NORDEN – Chapitre 33

Chapitre 33 – Convalescence

Le cri des mouettes résonnait, accompagné de claquements de sabots et de hennissements. Ambre ouvrit les yeux et contempla avec lenteur l’espace dans lequel elle se trouvait. C’était une petite chambre au sol marqueté et dont les murs se tapissaient d’un papier peint blanc. Une grande fenêtre bordée de rideaux rose poudré s’ouvrait sur l’extérieur et dévoilait un magnifique panorama sur les jardins situés en contrebas ainsi que sur l’océan.

La jeune femme reconnut les lieux ; elle était au manoir, en la demeure du Baron von Tassle. Elle s’étira de tout son long et sentit que tous ses muscles étaient engourdis.

Une douleur lancinante la brûlait au visage. Inquiète, elle se leva puis alla s’observer devant le miroir. Une ample chemise de nuit en lin l’habillait, s’arrêtant à mi-cuisse. Ses cheveux emmêlés et ternes avaient bien triste mine, tout comme le reste de son corps. En effet, des ecchymoses maculaient sa peau et de fines coupures en cours de cicatrisation striaient son visage. Elle passa un doigt sur sa joue et suivit le sillon qui l’entaillait de l’arcade sourcilière jusqu’à la commissure de la lèvre.

T’as l’air bien pitoyable ma fille ! ironisa-t-elle.

Un bruit de pas résonna dans l’escalier et quelqu’un frappa à la porte. Après l’autorisation de son hôtesse, Émilie entra, un plateau en main sur lequel étaient disposées une tasse de café ainsi que deux tartines beurrées. Le visage de la domestique s’illumina en la voyant debout. Elle déposa le plateau sur la coiffeuse et s’enquit de son état :

— Oh, mademoiselle ! Si vous saviez comme nous avons eu si peur pour vous ! Nous ne savions pas si vous arriveriez à guérir. Je suis ravie de vous voir enfin réveillée et que vous parveniez à vous tenir debout !

Ambre l’écoutait d’une oreille, tentant de se remémorer les événements. Ceux-ci lui revinrent par flash et elle sentit son cœur se serrer au souvenir de son Anselme. Elle soupira et se laissa choir sur la chaise. Pendant que la jeune femme engloutissait le pain avec appétit tant elle était affamée, Émilie s’installa derrière elle pour la brosser.

Aucune des deux ne parla, trop concentrées sur leurs tâches respectives. Ambre mâchait les aliments de manière compulsive, avec une avidité presque bestiale ; déchiquetant avec plaisir et sans la moindre grâce les morceaux de pain qu’elle portait à sa bouche. Puis elle but d’une traite le breuvage qui lui lacéra l’intérieur de la gorge, provoquant une vive brûlure dont elle n’avait cure.

— Combien de temps suis-je restée inconsciente ?

— Pas loin de trois semaines, mademoiselle. Vous êtes arrivée ici en bien piteux état. Heureusement que monsieur le Baron avait donné l’alerte et était là pour vous ramener en hâte votre sœur et vous. Nous avons donc pu rapidement vous prendre en charge et vous soigner.

Soudain, l’image de sa cadette lui vint en mémoire.

— Où est Adèle ? s’enquit-elle, angoissée. Elle va bien ?

La domestique eut un petit rire.

— Oui, mademoiselle ! Elle est en bas et s’amuse dans la cour. Son état était bien moins préoccupant que le vôtre. Une fois sa fièvre atténuée, il ne lui a pas fallu longtemps pour que sa santé s’améliore. Elle tousse encore un peu, mais rien de bien méchant. En revanche, votre état à vous nous a grandement inquiétés. Nous ne savions pas si vous alliez réussir à surmonter cela et à vous rétablir. Même monsieur le Baron était anxieux. Il est resté longtemps à votre chevet et passait vous voir régulièrement.

Ambre rit nerveusement ; elle ne pouvait imaginer cet homme aussi impitoyable porter ne serait-ce qu’une once de bienveillance à son égard. La nouvelle avait de quoi surprendre et elle se demanda si Émilie ne lui racontait pas cela pour l’adoucir.

— Et le Baron, où est-il ?

