LES MONDES ERRANTS – Chapitre 34

Chapitre 34 – La philosophie du renard

Chaton fut réveillé par un bruit de tintement de griffes effleurant le parquet, produisant un tic-tic incessant. Il ouvrit lentement un œil et aperçut un renard marchant avec lassitude sur ses deux pattes arrière. Il avançait d’un pas traînant, une tasse de thé chaud à la main. L’animal avait l’air complètement sonné : les yeux mi-clos et les oreilles tombantes, sa queue et son écharpe balayant nonchalamment le sol. Son pelage d’un roux plutôt terne était sale et tout ébouriffé tandis que son ventre creusé laissait apparaître deux rangées de côtes saillantes. Le canidé s’attabla et huma la boisson fumante dont il avala une gorgée. Puis il prit deux baguettes de bois et commença à avaler le bol de riz disposé devant lui. Chaton sauta du lit et vint à sa rencontre.

— Bonjour monsieur le renard. Je présume que tu es le fameux Renard, esprit du soleil.

Il n’eut pour toute réponse qu’un grognement ; de toute évidence, le canidé n’était pas enclin à bavarder. Chaton grimpa sur le banc à côté de lui et aperçut que la table était couverte de mets en tout genre : soupe, ravioli, riz et poissons grillés, offrant une farandole d’odeurs et de saveurs. Voulant rester raisonnable, il prit avec sa patte un simple bol de riz et un poisson frit. Renard lui lança un regard de coin de l’œil et grommela :

— Petit ! Si tu veux manger avec tes pattes, c’est d’accord, mais par pitié aie au moins la décence de ne pas utiliser celle de gauche, ne sais-tu pas que c’est inconvenant !

— Oh, je ne savais pas… répondit-il, confus.

Il replia sa patte gauche puis, de la droite, engouffra le poisson dans la gueule.

Ils restèrent un moment à manger en silence. Chaton balaya la table du regard et vit un bout de papier.

Ce doit être la liste que m’a donnée Tanuki, songea-t-il.

Il le prit délicatement et voulut le montrer à Renard dans l’espoir que celui-ci puisse le lui déchiffrer mais il se souvint des paroles de son hôtesse : « Pour convaincre Renard, surtout sois malin. Joue avec ses faiblesses, fais-lui croire que tout est un jeu ! »

Renard s’étira de tout son long et bâilla à s’en décrocher la mâchoire. Il se leva et sortit en sifflotant.

Au moins, il a l’air de bonne humeur à présent ! pensa Chaton qui partit à sa poursuite.

Renard franchit le seuil de la porte. Dehors, le soleil était encore bas, les minces rayons orangés offraient une lumière mordorée, coiffant au passage la statue du tanuki disposée à gauche du portail. Les oiseaux piaillaient dans les arbres tandis que grenouilles et crapauds coassaient au bord du bassin. Le canidé prit en main un étrange instrument et, une fois posé confortablement sur l’herbe fraîche, assis en tailleur, commença à jouer quelques notes.

L’instrument possédait un long manche et disposait de trois cordes de soie parallèles, la caisse de résonance recouverte d’une peau de serpent bien tendue. Il pinçait les cordes une à une, produisant un son haché, saccadé. Voyant que le chaton l’écoutait avec intérêt, Renard accéléra le rythme, comme pour montrer de quoi il était capable.

— Quel est donc cet étrange objet ? demanda Chaton.

— Ceci petit est un shamisen, murmura Renard qui continuait à jouer. C’est un instrument à cordes pincées provenant de mon pays d’origine, le Japon. Celui-ci est très vieux, mais les sons qu’il sort sont encore bons.

Ne voyant trop comment aborder le sujet de sa mission, Chaton lui tendit la liste.

— De quoi s’agit-il gamin ? souffla l’esprit sans porter la moindre importance au morceau de papier.

— Renard… monsieur Renard, j’ai besoin de ton aide, j’ai ici une liste donnée par Tanuki pour réveiller ton père, le Dieu Loup… Et il me faut les ingrédients qui sont écrits dessus !

Renard se figea un instant puis reprit sa mélodie.

— Renard… insista Chaton, m’as-tu entendu ? J’ai besoin de ton aide !

— Écoute-moi bien, Petit ! maugréa ce dernier. Je ne sais pas ce que tu attends de moi, mais va déranger quelqu’un d’autre, veux-tu ?

— Mais… Tanuki m’a dit de te voir pour que tu m’aides à réveiller ton père ! S’il te plaît, j’ai besoin de toi !

