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Chapitre 373 : Autophagie

Je tremble. Tout mon corps tremble depuis quelques instants alors que j’accepte l’esprit de Persée dans le mien. Je ne m’attendais pas à pouvoir fusionner avec lui, mais ma propre folie causée par la meute semble avoir déclenché des événements qui ont libéré Persée. J’ai bien conscience de ce fil blanc qui semble avoir fait quelque chose en passant à travers le lien, et si je devais suggérer un responsable, je dirais Angela. La grande dévoreuse de corruption ne pouvait pas laisser des règles et des lois meurtrir Persée indéfiniment. Tenter une fusion avec lui semble même avoir amélioré le niveau du lien pour passer de niveau 2 : Contrat, au niveau 3 : Pacte, et la douleur que j’ai ressentie avec l’amélioration du lien se trouve noyée par la fusion.

Pour commencer, mon corps rejette la fusion qui est en cours. Les tremblements ne sont qu’un contre-coup des modifications ayant lieu… Pour un peu j’ai l’impression que mon corps est en train de se liquéfier alors que je peux sentir une faim incroyable me retourner l’estomac. Pour ce qui est de ma tête… disons que la folie semble être le moteur principal de cette fusion, donc je perds peu à peu la rationalité que j’avais mise de côté pour laisser la meute prendre le dessus. Bien entendu, pendant que je suis affaibli, des golems de fer font leur apparition et tuent quiconque passe devant eux.

Étrangement… ça me fait rire… ? Pff… Ahahaha ! Je ne sais pas pourquoi la situation est amusante, mais j’en ai les larmes aux yeux. Je n’arrive même pas à déglutir et de la salive coule jusqu’à mon menton avant de finir par terre tellement je ris.

Je regarde ma main, mais elle est floue. Mes yeux n’ont pas l’air de fonctionner normalement. Pourtant je sens autre chose, j’ai bien l’impression d’être capable de voir de la même façon que Persée. Toutes ces informations noient mon esprit. Elles sont trop nombreuses et tellement inutiles… Je me concentre alors sur mes jambes pour essayer de me relever alors que je peux vaguement sentir Micha et Juliette partir de mon corps sans comprendre pourquoi.

Je n’arrive plus à respirer maintenant que j’y pense. Sans savoir pourquoi, je commence à retirer mes vêtements rapidement jusqu’à être finalement nu comme un ver… Le corps de Persée sous la forme d’une combinaison devrait pourtant être là, mais je ne le vois pas. Je ressens avec l’aide du radar de Persée et je me rends compte que le tissu vivant est maintenant sous ma peau et que ses fils grouillent en la faisant bouger d’une façon qui me donne envie de vomir. Pourtant, cela continue de me faire rire alors que j’ai l’impression d’être devenu un bol de spaghetti vivant. Je sens la douleur que ça m’inflige, mais mon cerveau semble avoir rebranché ça sur le plaisir, comme si je n’étais que chatouillé par la fusion physique avec Persée.

La fusion n’est pour l’instant pas encore stable, mais si elle a une chance de l’être, je vais devoir lui donner un nom pour la stabiliser. Vu mon état mental, ce n’est pas le plus simple. La faim me taraude l’estomac, la douleur me fait rire et je n’arrive plus à me concentrer. Le pire dans tout cela et que je m’en moque. Je rassemble ce qu’il me reste de raison pour finalement parvenir à formuler un nom avant que mon esprit se mélange complètement à celui de Persée. Il est temps pour « Typhon » de nommer un nouvel enfant. Un monstre lié à l’idée que trop n’est jamais assez. La faim, la raison, les pensées, la perception, l’échange…

« Nimis sera mon nom. »

Alors que le nom traverse mes lèvres, un changement a lieu. Je m’immerge complètement dans l’esprit de Persée qui me semble aussi épais que du goudron. Il dévore mes émotions. Non. ‘Je’ dévore tout ce que je ressens pour me libérer de cette faim qui me tiraille au plus point. Les pensées, les souvenirs, les idées. Il ne reste rien et tout en même temps, pourtant ce n’est pas assez pour étancher cette gloutonnerie. Il me faut plus de stimulation.
La mer de rats passe autour de moi en m’ayant finalement rattrapé, je décide de m’allonger dedans pour la sentir sur mon corps. Alors que la marée passe sur moi, je continue de rire en me perdant dans l’euphorie des sensations nouvelles qui m’assaillent.

Je regarde mon bras à travers le sens radar de Persée. Les différents fils qui le composent maintenant continuent de s’agiter et finissent même par en sortir en me transperçant la peau douloureusement. Je me remets à rire alors que les fils noirs recouvrent ma main en la dévorant pour en faire quelque chose de nouveau.
La douleur que je ressens n’est qu’une nourriture de plus pour ma folie alors que j’observe le résultat en souriant. Ma nouvelle main a doublé de taille en devenant fine et dure comme du métal. Des griffes de plusieurs centimètres en sortent à présent. Chaque doigt est une arme qui souhaite se repaître de la chair de nouvelles victimes à dévorer. Alors que je me relève en hurlant tout en déchirant mes cordes vocales, je me sens immortel.