— Monsieur est au tribunal. Tous les hauts magistrats de la cour sont convoqués. Ils se réunissent afin de destituer le Duc de son statut de maire. La nouvelle de ses actes a vite fait le tour de l’île. D’autant que celui-ci n’a nullement nié ses actions et les a même très clairement défendues. Pour appuyer cela, un des hommes qui vous avaient enlevées a lui aussi avoué. Il ne reste plus qu’à savoir ce qu’ils vont devenir et qui sera le maire d’Iriden en attendant de nouvelles élections.

Ambre l’écoutait avec attention pendant qu’elle s’habillait en hâte afin de rejoindre sa petite sœur. Parée, elle descendit les escaliers à la suite d’Émilie. Arrivée en bas, elle traversa le hall et prit une grande bouffée d’air frais. Puis, elle s’installa sur le rebord et regarda avec un large sourire sa Mouette jouer au loin. Adèle avait l’air heureuse. Elle courait en compagnie de la chienne Désirée, s’amusant à se poursuivre tour à tour.

Dans son action, la fillette détourna le regard et contempla l’entrée du manoir. Ses yeux brillèrent lorsqu’elle aperçut son aînée présente sur l’estrade. Elle quitta son jeu et courut dans sa direction. Ambre dévala les marches de l’escalier et l’enlaça ; elles étaient réunies et rien n’importait plus que cela.

Elles restèrent un long moment ainsi, lovées l’une contre l’autre, sous l’œil attendri des domestiques qui observaient la scène avec bienveillance. Puis Ambre colla son front contre celui de sa cadette et la regarda droit dans les yeux.

— Allez viens, rentrons chez nous ! dit-elle calmement.

Elles se relevèrent et, main dans la main, se dirigèrent vers l’arche afin de regagner leur cottage. Avant de partir, l’aînée adressa un signe amical à l’assemblée pour les remercier de leur traitement et de leur soin. Pieter vint à leur rencontre, accompagné d’Ernest. Les oreilles en avant, le poney trottinait et fouettait l’air de sa queue, ravi de revoir ses maîtresses. Les deux sœurs le gratifièrent de nombreuses caresses puis Adèle monta sur son dos.

Elles quittèrent Iriden pour se diriger vers Varden via la longue allée pavée. En passant devant la taverne de l’Ours, Ambre décida d’aller voir son patron. Elles laissèrent le Shetland dehors et entrèrent. Les clients se turent et observèrent les deux sœurs qui furent alors submergées de messages de soutien et de sympathie.

Attiré par le tumulte, Beyrus sortit des cuisines. Son visage s’illumina en les voyant. Il ébouriffa le crâne de la fillette et posa une tape amicale sur les épaules de l’aînée.

— Je suis heureux de te revoir ma grande ! Je me suis fait énormément de soucis pour toi, sache-le !

D’humeur mesquine, son employée lui répondit :

— Tu n’espérais quand même pas te débarrasser de moi aussi facilement, j’espère ! Je ne comptais pas quitter ce monde avant que tu n’aies payé mon salaire !

Le patron eut un rire franc et la plaqua contre lui.

— Il s’est dit tellement de choses à votre sujet, des choses horribles et effroyables ! J’ai malheureusement appris pour Anselme. La nouvelle de sa mort m’a attristé.

Ambre regarda timidement Adèle, Beyrus avait annoncé sa mort de manière implacable sans prendre de pincettes. Mais de toute évidence, la petite avait été mise au fait et couva sa grande sœur d’un air peiné.

Elles restèrent une bonne partie de l’après-midi à la taverne. Beyrus leur servit un plat chaud et conversa avec elles. Encore amnésique sur de nombreux points, l’aînée relatait les faits, sous l’œil attentif des clients. Néanmoins, elle gardait une certaine part de mystère, surtout concernant la dernière discussion qu’elle avait entretenue avec le Duc et le Baron, qu’elle jugeait beaucoup trop personnelle et dérangeante à son goût.

Les deux sœurs rejoignirent le cottage à la tombée du jour. Beyrus lui avait donné les journaux qu’il avait conservé ces dernières semaines, où son nom, celui d’Adèle et d’Anselme étaient mentionnés, dans l’espoir de lui raviver certains souvenirs. Car elle ne manquerait pas de se faire interroger sur l’affaire par les magistrats ou la presse.

