Sovereign of Judgment – Chapitre 37

Épisode 3 : L’ère des fantômes
Chapitre 37 : Pause (5)

Il faisait encore jour lorsque Chu Youngjin les a rejoints. Au début, Choi Hyuk voulait entraîner son karma et ses partisans. C’était son plan initial.
Mais Lee Jinhee s’y est opposée.

« Heiiin ? Quoi ! Il y a quelque chose de bien plus important que ça. »
« Quelque chose de plus important ? »

Même Baek Seoin semblait remettre en question son objection.

« Je peux laisser passer l’ignorance du Leader, mais comment Baek hyung peut-il agir comme ça lui aussi ? »

Lee Jinhee, qui était étonnée, a poursuivi :

« Il faut le faire ! »

Cependant, personne ne comprenait de quoi elle parlait. Frustrée, elle a fini par hausser le ton.

« N’allons-nous pas organiser des funérailles ? »

Ces mots se sont engouffrés dans les cœurs vides de Choi Hyuk, Baek Seoin et Chu Youngjin.

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TSPT. Trouble du stress post-traumatique.
C’est le terme générique pour désigner, entre autres, la léthargie, l’insomnie, le comportement antisocial et la perte de concentration que les gens éprouvent après une catastrophe.

Une pause de 3 jours. C’était génial au début. Toutefois, plus le temps passait, plus cela devenait douloureux, car l’enfer se rapprochait chaque jour davantage.
Au troisième jour, l’ambiance qui régnait dans le camp de réfugiés des survivants était désastreuse. Les gens n’essayaient pas de se parler. Ils n’essayaient même pas de se réconforter les uns les autres.
“Ma douleur est égale à la tienne. Je ne m’attends pas à ce que cela s’améliore. Rien de bon ne se produira en partageant nos histoires. Tout est foutu.”
Certaines personnes avaient l’air bien, mais en les observant de plus près, l’on s’apercevait qu’elles souffraient d’une sorte de détresse psychologique. C’était la même chose pour Choi Hyuk et Baek Seoin.

Choi Hyuk avait actuellement 18 ans. On pouvait dire qu’il n’avait pas l’expérience nécessaire pour penser immédiatement à organiser des funérailles. Cependant, à 26 ans, Baek Seoin aurait dû penser à organiser des funérailles pour ses parents, mais il n’y a pas pensé une seule fois.
Ils n’étaient pas les seuls. Des plus jeunes aux plus âgés, il était absolument anormal que personne parmi les survivants n’ait pensé à organiser des funérailles. Bien qu’ils aient pu faire leur deuil seuls, personne n’a partagé son chagrin avec quelqu’un d’autre.
Ils étaient peut-être trop fatigués ou alors ils ont pensé qu’il n’était pas nécessaire d’en faire toute une histoire. Ils ont également pu croire qu’ils seraient critiqués s’ils abordaient le sujet après avoir subi une expérience aussi vicieuse.
C’est peut-être parce qu’ils sondaient sans cesse l’état d’esprit des autres qu’ils se sont mis à tout détester.

« Quand même, ce n’est pas bien ! »

Mais Lee Jinhee avait une sorte de principe étrange. Elle ne se souciait pas du regard des autres. Elle ne s’intéressait qu’à ses propres valeurs. Les balbutiements de Choi Hyuk, Baek Seoin et Chu Youngjin ont été écartés. Et si ses actions les mettaient mal à l’aise ? Elle a préféré mettre de côté ces préoccupations.
Comme elle a dit : « Nous devons le faire ! Nous devons le faire ! » avec une certitude absolue, les cœurs inertes des trois hommes ont commencé à bouger. Ils ont senti qu’ils devaient vraiment le faire.

Baek Seoin s’est précipité à la banque et a retiré de l’argent. Comme il existait un programme d’urgence pour les survivants qui avaient perdu leurs cartes bancaires, il n’a eu aucune difficulté à le faire.
Baek Seoin a retiré tout l’argent qu’il avait économisé pour ses études. Lee Jinhee avait déjà retiré tout l’argent qu’elle possédait.

