Tour des Mondes – Nina 11

Merci aux sponsors du mois !

Quentin S. (1€)

Guillaume V. (25€)

Arthur L. (8€)

Lagesopera (100€)

_________________


Inébranlable

Le garde qui a parlé la dévisage froidement en écoutant sa réponse. En tant que garde du peuple de la tour, il sait que sa mort n’est pas éternelle et qu’il reviendra comme si de rien n’était plus tard. Il y a une logique derrière son éternelle résurrection. La tour a toujours eu sa façon de penser et sa logique. Il ne prétendra pas la comprendre, mais en tant que membre du peuple de la tour il en sait plus que n’importe quel grimpeur. La logique de la tour est loin d’être parfaite, mais son pouvoir n’a aucune limite. Les gardes ne sont qu’un moyen de contrôle sur les grimpeurs qui est loin d’être suffisant en effectif et en force. De la poudre aux yeux pour le commun des grimpeurs ici-bas, mais qui ne marche pas pour les erreurs comme la fille qu’il a devant lui. Si elle le tue lui et les autres, il reviendra, renforcé par l’expérience de sa propre mort, et il se battra à nouveau.
Pourquoi ? Parce que la tour aime ce genre de jeu ou un côté a infiniment plus de chance de perdre que l’autre.
Et dans ce jeu, la garde ne fatigue jamais et ne ressent jamais la souffrance. Elle s’entraîne, elle se bat et elle meurt, avant de renaître plus forte.
La garde peut mourir, mais elle n’admettra jamais la défaite.
Un groupe d’immortels unis pour faire respecter la justice.
C’est leur mission.

Le garde se rappelle tout ça et pense au nombre de fois qu’il est mort depuis que les grimpeurs sont arrivés au pied de la tour. Il n’a plus peur des menaces depuis bien longtemps, comme chaque garde ici et ailleurs. Cependant, quelque chose le dérange. Derrière lui se trouve un gardien, un être bien supérieur à lui, dont une des missions est de parer à la faiblesse de la garde si cela s’avère nécessaire.
Pourtant, est-ce bien nécessaire qu’il soit là ? L’erreur devant lui n’est qu’une jeune grimpeuse, qui d’après les informations qu’il a, ne demande pas la présence d’un gardien.
S’il est là, c’est peut-être qu’il se trompe et qu’elle est bien plus forte qu’eux, mais il est difficile de comprendre un gardien et ce n’est pas sa mission.

— Menacer un garde de mort rajoute automatiquement à ta peine une semaine, répond-il froidement. Agresser un garde et le tuer rajoute automatiquement un an de plus. Si tu nous tues tous, tu perdras ta liberté et serviras la tour pendant 6 ans, d’une façon ou d’une autre. La justice décidera de ta condamnation finale.
— Pff… Ahahaha, c’est tout ? Rétorque Nina qui ne peut s’empêcher de rire.

Elle les regarde en soupirant. Est-ce qu’elle veut vraiment perdre six ans à cause de ce qu’elle a fait ? Enfin, la vraie question pour elle est de savoir si elle est prête à perdre 3 mois à cause de l’excès de zèle d’un professeur. Pourquoi pas. Elle lève Judas et fait quelques mouvements latéraux dans le vide. Cela lui demandera du temps de se faire à Judas et à sa taille, mais clairement elle ne se sent pas menacée par six gardes qui ont l’air de ne rien avoir de spécial.
Elle lève l’épée en direction du garde et sourit comme un cancre que l’on menace de punir inutilement. Cela suffit pour qu’ils comprennent ce qu’elle compte faire et ils s’avancent en arc de cercle vers elle.
C’est là qu’il intervient en déployant une sorte d’aura froide autour de lui. Les gardes s’arrêtent aussitôt en comprenant et reculent pour qu’il passe.