Elles passèrent la soirée ensemble et rangèrent le désordre. Le cœur lourd, elles jetèrent les débris et nettoyèrent les multiples taches de sang et de boue. Elles avaient pris soin d’enterrer Pantoufle dans le jardin dont la dépouille était déjà rongée par les vers, il ne restait plus que les os et des lambeaux de peau. Elles lui avaient préparé une petite cérémonie en guise d’adieu qui se déroula sous le gazouillement mélancolique d’un rouge-gorge, perché sur la tête d’Ernest.

Avant de se coucher, Ambre lut calmement les gazettes, feuilletant les articles d’un œil morne. L’un d’eux attira son attention :

« Le Duc von Hauzen a reconnu avoir consommé de la drogue à haut potentiel agressif, connue autrement sous le nom de la D.H.P.A. ; pourtant interdite depuis de nombreuses années sur l’île () Ayant pour effets la dilatation extrême de l’œil, l’accès de rage et altération de la pensée : rendant la personne totalement incontrôlable et la faisant basculer dans un état de fureur animale () démantèlement d’un trafic possible ? () les deux voiliers et personnels mis en cause. Demande de perquisition et ouverture d’enquête sur Goélette et Alouette ainsi que sur les personnes des marquis de Malsherbes et Desrosiers, leurs propriétaires () le premier étant déjà soupçonné de complicité avec le Duc von Hauzen dans l’affaire nouvellement ouverte des enfants enlevés. »

Elle parcourut ensuite les nombreux articles relatant les événements et esquissant la première liste des enfants enlevés. Des témoignages de parents et de proches des victimes avaient été recueillis. L’identité d’Enguerrand de Villars et de Charles d’Antins, charitéins, fut dévoilée et provoqua un mouvement de protestations parmi les habitants, se demandant comment des étrangers avaient-ils pu parvenir sans encombre sur Norden et y enlever des enfants.

Après cela, la jeune femme en arriva aux récits mentionnant Anselme, dont le corps n’avait pas été retrouvé, et la louve Judith ; son histoire, ses conditions de transformation, sa prétendue innocence dans l’affaire des enfants enlevés mais également son inculpation pour la mort du jeune marquis Isaac de Malherbes. Ces éléments furent précisés par les études des scientifiques de l’observatoire ainsi que par le témoignage du Baron von Tassle.

Ambre tomba alors sur une lettre publique qu’il avait rédigée et fait publier dans le Pacifiste. À sa lecture, elle sentit son cœur se serrer et pleura à chaudes larmes.

« À ma chère femme Judith et à mon cher fils Anselme.

Je vous écris ces mots, pour vous dire adieu et vous rendre un dernier hommage après ces sept années passées à vos côtés. Je dois avouer que, malgré ces débuts forts tumultueux, jai été, malgré tout, heureux de partager une partie de ma vie à vos côtés. Vous, qui étiez des êtres simples, bienveillants, détachés de tout opportunisme, ne désirant rien d’autre que de vivre votre vie le plus dignement possible et de profiter de ce qu’elle pouvait vous offrir, en dehors des atrocités que vous aviez subies. Vous avez su éveiller en moi une étincelle de joie et la perspective d’une vie douce et paisible et je ne saurais jamais assez vous remercier pour cela.

Je vous adresse ce dernier hommage, en témoignage de ma profonde et sincère amitié pour vous.

M. le Baron A. von Tassle »

***

Meredith arriva au cottage un beau matin. La porte s’ouvrit à peine qu’elle se précipita dans les bras de son amie, l’enlaçant avec ardeur. Malgré tous les affreux événements qui s’abattaient sur sa famille en pleine disgrâce, la duchesse était heureuse de la revoir vivante et bien portante.

— Oh ! mon p’tit chat ! Si tu savais comme j’ai eu si peur ! Excuse-moi de ne pas être venue te rendre visite plus tôt. Mais je ne voulais pas faire irruption chez le Baron.

— Ne t’en fais pas pour ça ! J’ai conscience que ces dernières semaines ont dû être extrêmement difficiles pour toi.