L’argent était une chose de la vie courante, et comme il était devenu obsolète, il n’avait plus aucune valeur.
Avec cet argent, Baek Seoin et Lee Jinhee ont acheté des chrysanthèmes, de l’encens, de la nourriture, de l’alcool, de la vaisselle jetable, et ont même emprunté une longue table. Ils n’ont pas demandé à une entreprise de pompes funèbres de s’en occuper, ils ont tout acheté et se sont fait livrer.
Choi Hyuk était comme un caneton suivant sa maman canard pendant qu’il les accompagnait. Il n’a rien dit après avoir entendu le mot “funérailles”.

Alors qu’ils continuaient leurs préparatifs, le soleil a commencé à se coucher.
Le parc Marronnier. Trois pierres tombales ont été érigées à côté du tumulus funéraire de la Gardienne Choi Miyeon.
Les noms des parents de Baek Seoin étaient inscrits sur l’une d’elles.
Le nom de la petite amie de Chu Youngjin, Lee Hyejin, était inscrit sur une autre.
Et pour finir, le nom de Jung Minji était inscrit sur la dernière.

« … Faisons-en une pour Jung Minji… »

Ils ont suivi la suggestion de Choi Hyuk d’en faire une pour Jung Minji.

Les survivants du district de Seongbuk regardaient d’un œil léthargique le groupe de Choi Hyuk démonter les pavés du trottoir et ériger des pierres tombales faites de boucliers et d’épées inutilisables. Certains des admirateurs de Choi Miyeon ont reconnu Choi Hyuk et les ont aidés.
Lee Jinhee leur a dit :

« Mesdames et messieurs, vous devriez également ériger des pierres tombales. Je vais vous aider. »

Bien sûr, eux aussi avaient perdu des personnes qui leur étaient chères.
Les larmes ont soudainement commencé à couler après qu’elle ait prononcé ces mots.

« Non… Nous… »

Ils étaient incapables d’aligner deux mots pour exprimer ce qu’ils voulaient dire. Un homme a pris un pavé et y a gravé un nom. C’était le nom de sa fille. Il a placé le pavé contre la sépulture de Choi Miyeon.

« Pour l’instant, je vais… je vais faire ça. C’est misérable, mais comme c’est à côté de la Gardienne… alors… je suis désolé… désolé, Hyeyeon… »

L’homme était incapable de terminer sa phrase.
Lee Jinhee l’a pris dans ses bras et lui a tapoté le dos. Sniff. Sniff. L’homme a essayé de retenir ses larmes mais une fois que les larmes ont commencé à couler, il n’était pas facile de les arrêter.

Tac. Tac. Fschhh.

Baek Seoin a allumé une allumette et a brûlé l’encens. La fumée s’est élevée silencieusement. Comme l’air était immobile, la fumée s’est élevée en une ligne droite et verticale.
Ils ont brûlé de l’encens et placé des chrysanthèmes devant les noms de leurs parents.

Une, deux…
La seconde fois qu’il s’est prosterné, Baek Seoin ne s’est pas relevé immédiatement. Ses épaules tremblaient. Figé dans cette posture, il a continué à marmonner quelque chose avant de se relever lentement, tout doucement. Ses yeux étaient rouges mais il n’y avait pas de larmes.

Choi Hyuk a observé l’intervention de Baek Seoin et a fait exactement la même chose. Il a placé des chrysanthèmes devant la tombe de sa mère, a brûlé de l’encens et s’est prosterné deux fois…
Chu Youngjin a fait de même. Il a suivi les explications de Lee Jinhee : « Tu dois juste faire ce que Baek hyung a fait. Ce n’est pas grave si tu pleures, mais ne versons pas trop de larmes. »
Ils se sont tous prosternés devant leur emplacement respectif, puis se sont prosternés devant d’autres pierres tombales.
Devant la pierre tombale des parents de Baek Seoin, Choi Hyuk a dit : « Puissiez-vous reposer en paix », et devant celle de Lee Hyejin, qui avait le même âge que lui, il a dit : « Puisses-tu aller dans un endroit agréable ». Et finalement, devant la pierre tombale de Jung Minji, il a dit : « Repose en paix. Tu as fait de ton mieux. ».

