NORDEN – Chapitre 166

Chapitre 166 – Intimes rapprochements

— Allez, viens, n’aie pas peur !

— Ah ! mais l’eau est gelée ! s’indigna Erevan.

Les poils au garde-à-vous et les membres raidis, la jeune femme demeurait figée sur l’échelle, incapable de décrocher ses mains des barreaux pour descendre davantage. Jörmungand, quant à lui, était totalement immergé, se délectant de cette eau froide au toucher vivifiant.

— Lâche cette barre et laisse-toi aller ! Tu vas voir une fois que tu y es c’est très agréable.

Écoutant son conseil, elle s’exécuta et plongea dans un cri de détresse. Elle remonta aussitôt la tête hors de l’eau et agita ses membres pour se maintenir à la surface.

— Brave fille ! rit le serpent, amusé par son tourment.

— Ah j’ai froid ! j’ai froid ! Se baigner en plein hiver ! Si je meurs d’une pneumonie, je te jure que je te le ferai payer.

— Contente-toi de ne pas te noyer c’est déjà ça.

Sa remarque la fit pouffer et elle lui envoya une pichenette pour l’éclabousser.

— Maudit Serpent ! marmonna-t-elle avant de plonger sa tête pour se mouiller intégralement les cheveux et le visage sur lesquelles les gouttes perlaient en abondance, ruisselant en cascade.

Elle battit des pieds et des mains pour effectuer quelques brassées, laissant son corps souple et agile s’acclimater à la température. Tout comme son sauveur, elle était nue, pas l’ombre d’un tissu ne venait couvrir cette peau caramel tranchée par de rares taches blanches et noires. Quand elle fut suffisamment accommodée, elle s’avança vers lui. D’un geste lent, il passa ses bras au niveau de sa taille et la maintint fermement. Le contact de ce corps chaud contre le sien la fit frissonner.

— Bon, tu te souviens de ce que je t’ai dit ?

— Prendre une grande inspiration, je compte une minute trente jusqu’à la cavité, là je reprends mon souffle et après on descend davantage jusqu’au navire situé sept mètres sous l’eau. C’est ça ?

— Et si tu te sens mal ?

— Je te pince le bras.

— Très bien ! Comme je t’ai dit tu n’as pas à paniquer, il n’y a aucun requin dans les parages à l’heure actuelle. Les seuls gros animaux que tu rencontreras seront des tortues et des raies.

Elle opina du chef puis, après un soupir pour se détendre, prit une grande inspiration. Sous les flots, elle se laissa guider par son sauveur dont le corps ondoyait avec aisance dans cette mer sombre au premier abord. Son cœur battait fort, elle appréhendait cette situation ; jamais elle n’était restée aussi longtemps sous l’eau ni n’était descendue aussi profondément. Jörmungand caressait son ventre du pouce pour la forcer à garder son calme et lui signifier que tout se passait bien.

Ils s’enfoncèrent vers les amas rocheux aux parois couvertes d’algues et de crustacés et pénétrèrent dans une grotte sous-marine. Là, ils remontèrent quelque peu et respirèrent à plein poumon cette bulle d’air nichée sous la falaise où un faible trou perçait la roche pour l’éclairer d’un minuscule halo doré.

— Prête à partir pour l’exploration ? demanda-t-il en posant ses mains sur les joues de sa protégée. L’épave est juste sous nos pieds. Je ne te ferai pas visiter l’intérieur car c’est trop sombre pour tes yeux et tu n’y verras rien, en revanche on va faire un tour du vaisseau. Si quelque chose attire ton regard tu me le signifies.

Elle acquiesça et se remit en position. Accrochée à lui comme une moule à son rocher, elle tentait de faire fit de la masse de son bas ventre qui venait se frotter innocemment contre son bassin. À son signal, elle prit une profonde inspiration et ils plongèrent à nouveau.

Ils sillonnèrent rapidement une forêt d’algues pour arriver sur cette étendue de sable fin au sol parsemé de galets et de mollusques. La coque du navire, d’un rouge écaillé, se distinguait nettement dans cet espace foisonnant d’une flore et d’une faune marine prolifique. De teinte verdâtre, le bois noyé sous des amas de mousses et de crustacés, l’épave dormait depuis des siècles dans cette partie de l’océan, si seule et isolée.

Au vu de la taille du bâtiment, il s’agissait d’un navire de guerre dont la figure de proue, fissurée et cassée par endroit, illustrait un aigle aux ailes brisées et au bec limé : un ancien vaisseau providencien. Erevan s’attarda un instant sur cet emblème avant que Jörmungand la guide vers l’arrière éventré, où des trésors par centaines gisaient dans le sable, à moitié recouvert. Ils progressaient lentement, frôlant le sol pour y dénicher les pépites encore trouvables.