Elles défirent leur étreinte. Ambre lui proposa de s’asseoir et leur servit un thé. Adèle, qui venait tout juste de se réveiller, regarda avec intérêt la belle femme à la peau caramel la gratifier d’un sourire rayonnant.

— Oh bonjour, toi ! fit la jeune duchesse d’une voix emplie de douceur. On ne s’est pas encore vues. Je m’appelle Meredith, je suis une amie de ta grande sœur.

Sachant parfaitement qui elle était, la fillette la contemplait sans mot dire et s’installa à table, la dévisageant avec étonnement. Ambre posa les trois tasses fumantes sur la table et en tendit une à chacune.

— Comment vas-tu ? demanda-t-elle. Je suppose que ce doit être particulièrement tendu de ton côté. J’ai appris que ton père avait été enfermé en attendant son procès.

— Hélas, oui ! Bien que mon père ne soit pas un homme de cœur, je ne m’attendais absolument pas à ce qu’il soit mêlé à cette affaire d’enlèvement, mais je savais qu’un jour ou l’autre il paierait pour ses exactions. C’est plus envers Charles que je suis en colère. J’ai été le voir dans sa cellule l’autre jour. J’ai appris que vous aviez discuté tous les deux et il a été honnête envers moi et des sentiments qu’il éprouvait à mon égard. J’ai été terriblement choquée de ces paroles. Je me suis sentie humiliée et souillée. Il m’a manipulée depuis le début en se servant de mes faiblesses et bien qu’il m’aime à présent je ne peux me résoudre à rester auprès de lui. Sans compter qu’au vu de l’atrocité de ses méfaits, jamais il ne sortira de prison.

— Que sont devenus les enfants ? Ont-ils été retrouvés ?

— Hélas, non ! les treize petits noréens sont partis au compte-goutte en direction de Pandreden, via l’Alouette. Le bateau est d’ailleurs parti le lendemain de votre enlèvement. Il avait à son bord trois des quatre militaires, dont un grièvement blessé à ce que je sais, ainsi qu’un enfant. Apparemment Charles avait ordonné au militaire qui l’accompagnait d’avertir ses complices et de mettre les voiles sans lui. Il a tenu à rester sur Norden et à assumer ses actes, de même qu’il a sciemment incendié sa maison ainsi que celle d’Enguerrand afin d’éviter que les autorités ne tombent sur des documents confidentiels.

— Quel salopard ! pesta Ambre.

— En effet, approuva Meredith, et je ne sais pas si tu sais, mais le marquis de Malherbes, le capitaine Orland ainsi que deux de ses hommes, sont également impliqués dans cette affaire. C’est grâce à leur discrétion qu’ils acheminaient les enfants. Et pire encore, le capitaine Orland ainsi que les deux hommes en question, monsieur Maspero-Gavard et monsieur de la Bruyère, avaient déjà été tous trois arrêtés il y a sept ans pour une affaire de meurtre commis à l’encontre de monsieur Ambroise Renard, le père d’Anselme. Pour l’instant, le navire n’est toujours pas revenu, mais ça ne m’étonnerait pas que le capitaine Orland abandonne les commandes une fois là-bas et demande un asile politique. De même que le marquis et les deux hommes qui ont probablement dû embarquer eux aussi, car ils restent introuvables sur l’île.

Ambre se mordit les lèvres et grogna.

Ainsi les trois assassins engagés par ma mère se sont enfuis ! Je connais enfin leur identité, même si je doute qu’ils ne reviennent sur Norden. Si jamais je les croise un jour, je les réduirai en charpie ! Je les ferai payer pour leurs actes ! Et ce putain de marquis de Malherbes… J’ai encore plus de plaisir à savoir son fils crevé.

— C’est à croire que le père est tout aussi malsain que ne l’était le fils. D’ailleurs, comment vont ta mère et ta sœur ? Je suppose qu’elles doivent être profondément abattues.

— Oh non ! Elles sont, au contraire, encore plus froides qu’avant. Elles font preuve d’une impressionnante dignité. Leur seule crainte est la perte financière et de leur privilège mais sinon, elles ne montrent pas le moindre signe d’émotion. Pas la moindre larme ou même un frémissement des lèvres, c’est inhumain ! À voir si les juges les laisseront tranquilles. Après tout, elles sont innocentes et je pense qu’elles paieront assez lourdement les conséquences des actes de mon père.