Ce n’était pas grand-chose. Ce n’était pas touchant ou étrange. C’était seulement un processus de confirmation de leur mort.
Ils ne se sont pas tout simplement dit : “Tu es mort ? Tu es vraiment mort ? Aussi facilement ? Vraiment ?”, pour ensuite l’oublier.
“Tu es mort ?”
“Je suis mort.”
“Vraiment ?”
“Vraiment.”
“Et maintenant, quoi ?”
“Je ne sais pas…”
“Faisons quelque chose et asseyons-nous ensemble.”
Il s’agissait simplement d’un processus formel où les gens avaient des conversations invisibles comme celle-ci.
Mais apparemment, les gens avaient besoin de cette formalité.
Une personne, puis deux. De plus en plus de gens se sont intéressés à leurs funérailles.

« Quel est votre lien de parenté ? » a demandé une grand-mère qui était assise, le visage vide de toute expression.
« Ce sont mes parents. Ceux qui sont là-bas sont mes amis. »

Baek Seoin a pointé du doigt les pierres tombales récemment érigées et lui a expliqué la situation.

« Toutes mes condoléances… Aahh. Je suis désolée. Malgré tout, vous êtes admirable. Vraiment admirable. »

Lee Jinhee s’est approchée d’elle. La grand-mère lui a tapoté le dos.

« Grand-mère, vous devriez en faire une aussi. »
« Aahh, je vais bien. Vous, les jeunes, vous avez la vie dure… C’est juste que ce qui se passe… Ce qui se passe… »

C’était une chose difficile à voir. Même la grand-mère, qui tenait la main de Lee Jinhee, portait une armure en cuir et avait une lance dans le dos. C’était une scène inconcevable il y a encore un mois. Le monde avait changé trop vite.
Mais, malgré cela, les principes de base n’avaient pas changé. Ils partageaient et compatissaient à la douleur des autres.

« Alors je vous en prie, venez par ici et mangez quelque chose. »

Lee Jinhee a mis de la nourriture dans une assiette et l’a posée sur la table.

« D’accord… D’accord. »

La grand-mère a détaché l’armure en cuir et a posé la lance. Elle a ensuite déposé des chrysanthèmes sur chaque pierre tombale. Elle a placé la paume de ses mains l’une contre l’autre et a prié rapidement avant de s’asseoir sur le siège que Lee Jinhee avait préparé pour elle.
C’était le début.
De plus en plus de gens ont commencé à se rassembler. Les personnes qui ont reçu la grâce de la Gardienne Choi Miyeon, la mère de Choi Hyuk, sont arrivées les premières. Même ceux qui, au début, se plaignaient de l’inutilité de cette cérémonie se sont tus au fur et à mesure que les gens se rassemblaient et se remémoraient les souvenirs de leurs proches.

Une atmosphère étrange s’est créée. La participation du public a amené plus de gens à participer. Certains ont réalisé des pierres tombales pour leurs proches tandis que d’autres ont gravé les noms des morts sur des pavés et les ont empilés. Ils se prosternaient ou priaient, puis mangeaient ensemble.
Alors que ces actions étaient répétées par différentes personnes, celles-ci se sont rappelées du sentiment de fraternité et de compassion qu’elles avaient les unes pour les autres.

En raison du nombre croissant de personnes, ils sont tombés à court de nourriture. Lorsque cela se produisait, quelqu’un en rachetait.
Le dîner s’est achevé au moment où le soleil se couchait, et que le ciel s’est assombri. Quelqu’un a allumé une bougie. Puis, de plus en plus de bougies ont été allumées.

Apparemment, quelqu’un avait mis en ligne ce rassemblement funéraire. D’une façon ou d’une autre, les survivants de Mapo et du district de Kangdong l’ont découvert et ont aussi commencé à se rassembler.
Même Bae Jinman qui résidait à la Maison Bleue est venu. Il s’est prosterné, a gravé un grand nombre de noms sur des pavés et les a empilés les uns sur les autres. Il a ensuite cherché Choi Hyuk, lui a pris la main et a hoché la tête plusieurs fois avant de partir. Il a fait de son mieux pour ne pas montrer ses larmes, mais il pleurait.