Cette fois-ci, Renard cessa s’arrêta de jouer. Il posa son instrument à côté de lui et regarda le félin d’un air las.

— Je ne sais pas qui tu es ni ce que tu veux gamin mais un conseil, ne compte pas sur moi pour exécuter quoi que ce soit. J’ai plein de choses à faire !

Chaton réalisa qu’il ne s’était pas présenté. Il s’inclina et déclara tout haut :

— Oh, grand Renard, excuse-moi ! Je m’appelle Chaton, je suis le fils du dieu Tigre et j’ai une mission de la plus haute importance à réaliser. Il me faut délivrer ma mère d’un sort et j’ai pour cela besoin des conseils et de la sagesse du dieu Loup pour y parvenir. Mais avant, il faut que je le réveille et je ne sais comment faire ! Ta sœur Tanuki m’a donné une liste d’ingrédients à lui fournir dont toi seul connais leur provenance.

Renard, qui l’avait à demi écouté, le fixait d’un œil noir.

— Bon ! tu m’as l’air d’un gentil petit, alors j’accepte de t’aider mais pas aujourd’hui, car je ne le veux pas. Reviens vers moi demain et peut-être serai-je plus enclin à m’occuper de ton cas. En attendant, laisse-moi !

Chaton s’éloigna, contrarié de perdre du temps aussi bêtement. Cependant, il gardait espoir que le lendemain, Renard allait tenir parole et l’aider. En attendant, il décida de ne pas s’embarrasser outre mesure. Il retourna au temple, grimpa sur le lit et fit une longue sieste. Il n’avait pas récupéré pleinement du voyage de la veille.

À son réveil, la nuit était tombée. Il fut abasourdi d’avoir dormi aussi longtemps. La pièce était plongée dans l’obscurité et baignait dans une délicieuse odeur de nourriture. Sur le foyer, la grosse marmite chauffait encore. Il vit Tanuki en train d’éplucher et de couper des légumes puis vint à sa rencontre.

— Bonsoir Chaton, dit-elle d’une voix douce, comment s’est passée ta journée avec Renard ?

Chaton lui raconta sa mésaventure et comment, tout penaud, il avait décidé de dormir pour passer le temps.

— Tu n’aurais pas dû réagir ainsi mon garçon ! dit-elle d’un ton réprobateur. Tu aurais dû dormir si et seulement si tu étais fatigué et non pas par contrainte ! Tu as perdu ton temps inutilement alors que tu aurais pu mettre celui-ci à profit et apprendre de nouvelles choses ! Souviens-toi, le temps n’est jamais perdu si tu décides de le mettre au service d’un apprentissage, quel qu’il soit.

Chaton écouta ces sages paroles et se dit, qu’à l’avenir, il mettrait tout son temps libre pour observer et étudier. Sur ce, Tanuki lui glissa un économe entre les pattes et lui montra le geste pour éplucher un légume. Pas facile lorsque l’on est un chat et que l’on a toujours marché sur ses quatre pattes. Mais il essaya et tenta de s’appliquer pour faire au mieux. Ils cuisinèrent ensemble des heures durant. Au menu, Tanuki avait prévu des momos, sortes de raviolis népalais au chou et à l’oignon, ainsi qu’un bouillon de légumes. Puis ils s’attaquèrent au ménage, elle passait le balai tandis qu’il essuyait les meubles avec un chiffon. Après une soirée harassante, le félin sauta sur le lit et s’endormit.

Le jour suivant, après avoir mangé un solide petit déjeuner, il sortit retrouver Renard et lui redemanda son aide. N’étant pas mieux disposé que la veille, il le remercia et continua son affaire. Chaton ayant écouté les conseils avisés de Tanuki décida que cette fois-ci il ne tuerait pas son temps en dormant et examina la routine du canidé.

Une fois que celui-ci eut terminé de jouer avec son Shamisen, il partit en direction du poulailler où il joua aux cartes avec le coq et ses poulettes. Puis il passa des heures à tricoter, posté sur un panier en osier, le tout en sirotant une tasse de bouillon chaud. Ensuite, il se balada en sifflant à travers le jardin, observant oiseaux et insectes qui passaient par là. Enfin, il alla chercher une canne dans la remise, s’installa sur le bord du bassin et se mit à pêcher… Il resta ainsi pendant de très longues heures, mais aucun poisson ne mordit à l’hameçon.