— Et toi ? Que vas-tu devenir ?

Meredith eut un rire nerveux.

— Tu veux vraiment le savoir ? Après avoir vu Charles, j’étais si profondément en colère que je suis allée me réfugier vers les remparts pour réfléchir à ce que j’allais pouvoir faire de ma vie. Je m’inquiétais également beaucoup pour toi et j’avais besoin d’être seule. Antonin m’a vue partir en courant et s’est empressé de me suivre. Nous avions bien sympathisé tous les deux ces dernières semaines. Par la suite, comme il venait souvent s’enquérir de mes nouvelles, je lui avais appris pour Charles et des soucis que notre couple traversait. Il m’avait toujours écouté, sans jugement. Je crois qu’il espérait tenter sa chance mais je n’étais pas encline à abandonner mon couple en renonçant aussi facilement. Quoi qu’il en soit, il est venu à ma rencontre et on a parlé tranquillement. Je n’avais jamais envisagé l’idée d’être avec lui. Son physique ingrat de boutonneux m’indisposait et je le trouvais tellement imbu de sa personne. Enfin bref, à ce moment-là, j’avais besoin de cracher tout ce que j’avais sur le cœur.

Meredith contempla son amie et un sourire béat se dessina sur son visage. Elle but une autre gorgée puis gloussa :

— Et Antonin m’a écoutée des heures durant…

Ambre sentit son échine se hérisser.

— Ne me dit pas que tu es avec lui ? la coupa-t-elle.

— Si mon petit chat ! avoua-t-elle en passant une main dans ses cheveux. Je sais qu’il est loin d’être parfait et j’avais en mémoire leur tentative de viol à ton égard et le lynchage qu’il avait infligé à Anselme.

Le souffle court et les yeux écarquillés, Ambre crispa ses doigts sur les parois de sa tasse, manquant de la fissurer.

— Je sais que ça ne te fait pas plaisir à entendre mais je n’y peux rien, j’ai vraiment besoin de lui. Que ce soit pour son soutien psychologique ou pour sa fortune.

Ambre se mordilla les lèvres. Elle fulminait.

— Si cela peut te rassurer, sache que cet événement semble l’avoir chamboulé et il avait la volonté de devenir quelqu’un de meilleur. Il m’a promis de prendre soin de moi et de veiller à ce que je ne manque de rien. Je ne sais pas si je me fais des illusions concernant mon avenir auprès de lui, mais j’ai bon espoir qu’il sera porteur de bonheur.

— Eh bien, soupira Ambre après un long moment de silence, je ne m’attendais pas du tout à ça…

— Moi non plus, si ça peut te rassurer. Pourtant j’ai envie de me laisser porter par cette aventure. J’espère sincèrement que tu parviendras à tourner la page, à me pardonner et accepter mon choix. Et j’espère que cette relation pourra m’aider à oublier la précédente et me permettre de regagner mon estime. Car, je l’avoue sans peine mais je ne pensais pas être aussi sotte et aveugle.

— Tu ne vas pas être la seule à devoir te reconstruire, murmura Ambre, gagnée par l’amertume.

La jeune femme songea à Anselme et sa disparition aussi soudaine que brutale lui fit l’effet d’un coup de poignard. Elle allait devoir faire son deuil, car son amant n’était plus.

— Je le sais, fit Meredith en posant délicatement sa main sur la sienne. J’appréciais ce garçon. Il était gentil et mesuré. Après, si ça peut te rassurer, sache que ni son corps ni celui du militaire n’ont été retrouvés. Peut-être existe-t-il un infime espoir qu’il se soit transformé ?

— Je le souhaiterais de tout mon être !

Les larmes lui vinrent aux yeux. Adèle qui jusque-là les observait sans réagir, alla se presser contre sa sœur. Ambre la prit alors sur ses genoux et l’enlaça ; elle était sa seule famille et désormais son unique raison de vivre. Les trois femmes restèrent silencieuses, envahies par la mélancolie. Elles allaient devoir reprendre le contrôle de leur vie. Tout serait différent à présent.

Chapitre Précédent |

Sommaire | Chapitre Suivant

Laisser un commentaire