Tate no Yuusha no Nariagari – Chapitre 42
Branche Maudite
Traducteur : Team Yarashii
— Oh là là ! Il y a tellement de monstres !
Les terres environnantes étaient plutôt arides, mais, en atteignant les montagnes, tout n’était plus que rochers imposants et éboulis de pierres.
Un chemin menait vers les pays situés à l’est et, grâce à lui, nous parvînmes à progresser, même à pas lents.
Ce petit exercice de grimpe se prolongea pendant environ trente minutes.
J’avais amené des remèdes curatifs et médicinaux… et, à cause de l’air empoisonné, j’avais aussi fait le plein d’antidotes.
Au village, juste avant de nous mettre en route, j’avais proclamé mon intention d’y laisser l’attelage.
— Non ! Ces charrettes contiennent tous mes plus grands trésors !
Et Filo avait fait un scandale jusqu’à ce que nous ayons accepté de la laisser tracter.
Depuis combien de temps était-elle née ? Un mois ? Et c’était elle qui me donnait des leçons de vie.
Mais bon, elle avait aussi passé plus de 90 % de son temps à tirer notre attelage, il était donc tout naturel qu’elle s’y soit attachée.
Quant aux monstres, il y avait beaucoup d’arbres et de batraciens empoisonnés… en fait, la plupart de ces créatures l’étaient.
Après les avoir vaincues, je laissai mon bouclier absorber ce qu’il pouvait.
Bouclier Arbre Empoisonné : conditions remplies
Bouclier Grenouille Empoisonnée : conditions remplies
Bouclier Abeille Empoisonnée : conditions remplies
Bouclier Mouche Empoisonnée : conditions remplies
Tout ce que je déverrouillais était de type poison, et les talents d’amélioration de statut se référaient tous à la résistance au poison.
Le seul bouclier qui tranchait avec le reste fut obtenu en dépeçant l’abeille empoisonnée et en offrant les restes à mon Arme Légendaire.
Bouclier du Dard d’Abeille : conditions non remplies
Bonus d’équipement – attaque 1
Effet Spécial : Bouclier Dard (faible), Poison d’Abeille (poison)
La valeur défensive n’avait pas beaucoup changé par rapport à celle du Bouclier du Dard d’Abeille originel, mais son effet spécial avait évolué pour passer de paralysie à poison.
Mais je mettais cela de côté pour le moment. Il y avait un paquet d’ennemis dans le coin. Nous en avions tué plusieurs, mais d’autres finiraient par s’approcher. Alors, nous recommencerions l’opération, tout cela pour qu’une nouvelle vague fasse son apparition.
Le vent était le vecteur de la maladie et il balayait cet environnement hostile qui semblait exhaler du poison par chaque fissure et chaque crevasse. Cela aurait été un exercice périlleux pour un aventurier lambda.
— On a beau les tuer, il en vient toujours d’autres. Filo ! Fais-nous dégager d’ici !
— D’accord !
Filo se pencha en avant et tracta notre attelage de toutes ses forces.
Galopant à pleine vitesse, elle écrasa même quelques ennemis sur le passage. Cela nous fit gagner un peu d’expérience.
Plus loin sur la route, nous croisâmes un nouveau monstre ayant l’air constitué de boue, mais Filo le mit à terre si rapidement que je n’eus pas la moindre chance de pouvoir absorber quoi que ce soit.
— On a réussi.
Nous découvrîmes le cadavre du dragon et l’air empestait la pourriture, charriant poison et mort.
La créature faisait dans les dix mètres de haut et ressemblait à l’image que l’on pouvait avoir d’un dragon dans le folklore occidental. Ou du moins, de son vivant. Difficile d’en être certain dans son état actuel.
Il n’était même pas possible de déterminer sa couleur au vu de l’avancement de la décomposition. Çà et là, nous pouvions discerner des morceaux de peau noircie encore accrochés aux os.
Il paraissait avoir été terrassé par un unique coup porté au ventre. Une profonde entaille d’où s’étaient déversés les viscères était visible. Des nuages de poison flottaient près de la viande avariée et tout cet endroit filait vraiment les jetons.
— J’ai faaaaaim !
— Comment tu peux regarder ça et dire une chose pareille ?
Filo plongea sa tête dans la calèche et se mit à chercher de quoi grignoter. Je la regardai faire.
— Raphtalia, est-ce que ça va ?
— Oui.
Raphtalia avait toujours eu des poumons fragiles, alors j’étais inquiet que la qualité de l’air la gêne. Cependant, elle me dit qu’elle se sentait bien.
— Si jamais ça change, n’hésite pas à aller t’allonger.
— Oui.
Nous abattîmes des Mouches Empoisonnées et nous rapprochâmes du cadavre de la bête.
Ren et les autres aventuriers s’étaient déjà servis sur la carcasse. Les cornes, les griffes, les écailles, ainsi que les ailes avaient pratiquement toutes disparu. Même la langue n’était plus là. Il ne restait réellement plus que la viande et les os.