Quel fainéant se dit Chaton, pourquoi ne m’aide-t-il pas ? Il ne fait rien de bien concret !

La journée touchant à sa fin, Renard accueillit un groupe de rats de manière très amicale. Ceux-ci étaient venus avec une charrette chargée de nourriture brute. Elle contenait des fruits, des champignons et même un gros lapin bien gras. En échange, il leur servit à tous, les plats que Tanuki avait cuisinés la veille. Chaton comprit alors que, plutôt que de chasser ou de sortir cueillir lui-même ses propres ingrédients, Renard préférait commercer avec les rats pour qu’ils fassent le sale travail et les remerciait avec des plats que lui-même n’avait pas préparés.

Chaton trouva cela injuste et la colère le domina. Il désapprouvait complètement cette attitude et se promit de tout rapporter à Tanuki une fois la nuit tombée. Néanmoins, il décida de converser avec lui avant d’en parler à sa sœur afin d’essayer de comprendre ce comportement qu’il jugeait indigne. Il ne voulait pas manquer de respect à ses hôtes.

— Renard, lui dit-il alors qu’il remerciait les rats de leur venue, pourquoi ne fais-tu rien toi-même et comptes-tu sur le travail des autres pour assouvir tes besoins ?

Surpris par ce ton de reproche, le renard ricana :

— Quelles balivernes me dis-tu là gamin ! Bien sûr que je fais des choses et que je travaille ! Je ne suis pas un fainéant, j’ai bon nombre de choses à accomplir, surtout lors d’une journée radieuse comme celle-ci !

— Je t’ai pourtant observé toute la journée, répliqua Chaton. Tu n’as accompli aucune tâche concrète ! Tout ce que tu as fait, c’est tricoter, jouer de la musique et commercer avec les rats !

Le Renard ne se sentit pas gêné le moins du monde par ces propos offensants. Plutôt que de lui répondre sèchement, il se mit à marcher et lui demanda de le suivre. Ils vaguèrent dans le vaste jardin, baigné par la lueur rousse du soleil vespéral. Quand ils arrivèrent au bord du bassin, Renard s’assit et dit à Chaton :

— Petit, je vois bien que tu me juges et que tu trouves que je suis un fainéant né ! Pourtant tout ce que tu penses sur moi est faux ! Ou du moins erroné… Tu es encore très jeune, à l’aube de ta vie, il y a donc plein de choses que tu ignores ou ne peux comprendre !

Chaton le regardait, sceptique. Il poursuivit :

— Je suis sûr qu’en cet instant tu me compares à ma sœur ! Que tu confrontes nos modes de vie antagonistes. Et c’est vrai qu’ils le sont puisque nous sommes Jour et Nuit, les contraires par excellence ! Pourtant, elle comme moi prenons soin de ce temple à notre manière. À la différence que Tanuki se tue à la tâche, ne s’accordant aucun moment de répit. Tandis que moi je profite chaque jour de la vie qui m’est offerte et de ses bienfaits.

Chaton demeura songeur, il ne savait pas où l’esprit voulait en venir ni ne comprenait en quoi leur engagement pouvait être comparable.

— Tu penses que mes actions ne servent à rien mais pourtant : quand je joue aux cartes avec le coq et les poules dans le poulailler, je m’assure à ce qu’ils soient heureux et pondent d’excellents œufs, les meilleurs qui soient. Quand je joue de mon shamisen, oiseaux et animaux de tous les environs viennent écouter mes mélodies. À leur passage bon nombre d’entre eux rapportent un petit quelque chose en échange, souvent des baies ou des noix. Il y a d’ailleurs une coupelle à l’entrée du temple pour recueillir ces offrandes. Les pulls, gants, bonnets et écharpes, que je tricote avec amour et patience, servent à réchauffer les plus vulnérables d’entre eux lorsque l’hiver arrive. Je passe une grande partie de l’année à les coudre et à les tricoter. Pour qu’à l’arrivée des jours froids, les animaux qui font la queue à l’entrée puissent chacun recevoir un habit de laine à leur taille. Pour la pêche, la beauté de cette activité réside dans le fait qu’elle est imprévisible. La récolte peut être bonne comme mauvaise, cela varie en fonction des jours. Parfois, je ne pêche rien, mais je ne m’acharne pas, rien ne sert de brusquer la Nature. Et quant à mon commerce avec les rats, ils sont les seuls à pouvoir aussi facilement se rendre au village des hommes pour chaparder une partie de leur culture. Ainsi le riz que tu as mangé n’aurait jamais pu exister si les rats ne se donnaient pas la peine de les échanger contre les plats de Tanuki. Ils remueraient ciel et terre pour pouvoir manger ses mets dont ils raffolent !