Le gardien pose ses pieds nus sur le sol froid et marbré alors que le silence de cet étage devient assourdissant pour Nina. Elle peut l’entendre faire quelques pas dans sa direction avant de s’arrêter. Maintenant qu’elle le voit de plus près, il n’a rien d’un simple vieillard. Il est bien trop grand pour ça, bien plus grand qu’elle. Il doit facilement dépasser les deux mètres. Elle ne s’en était pas rendue compte avant puisqu’il lévitait dans les airs, mais maintenant elle se rend compte qu’il est « censé » être intimidant, même si pour elle ça ne change rien. Judas est suffisamment grand pour qu’elle le découpe en deux dans le sens de la longueur sans qu’elle ait besoin de sauter pour l’atteindre.

Le gardien étouffe un sourire sur son visage en voyant la manière dont elle le regarde. Impertinente jusqu’au bout. Il s’arrête alors entre les gardes qui surveillent ses gestes. Il sait qu’il est inutile de lui faire la morale et ne le fera pas, mais il a une autre idée.
Sa voix retentit alors en se répercutant sur les murs en s’amplifiant en un écho froid qui lui est destiné.

« Tu n’as pas ta place ici, mais la prison sera pour toi une opportunité de devenir plus forte. Accepte ou bats-toi, cela ne fera aucune différence. »

Nina serre les dents dans une sorte de sourire figé et inquiétant. Elle a bien tout entendu de ce qu’il a dit, mais le début de sa phrase a suffi à lui faire ressentir une colère sourde et bouillonnante. C’est encore une fois la même phrase. Elle n’a pas sa place ici. Encore. Encore et toujours. Pourquoi est-ce que tout le monde lui dit ça. Il suffit qu’elle entre dans la tour et tout le monde lui dit qu’elle n’a pas sa place. C’est une mauvaise blague qui perd un peu plus de son sens à chaque fois qu’elle l’entend, et le gardien semble amusé de la voir réagir comme ça, comme s’il s’y attendait et qu’il avait simplement fait exprès. Elle ne reviendra même pas sur l’idée que la prison est une opportunité, ce qui est ridicule, mais lui dire une fois de plus qu’elle n’a pas sa place ici l’enrage.
Ses yeux sont rivés sur ceux du gardien. Après ce qu’il vient de dire, c’est impossible de reculer. Elle peut être résiliente ou paraître violente, mais elle a son propre code moral, un code qui fait que si on lui manque de respect, elle répond. Peu importe la personne ou son grade.

Bien entendu, cela dépend aussi de Nina et de ce qu’elle considère être un manque de respect, et malheureusement, il y a trop de choses pour faire une liste. Un simple regard, un geste… Dernièrement, c’est quand on lui dit qu’elle n’a pas sa place ici qui devient un modèle récurrent, la personne devant lui peut jouer au Gardien, mais en prononçant cette simple phrase, il a touché à une des cordes les plus sensibles. Peu importe les trois mois en prison à présent…

Sans même y réfléchir, elle brandit Judas et abat la lame en direction du visage du gardien. Elle ne fait pas semblant, mais c’est aussi parce qu’elle sait que le vieux devant elle n’est pas un individu normal.
Pour les gardes, elle pensait à la base à se servir du dos de la lame puisque suivant sa logique, ils ne lui ont pas manqué de respect et ne font que leur travail, mais pour ce qui est du gardien à présent, elle n’a qu’une envie, c’est de le découper. La lame fonce vers le visage dans un arc de cercle parfait.
Sans même réagir, le gardien continue de sourire et la lame se fige dans les airs comme si elle était figée dans le temps. De la pointe jusqu’au bout du manche, Judas lui donne la sensation de s’être transformé en béton armé figé dans l’espace.
Cependant Nina ne semble même pas surprise. Dans son état, celui dans lequel Judas se trouve n’est qu’un détail, un simple obstacle à la violence en elle qui la dévore et qu’elle a besoin d’exprimer.
Sans réfléchir, elle met son pied sur la garde de Judas et s’en sert de point d’appui pour se propulser, le poing prêt à frapper le visage du gardien.
Même si elle sait qu’elle ne pourra probablement pas le tuer maintenant que Judas n’est plus utilisable, elle ne renoncera pas à le toucher et à le frapper. La confrontation directe est la seule chose qu’elle peut faire actuellement.
Cependant, sur le visage du gardien, elle peut voir qu’il s’amuse de tout cela alors qu’il l’observe immobile. Le poing de Nina se fige dans les airs à une dizaine de centimètres de son objectif, comme la lame de Judas.
Pour peu elle pourrait lire le mot « futile » sur le visage ridé du gardien, ce qui l’irrite d’autant plus.