Toute la peau avait aussi été emportée, comme s’ils avaient tout arraché d’un seul tenant.
L’air sentait si mauvais que nous fronçâmes involontairement le nez. C’était très éprouvant.
J’avais des talents qui me conféraient de la résistance au poison, mais je me demandais si tout irait bien pour Raphtalia.
— Filo, occupe-toi de ces mouches pendant que Raphtalia et moi découpons ce qu’il reste du dragon. Actuellement, il est trop gros.
Si nous l’enterrions ainsi, il continuerait d’avoir un impact sur la terre et sa pourriture pourrait rester présente dans l’air ou l’eau. Non, il était préférable de l’absorber morceau par morceau dans mon bouclier et de s’en débarrasser.
— D’accord.
Filo finit son repas improvisé et contempla son ventre tout rebondi.
— Je me sens un peu barbouillée.
— Tu as trop mangé.
Raphtalia et moi firent quelques pas en direction de la créature pour mettre notre plan en action.
*Grondement*
— J’ai rêvé ou quoi ?
— Hmm…
J’aurais juré que le cadavre avait… tressailli ?
C’était probablement une illusion causée par les nuages mouvants de Mouches Empoisonnées.
*Grondement*
Non. Ce n’était pas une illusion.
Le dragon se mit à bouger et adopta rapidement une posture défensive.
— Gaaaaoooooooh !
Le dragon n’avait ni croc ni griffe, mais il se redressa et poussa un cri féroce.
— Comment ce truc peut bouger ?
— M. Naofumi, calmez-vous !
Quand ce dragon mort et pourtant en mouvement… ce Dragon Zombie se dressa devant moi, je pris conscience que je hurlais.
Allez, c’est bon, et puis quoi encore ?
Qu’importe la manière de voir la situation, ce dragon était bien trop fort pour nous !
Un Dragon Zombie… j’en avais déjà vu dans des jeux, auparavant… et ils étaient toujours bien plus fort morts que vivants !
Serait-ce également le cas dans ce monde ?
La bête se dressa sur ses pattes, tremblant et grinçant, alors que ses organes entamaient leur régénération et reprenaient leurs fonctions. Ensuite, il se tourna face à nous.
À présent, il possédait des ailes et sa queue fouettait l’air. Ses griffes et ses crocs requerraient apparemment plus de temps.
La viande avariée devint liquide et parcourut son corps, pour se reformer au niveau de ses ailes et de sa queue. Le même processus se répéta pour les organes internes. J’observai bien et vit que sa blessure fatale au ventre était déjà refermée. Comment étions-nous censés vaincre ce truc ?
— Sauve qui peut !
— Mais Filo a…
Raphtalia désignai frénétiquement du doigt le Dragon Zombie.
J’avais oublié ! Il existait une inimitié naturelle entre Dragons et Filoliaux !
— Hiyaa !
Filo s’était élancée en direction de la créature et visait son cou, délivrant une frappe puissante sur sa tête.
Un bruit lourd et satisfaisant retentit, puis la bête se mit à se cambrer.
— Est-ce qu’on peut… gagner ?
Filo était douée pour attaquer, et ce Dragon Zombie ne possédait encore ni croc ni griffe.
Peut-être avions-nous nos chances. J’avais du mal à croire que ce monstre mort puisse tenir encore très longtemps.
Et si nous devions fuir, il y avait un risque qu’il aille prendre d’assaut le village.
Tout comme lorsque Ren l’avait défait, le dragon aurait la possibilité de revivre et de refaire de cet endroit son territoire. Toutefois, il était encore dans une phase régénérative, nous avions donc une opportunité à saisir. Si nous n’en profitions pas maintenant, les prochains aventuriers n’auraient aucune chance.
— Ne sois pas stupide ! Recule !
— Je veux pas !
— Bordel ! Bon, d’accord, on va s’en charger !
— D’accord !
La situation était relativement sous contrôle. Je changeai pour le Bouclier de Vipère de Chimère pour sa statistique défensive et, grâce à lui ainsi qu’à ma propre défense, je parvins à encaisser les attaques du dragon.
Mais, tout à coup…
— Gaaaaooooh !
Quelque chose s’agita dans son ventre et remonta vers sa gorge. Ensuite, la bête ouvrit sa gueule et projeta une vaste nappe de gaz violet vers nous.
Raphtalia et Filo suivirent mes directives établies à l’avance et se précipitèrent derrière mon bouclier.
Je le tins fermement pour bloquer le tourbillon de gaz, mais…
— Qu’est-ce… que c’est que ça ?
*Tousse* *Tousse*
Le souffle était un poison épais et nocif.
J’avais une certaine résistance, mais même moi eus la tête qui se mit à tourner et la respiration qui devint saccadée.
Derrière moi, Raphtalia fut prise d’une violente toux.
Filo ne semblait pas affectée, ou alors elle retenait son souffle. Quoi qu’il en soit, elle fonça en avant et frappa avec force dans une zone tendre située sous le dragon.