Ils restèrent ainsi, côte à côte, silencieux. Chaton réfléchissait. Il trouva le raisonnement de Renard logique, en accord avec ses propres principes, et commença à le voir d’une tout autre manière. Ainsi, il apprit ce qu’était le principe de procrastination. Renard n’était finalement pas aussi fainéant que ce que le conte racontait à son sujet. Il s’en voulut de l’avoir mal jugé et s’excusa auprès de lui. Renard ne répondit pas. Avant de rejoindre son promontoire pour entamer sa nuit, il ébouriffa sa tête et lui donna une tape amicale sur l’épaule.

Le soleil se coucha. Tanuki s’éveilla. Elle s’étirait de toute sa splendeur quand elle aperçut Chaton dans le jardin. Il accourut vers elle, heureux de revoir cette présence rassurante qui lui rappelait la douceur et la fermeté de sa mère.

— Alors, mon petit, as-tu appris des choses intéressantes aujourd’hui ? demanda-t-elle calmement.

Chaton acquiesça et lui relata sa journée, mentionnant ce qu’il avait appris au sujet de Renard, tout en essayant de ne pas porter de jugement de valeur, omettant volontairement de mentionner le passage sur les rats.

La nuit était fraîche, la lune brillait de toute sa splendeur dans le ciel noir parsemé de taches lumineuses. Un vent froid soufflait, faisant balancer les arbres et virevolter leurs feuilles. Des lucioles voltigeaient à travers les herbes, essayant d’échapper aux chauves-souris qui les traquaient. Plus loin, le hululement des chouettes et le crissement des criquets commençaient à résonner à travers la forêt.

Après être passés au jardin cueillir des légumes, Tanuki et Chaton se mirent aux fourneaux. Elle était contente de ce que Renard avait rapporté, le bon gros lapin allait leur faire un sacré repas. Et quoi de plus idéal pour l’accompagner que des champignons et du riz. Elle ajouta à cela des morceaux de carottes et d’oignons puis laissa mariner le tout dans une marmite suspendue à la crémaillère. Le parfum dégagé était divin. Chaton saliva, il avait hâte de pouvoir y goûter.

— Si tu veux mon chéri, je pourrais te donner la recette pour que tu la reproduises à l’avenir ! murmura-t-elle.

— Oh ! Ce serait avec plaisir ! Mais… je ne sais pas lire… lui confia-t-il, penaud.

Tanuki fit les yeux ronds. Elle n’avait pas envisagé l’idée que le fils d’un dieu puisse être illettré. Pour y remédier, elle se proposa de lui apprendre. Après tout, depuis que l’équinoxe était passé, elle gagnait chaque jour quelques minutes et pouvait alors lui accorder une heure ou deux par soirée pour lui apprendre la lecture et l’écriture. Chaton était surexcité et lui assura qu’il serait le plus concentré et assidu possible !

Les jours et les nuits se succédaient. Auprès de Renard et de Tanuki, Chaton avait perdu la notion du temps. Il était très occupé à apprendre de nouvelles choses. Tant d’activités toutes aussi passionnantes les unes que les autres s’offraient à lui.

Le jour, il commençait toujours par interroger Renard au sujet de la liste puis le suivait à la pêche. Pour l’occasion, l’esprit lui fabriqua une canne à sa taille. Chaton profitait de ces instants sur l’eau pour peaufiner sa nage, se remémorant les leçons acquises auprès des loutres. Il apprenait également le tricot et la couture, mais n’aimait pas trop ça, et apprenait des jeux tels que le tarot, les dés ou les échecs. Renard lui présenta ses amis les rats. Chacun était unique avec un trait physique et un caractère bien à lui.

La nuit, Chaton faisait le ménage et la cuisine avec Tanuki. Une fois les tâches terminées, elle lui apprenait à lire et à écrire, comme promis. Chaton aimait bien ces moments de complicité partagés avec chacun de ces hôtes. Bien qu’ils fussent diamétralement opposés ; ils avaient tous deux en commun le goût de l’excellence et du travail bien fait. Ils étaient soucieux du moindre détail et se montraient très pédagogues envers lui.