Son poing semble figé de la même façon que Judas, impossible à bouger, fixé dans les airs sans qu’elle ne puisse avoir aucun contrôle dessus. Cela n’a rien à voir avec la sensation de la veille où elle se battait pour garder le contrôle de son corps, ici il n’y a même pas la possibilité de résister, et elle le comprend rapidement.

Elle se sert des muscles de son bras pour se balancer sur ce nouveau point d’appui et essaye de lui envoyer un coup de pied, qui lui aussi se fige avant de l’atteindre. Nina essaye ensuite de le frapper en se servant de son pied et de son poing encore libre et, comme si le Gardien en avait marre, il décide d’un mouvement de main de la repousser. Le corps de Nina est projeté contre la grande porte en bois sombre derrière elle où Judas, projeté avec elle, la rejoint en grinçant et cliquetant sur le sol froid après avoir frappé violemment la porte. Le choc reste violent, même s’il est loin de pouvoir la tuer et elle serre les dents en étouffant la douleur.

Sa tête lui fait mal, mais elle s’en moque, elle regarde le gardien en se relevant avec difficulté. Ce n’est pas la première fois qu’elle s’attaque à plus fort qu’elle, mais le fait qu’il soit capable d’utiliser des pouvoirs dont elle ne sait rien l’empêche de réfléchir correctement.
Elle serre les dents au point de les entendre grincer et attrape Judas par terre à côté d’elle.
Nina fixe le gardien devant elle et les gardes qui, de chaque côté de lui, restent immobiles et continuent de la regarder froidement. Elle est réduite à une simple bête acculée, tout ça parce qu’elle n’est pas encore suffisamment forte.
Elle crache par terre avant de s’essuyer le visage rapidement. Elle s’apprête à charger une nouvelle fois, mais le gardien l’arrête totalement, tous ses membres se figent, rendant impossible le fait d’avancer.

« Pour avoir essayé de m’affronter à deux reprises, tu mérites au moins de savoir qui je suis, car le jeu de la causalité a fait que nous serons voués à nous revoir dans le futur. Devant toi se trouve le gardien du temps et de l’espace, Bemos. Reviens me voir quand tu seras plus forte, mais pour l’instant, dors. »

Avant même que Nina n’ait le temps de réagir ou même de parler, Bemos tend sa main aux doigts longs et fins, et claque simplement des doigts. Aussitôt, tout devient noir, et Nina disparaît dans l’inconscience.

*

Quand elle rouvre enfin les yeux, c’est pour voir un couloir aux murs tellement blancs qu’elle se sent agressée. Tous ses sens sont violemment touchés par ce qui l’entoure. Elle n’est clairement plus dans la tour des Mages vu l’ambiance.

Elle regarde autour d’elle et se redresse du banc sur lequel elle est assise. En tournant le visage, Nina peut voir quelqu’un assis à côté d’elle, un homme âgé de la trentaine aux cheveux châtain blond portant une sorte de costard de mauvaise qualité.

« Hey, bienvenue parmi nous. Je m’appelle Hamilton, je suis ton charlatan attitré… »


Correction : Hastin



Chapitre Précédent | Sommaire | Chapitre Suivant

Pour soutenir mon travail, clique en dessous :

Tipeee

3 thoughts on “Tour des Mondes – Nina 11

Laisser un commentaire