— Ra… Raphtalia ! Est-ce que ça va ?
*Tousse* *Tousse* *Tousse*
Elle tenta, à travers ses larmes, de me dire que tout allait bien. Cependant, elle ne put former le moindre mot. Sa toux était trop intense.
Ce n’était pas bon signe.
Filo et moi pouvions continuer le combat, mais Raphtalia était hors-jeu.
— Raphtalia, va-t’en d’ici. Retourne à la calèche, il y a un antidote là-bas. Prends-le et repose-toi.
*Tousse*
Raphtalia fut saisie d’une nouvelle crise, mais elle désigna néanmoins le dragon d’un air désespéré.
Je suivis son regard et fus abasourdi.
La créature avait déployé ses ailes et s’était élevée dans les airs, avant de plonger et de gober Filo dans sa gueule.
Toute la scène parut se dérouler au ralenti.
Je tendis la main, mais…
— Ah…
*Croque*
Il y eut un bruit assourdissant, et un jet de liquide rouge dégoulina de la gueule du dragon.
— Filoooooooooo !
Je ne savais pas qui s’était exclamé. Était-ce Raphtalia ou moi ? Tout ne fut plus qu’un vaste moment de confusion au ralenti, et je n’étais plus certain des actions de chacun.
Ce petit piaf puéril et égoïste n’avait vécu qu’un mois, mais Filo avait désiré vivre à mes côtés durant tout ce temps, souhaitant que je la gâte. Elle ne voulait pas que je la trouve inutile. C’était simplement une enfant.
Tel un spectacle de lumières pivotantes, mes souvenirs de Filo vinrent défiler devant moi.
Qu’était-il arrivé ?
Qu’était-il…
Le dragon mâcha avec application sa prise, puis…
*Déglutition*
Avec un son puissant, il l’avala.
— Non ! Filo !
Ma respiration se fit sifflante et je me tins debout, en état de choc. Je souffrais. Je souffrais comme si l’on m’avait poussé d’une falaise. J’avais le sentiment que je comprenais enfin ce que cela faisait d’être dévasté, d’être empli de désespoir.
Ce n’était pas quelque chose qui vous poussait à agir, à réclamer vengeance. Non, c’était bien plus triste et profond. La prise de conscience que le temps ne pouvait pas être remonté.
— M. Naofumi !
Raphtalia se tourna vers moi et me gifla violemment.
— Reprenez-vous ! Ce n’est pas le moment de s’effondrer !
Ses yeux étaient baignés de larmes.
Elle me criait dessus. Elle me disait que la situation ne ferait qu’empirer si nous ne faisions rien.
Néanmoins, j’étais incapable de l’entendre. J’étais submergé par la colère… celle d’avoir perdu une amie proche sous mes yeux.
Tu aspires à davantage de pouvoir ?
Je pouvais capter une voix s’adressant à moi depuis mon bouclier.
Mon regard dériva jusqu’à se poser dessus. Je pus l’entendre à nouveau.
Éprouves-tu de la haine pour toute chose ?
Je sentais mon cœur tambouriner.
Je pouvais discerner les ténèbres qui s’étendaient depuis les profondeurs du bouclier.
Cela s’était déjà produit, lorsque j’avais affronté Motoyasu en duel.
L’arbre du bouclier m’apparut soudainement.
L’écran pivota et, dans un fond presque rouge ou presque noir, un autre arbre se révéla.
Branche Maudite.
L’expression traversa rapidement mon esprit. Il y avait un bouclier listé à cet endroit qui brillait.
Branche Maudite :
Bouclier du Courroux : talent bloqué
Compétences bonus d’équipement – Bouclier de Bascule (attaque), Vierge de Fer
Effet Spécial : Brûlure de la Malédiction du Porteur, augmentation de la force
Né du cœur : Bouclier Meurtrier
Ce bouclier était accompagné d’une description et d’instructions. J’ignorais si j’avais fait appel à lui ou si c’était involontaire. Cependant, j’écoutai mon cœur et découvris qu’il était déjà équipé dans ma main.
Le Bouclier du Courroux.
Un déferlement émotionnel émergea du bouclier et il émit alors une puissante lumière rouge et noire, tout en changeant de forme.
Désormais, il était recouvert de flammes menaçantes et sa couleur était celle du sang.
*Battement* *Battement*
Tout mon être était dominé par la colère, imprégné par la rage.
La dernière fois, quand j’avais perdu face à Motoyasu et qu’ils avaient fait mine de me prendre Raphtalia… quand je n’avais plus ressenti que de la haine pour ce monde…
Tout m’était alors apparu noir, le décor semblant se fondre dans les ténèbres… des ténèbres qui s’étaient moquées de moi, qui m’avaient haï.
J’étais submergé par cette émotion.
— Gaooooooh !
Une gigantesque ombre s’orienta vers moi et hurla. Elle était sur le point de m’atteindre…
— Haoooooooh !