Le reste de mon corps subit alors les mêmes transformations en avalant la chair et en broyant les os pour les remplacer aussitôt par des fils qui s’entremêlent pour former de nouveaux membres. Ce qui ne peut pas être amélioré est renforcé alors que le corps de Nomad disparaît pour en former un nouveau. Il ne restera bientôt plus que moi et chaque centimètre de mon corps devient une nouvelle bouche à nourrir. Les formes de mon corps changent sans cesse alors que je deviens un fauve, puis un serpent, et des ailes poussent même dans mon dos. Ce corps change de formes et de membres alors que mon esprit puise dans la folie pour trouver une forme qui conviendra à ce que je souhaite. Je pense à la force et mes muscles doublent de volume et mes bras se multiplient. Je pense à… Non, j’ai trouvé.
Oublions les limites du corps humain ou de celui des animaux. Je repense à Fae dans l’arène sous sa forme de gardienne. Je repense aux Dragons briseurs de monde. Je pense à Angela sur son trône. Devenons ce que je ne suis pas. Immortel et imbattable. La pensée me fait frémir et un immense plaisir me fait trembler de joie et de douleur alors que mon corps change encore de forme pour donner vie à mon fantasme.

Ce corps crie de douleur alors qu’il obéit à ma pensée irrationnelle qui n’a normalement pas sa place dans cette réalité. Je reprends une forme plus humaine alors que mon corps se couvre d’écailles. Je deviens plus grand et plus fort que je ne l’étais même pendant mes différentes transformations. Mes cheveux poussent de plusieurs mètres en devenant plus blanc que la neige et se jettent sur des corps sans vie à proximité pour s’en nourrir et me donner plus de matière pour travailler. Deux ailes noires difformes apparaissent dans mon dos, vibrant et frappant l’air comme des fouets. Mes dents se brisent comme du verre alors qu’elles sont remplacées par des crocs de fer et d’acier. Mon nouveau cœur bat d’une pulsation lourde alors que mes poumons se vident et se remplissent sans cesse pour crier toujours plus fort. Je peux entendre l’écho de mon rugissement monstrueux dans la bulle et le plaisir continue de déferler en même temps que la puissance.

Il me faut plus. Donnez-moi des choses à dévorer. J’observe autour de moi les hommes qui se cachent ou me regardent, terrifiés. Je peux sentir la meute qui se disperse pour me laisser agir librement, mais je peux aussi sentir leur peur. Pourtant ce n’est pas eux qui devraient me craindre. Ces animaux qui m’ont aidé à prendre vie n’ont rien à craindre de moi, mais les autres…

Mes pieds se plantent dans la terre sous moi alors que je me jette en avant vers la première personne sur mon chemin. Elle explose à mon contact et mes cheveux s’enroulent autour de la chair et des os dans les airs qu’ils avalent pour me nourrir et me faire devenir plus fort.

Apparemment, je n’ai plus grand-chose d’humain maintenant. Je suis un monstre. Une chimère avide de tout ce qui m’entoure alors que la folie est mon moteur.
Autour de moi se rassemblent les quelques grimpeurs restant dans le bastion. Ils sont encore une trentaine alors que des golems s’approchent également de moi. Je peux voir Ifrit me regarder avec les yeux exorbités alors qu’il sort de sa forge. Je peux même sentir Emy qui demande à savoir d’où vient le hurlement. Tout ce qu’il y a dans la bulle, je peux le sentir et je dévore chaque sensation avec délectation.

Une de mes ailes frappe un grimpeur plus intrépide que les autres et il se retrouve coupé en deux. Je me mets à rire alors que la notion de réalité disparaît et que j’ai simplement l’impression d’avoir coupé une feuille de papier en deux. Ils sont une dizaine à me regarder rire et se mettent à fuir aussitôt alors que leur raison leur dit probablement que c’en est trop.

Un golem se jette sur moi pour me frapper le torse avec son bras-épée. Je le ressens faire et je me contente de me nourrir de son attaque. Ma peau ne semble pas faite d’écailles de Dragon finalement puisqu’il réussit à la couper légèrement. Avant qu’il ne puisse attaquer à nouveau, je passe un doigt le long de ce qui ressemble à sa tête. Le métal se coupe en deux comme s’il était fait de beurre.

Un jouet fragile.

La queue fine de reptile dans mon dos s’agite toute seule pour le frapper et le projette au loin en pliant le métal de son buste. Il ne me reste qu’à dévorer ce qu’il reste dans cette bulle qui est devenue une cloche recouvrant un plat que Nomad et les animaux ont déjà entamé.

En rugissant une nouvelle fois, je me jette en avant.

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Correction : Hastin

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