Soudain, elle pinça son bras et lui indiqua un objet dont l’éclat rouge vif venait d’attirer son œil. Quand il s’empara de la chose, elle en profita pour plonger sa main dans le sable où de vieilles pièces étaient éparpillées auprès de jarres percées. Puis, ne disposant plus assez d’oxygène, il la remonta.

De retour à l’air libre, Erevan toussa et essuya son visage gorgé d’eau, aux yeux agressés par le sel. Chose faite, elle regarda les trouvailles qu’elle venait de grappiller. Dans sa main, elle tenait des petits coquillages ainsi que deux sculptures  faites d’ivoire, pas plus grosses qu’une pièce d’échec, illustrant pour l’une ce qui s’apparentait à une fouine et pour l’autre un animal étrange qu’elle n’avait jamais vu. Malgré leur éclat terni et leurs bords émoussés, elles n’étaient pas abîmées.

— Oh ! C’est une hyène et une hermine ! s’exclama-t-il en admirant les pièces sous tous les angles.

— Une hyène ?

— Oui, un animal assez rare mais terriblement précieux.

— Comment le connais-tu ?

— Il m’est arrivé d’en voir de temps à autre sur les navires marchands.

À son tour, il déplia sa paume et lui montra le corail rouge monté en pendentif qu’elle avait aperçu. Ravie de ce magnifique bijou malgré sa surface grignotée par l’eau salée, elle le prit entre ses mains et le lui mit autour du cou.

— Voilà qu’il te va très bien ! le complimenta-t-elle. Il est bien mis en valeur sur ta peau.

— Tu ne veux pas le garder pour toi ?

Elle hocha négativement la tête.

— Non, il ne m’ira jamais aussi bien qu’à toi et je n’ai jamais eu l’occasion de te faire de cadeau. Ça me fait plaisir de pouvoir enfin t’offrir quelque chose.

Les yeux de Serpent s’humidifièrent et il resserra son étreinte autour de sa taille. Erevan gloussa en sentant son souffle arpenter sa nuque pour y déposer un baiser. Conquise par l’instant, elle tourna la tête et effleura sa joue du bout de son nez. Puis, les paupières closes, elle alla cueillir sa bouche de ses lèvres entrouvertes, échangeant avec lui un baiser langoureux au goût salin.

Soudain, le membre de l’homme se raidit, se plaquant contre le haut de ses fesses. Confus par cet élan d’ardeur qu’il n’avait jusque là jamais connu, il décrocha sa bouche de la sienne, défit son étreinte et se recula légèrement, la tête tournée sur le côté tant il n’osait affronter son regard.

— On ferait mieux de remonter, tu trembles ! finit-il par dire, son visage ayant pris une teinte rougie.

— Ça te gêne ? demanda-t-elle en se tournant vers lui, plaçant ses bras de chaque côté de son cou.

Alors qu’elle approchait son corps du sien pour revenir à son contact, Jörmungand se laissa faire. La sensation de cette peau chaleureuse, si douce, contre la sienne lui procurait une savoureuse plénitude. Sensation accentuée par les vibrations terriblement exquises qu’elle exhalait. Il déglutit et murmura :

— Non, c’est juste que… je… enfin, tu…

Elle roula des hanches, massant la zone de son bas ventre où sa proéminence s’en trouvait gonflée.

— Tu ne veux pas ?

— Si… enfin… c’est juste que… tu n’as pas peur de t’accoupler avec moi ?

Elle rit au terme employé et le regarda tendrement.

— Pourquoi aurais-je peur ? C’est un geste naturel non ?

— Mais, il ne faut pas que je chante, danse ou t’offre quelque chose avant de le faire ?

Elle pouffa et vint nicher sa tête contre sa nuque pour y déposer un baiser à son tour.

— Tu parles de parade nuptiale ? Ça ne marche pas vraiment comme ça pour les humains tu sais.

Elle approcha son visage du sien et l’embrassa à nouveau, ondulant ses hanches avec davantage d’ardeur.

— Tu m’as déjà conquise mon cher, dit-elle en caressant son corps en de lents va-et-vient.

L’homme tressaillait sous ces caresses. Le souffle saccadé et les yeux mi-clos, il laissait échapper de faibles soupirs de plaisir, grisé par les vibrations de sa divine protégée.

— Rentrons nous réchauffer, ajouta-t-elle, grivoise.

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