, elle lui adressa un sourire malicieux et se plia de bonne grâce aux exigences de monsieur.
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