En un mois et demi, il était devenu de plus en plus habile avec ses pattes avant et savait presque marcher en bipédie. Il savait à présent déchiffrer bon nombre de caractères et empruntait certains livres de la bibliothèque pour les feuilleter. Il inspectait les quatre coins du temple pour en apprendre plus sur son histoire et son architecture. Il décrypta la liste d’ingrédients que Tanuki lui avait écrite le premier soir :

— un bel œuf de coq bleu

— un champignon des marais

— un navet boule d’or.

Ensuite, il s’amusait par curiosité à lire les vieux Ema du portique ; ces plaques de bois sur lesquelles le vœu d’un fidèle y était déposé, adressé à un dieu. Comme il trouvait cela fort joli, il en dessina quelques-uns qu’il accrocha à destination du Dieu Tigre pour protéger sa mère et du Dieu Loup pour le remercier de la gratitude dont faisaient preuve ses enfants.

Un jour, alors que Chaton venait de se réveiller, il aperçut à l’entrée du temple une foule d’animaux qui patientaient les uns derrière les autres. Il remarqua que l’extérieur était couvert d’un épais manteau blanc. L’air était glacial, il frissonna des moustaches à la queue. Il retourna à l’intérieur, se servit un bol de bouillon bien chaud et observa la scène depuis l’auvent.

Comme Renard l’avait prévu, bon nombre d’animaux étaient venus dans l’enceinte et attendaient leur tour de distribution de laine. Il y avait des créatures de toutes formes, de toutes tailles et de tous âges. Il connaissait beaucoup d’espèces mais d’autres lui semblaient intrigantes, voire intimidantes. Surtout lorsqu’il s’agissait de loups ou d’ours. Ces animaux étaient tellement géants et imposants que la plupart des animaux présents s’écartaient à leur passage ou s’inclinaient en signe de respect.

Dans toute cette foule, Chaton reconnut le furet qui deux mois plus tôt l’avait amené ici. Il vint à sa rencontre, l’air guilleret.

— Bonjour Furet ! cria-t-il. Je suis content de te revoir !

— Hey ! Mais c’est le petit chaton tout triste de la dernière fois ! s’exclama le furet avec joie. Comment vas-tu bonhomme ? Tu as bien meilleure mine !

Chaton nota qu’il portait autour du cou un nouveau châle en laine, de couleur bleue, orné d’étoiles dorées.

— Je vais très bien ! Mes hôtes sont adorables et j’apprends énormément à leurs côtés. Et toi ? Tu es venu chercher des habits pour l’hiver ?

— Je me demande vraiment bien comment tu as pu le remarquer ? railla Furet. Bon, sur ce, il me faut m’en aller, j’ai encore pas mal de besogne à effectuer. À la revoyure petit chat… Prends soin de toi !

Avant même que Chaton ne puisse lui répondre, Furet avait déjà tourné les talons et regagné la forêt.

La distribution dura une bonne partie de la journée. Laissant Renard à son affaire, Chaton préféra utiliser son temps en intérieur, il faisait trop froid dehors à son goût. Il prit alors un livre, Contes et Légendes du Népal dans la bibliothèque et s’installa au coin du feu. Il se sentait de plus en plus à l’aise avec la lecture et aimait beaucoup cette activité. Les livres lui permettaient de développer sa curiosité. Ceux du temple traitaient principalement de religion, de médecine ancestrale, de cuisine ou encore de géographie locale.

Il comprit alors qu’il était dans un pays baptisé Népal par les humains, niché en plein cœur de l’Himalaya. Un territoire de deux cents kilomètres de large sur huit cents de longueur, encerclé par deux immenses pays que sont la Chine et l’Inde. Le Népal comportait les plus imposants sommets du monde, notamment l’Everest qui avoisinait les neuf mille mètres d’altitude.

Il était divisé en trois zones bien marquées : une forêt tropicale humide, le Teraï, proche de l’Inde, peuplée de singes, tigres royaux du Bengale, éléphants d’Asie et rhinocéros unicornes. Une forêt humide et tempérée de moyenne altitude, nommée le Siwalik, celle dans laquelle il avait grandi. Et enfin, une zone montagneuse dominée par des pandas roux, des yacks, des léopards des neiges ou encore des aigles impériaux. Cette zone, connue sous le nom de zone subalpine car située à plus de quatre mille mètres d’altitude, était très froide et ne comportait que très peu de végétation, seuls quelques edelweiss et primevères parvenaient à y pousser.

Un pays merveilleux et plein de ressources, songea-t-il avant de sombrer dans le sommeil.

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