Même s’il n’y avait plus de nourriture, la nuit s’est prolongée, et passé minuit, les gens ne s’étaient toujours pas dispersés.
Des feux de joie ont commencé à jaillir de divers endroits. Les gens se sont assis autour de chacun d’entre eux.
La méfiance qu’ils avaient envers les autres groupes avait disparu depuis longtemps. Il n’y avait aucune distinction entre les jeunes et les vieux, les hommes et les femmes. Les gens se déplaçaient librement. Ils étaient libres de partager leurs histoires ou non. Le simple fait de s’asseoir autour de ces feux de joie leur procurait un sentiment de réconfort.
Bien que l’on ne sache pas qui les avait apportés, ils entendaient le son d’instruments que l’on jouait et de chansons que l’on chantait.

Tadak. Tadak. Les gens regardaient fixement les flammes brûlantes en chantant les chansons qu’ils avaient en mémoire à voix basse.

« Ce… »

Curieusement, Choi Hyuk avait la gorge serrée. C’était comme les moments qu’il passait avec sa mère. C’était comme ces nuits paisibles où il regardait sa mère travailler tout en s’endormant lentement.
Il a fermé les yeux. Il voulait se souvenir de la sérénité et de la beauté de ce moment. Et pourtant…

Pffschhh.

Il a placé sa main à l’intérieur du feu de joie.

Tadak. Tadak.

Les flammes étaient brûlantes. Cependant, sa Résistance à 2 étoiles ne brûlait pas facilement. Choi Hyuk a regardé d’un air absent sa main qui brûlait lentement dans les flammes.
Il a décidé de se souvenir de la sérénité de cette nuit-là, ainsi que de la douleur du feu qui lui donnait l’impression que des milliers de lames se frottaient contre sa main. Il a pensé que cela pourrait devenir un signal.
Il n’était pas certain que Baek Seoin et Chu Youngjin aient eu les mêmes pensées que Choi Hyuk, car ils ont tous deux mis leurs mains dans les flammes. Choi Hyuk a ri comme s’il trouvait cela absurde, et ils ont ri eux aussi.

« Ce sont des fous. Ils sont fous. »

Lee Jinhee était la seule à être stupéfaite et à les réprimander. Grâce à leur statut de Récupération, ils pourraient guérir de la plupart des brûlures, mais quand même, pourquoi faisaient-ils des choses aussi stupides ?

« Arrêtez ça. »

Lee Jinhee a mis ses mains dans les flammes et a retiré chacune des mains des garçons. Lee Jinhee a saisi leurs doigts avec ses petites mains afin de les tirer hors du feu. La situation est soudainement devenue telle que leurs mains se sont retrouvées les unes sur les autres.

« Prends soin de moi, s’il te plaît. » a déclaré Choi Hyuk d’un ton léger, comme si c’était une blague.
« Hahaha… »
« Ouïe… Ma main me fait mal… » a marmonné Lee Jinhee en frottant sa main qui était dans le feu.

Et c’est comme ça que le matin du jour suivant a commencé. Les rayons du soleil levant éclairaient les innombrables noms gravés dans le parc Marronnier. Parmi ces noms, il y avait même Song Simin et Yoon Girim. Les gens ont prié sans distinction pour qu’ils reposent tous en paix.
Que s’était-il passé cette nuit-là au juste ?
C’était une nuit où les gens avaient créé des liens de fraternité et éprouvé de la compassion, tout en ayant la conviction qu’ils se comprenaient tous.
Une mosaïque composée de morceaux de leurs propres vies.
Comme si la tragédie où ils s’étaient entretués n’avait jamais existé… C’était une belle nuit.

Et comme si cette nuit n’avait jamais eu lieu, la tragédie a frappé une fois de plus.
Entraînant encore plus de malheur.
Le matin s’est levé et leur mission a commencé.

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Chapitre traduit par Sigyn sur https://kisswood.eu
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