Tate no Yuusha no Nariagari – Chapitre 47

Le volontaire
Traducteur : Team Yarashii

— Oui, cette armurerie est l’un de mes endroits favoris en ville, je lui refile le maximum de travail possible. Tu t’en souviens, pas vrai ?
— Oui.
— Hé, mon garçon, ça te dirait d’éclairer un peu ma lanterne ?
— Il s’est passé pas mal de choses, et je voudrais emprunter votre boutique pour une réunion.
— Je me fiche bien de ce qui est arrivé. Mais cette échoppe est à moi, pas à toi. Fais-moi plaisir et va trouver un autre lieu pour tes affaires.

L’armurerie était le seul endroit où je pensais ne pas être dérangé, alors, après l’esclandre en ville, j’étais venu directement ici.

— Je vois pas trop où aller. Il me reste quoi ? Le chapiteau de l’éleveur de monstres ?
— Allons, mon garçon. Ce type est vraiment…

Le vieil homme savait. Il était au courant de ce qui se tramait sous ce chapiteau.

— Si tu veux emmener une bande de gamins dans un endroit pareil, j’ai pas franchement d’autre choix que de te laisser causer chez moi.
— Alors, c’est réglé, j’ai la permission du proprio. Bon, maintenant, qui es-tu ? Tu t’appelles bien Melty, c’est ça ?
— Oui, je suis la première héritière du trône de Melromarc, la deuxième fille de la famille royale, Melty Melromarc.
— Hein ?

Donc, la Salope était la plus âgée ? Alors, pourquoi est-ce que la plus jeune des deux était première dans la succession ?

— Ma grande sœur a depuis plusieurs années des… troubles comportementaux. Après avoir causé tout un tas de problèmes, il a été décidé de faire de moi la première héritière.

En temps normal, cela paraîtrait fou, mais quand je pensais à l’affreux caractère de la Salope, cette décision commençait à prendre tout son sens. Tout de même, quelque chose clochait là-dedans.
Melty partageait-elle vraiment le même sang que l’autre dingue ? Comment est-ce que le Sac à merde avait pu engendrer une fille pareille ? C’était dur à avaler.

— Filo.
— Quoi ?
— Tu ne peux plus traîner avec cette fille, désormais.
— M. Naofumi. Pourquoi agissez-vous comme son père, tout en proférant des paroles aussi terribles ?

Voyons, c’était la sœur de la Salope ! Si elle était parvenue à devenir la première héritière, elle devait être douée pour manipuler les autres. À un si jeune âge, elle pouvait même s’avérer encore plus forte que sa sœur à ce jeu.
En avait-elle après Filo ? Ou, pire encore, était-elle de mèche avec Motoyasu ?
Avait-elle manigancé toute cette comédie pour faire mine de s’interposer et gagner ainsi ma confiance ?

Qu’elle essaie donc !
Elle nous observait peut-être même depuis notre arrivée dans ce village à l’est frappé par l’épidémie. Elle nous avait amadoués et s’était infiltrée dans notre groupe, tout en prévoyant de nous capturer au moment de la raccompagner au château. Si Raphtalia ne l’avait pas rattrapée, qui pouvait dire ce qu’il se serait produit ?

— Et…
— Désolé, mais je crois que ça suffit. Je ne peux pas te croire. Je devrais plutôt dire que je NE PEUX PLUS te croire, maintenant que je sais qui tu es vraiment.
— Veuillez écouter ce que j’ai à dire !
— Est-ce que tu es au courant des paroles prononcées par ta sœur et ton père ? Navré, mais on ne peut pas discuter, c’est impossible. Je n’ai pas confiance en toi.

Même si je lui disais la vérité, rien ne me garantissait qu’elle me croirait.
Elle était la propre fille de ce roi, de ce Sac à merde ! Je ne pouvais pas me contenter de lui demander d’avoir foi en moi.

— Je vais prendre ton aide de tout à l’heure comme paiement pour t’avoir ramenée en ville. Maintenant, dégage !
— Mais, vous…

Avant que la deuxième princesse ne s’énerve, un chevalier ouvrit la porte de la boutique et pencha la tête à l’intérieur.

— Dame Melty, le roi vous demande. Veuillez nous suivre.
— Très bien.

Je pensais qu’elle allait piquer une crise, comme le faisaient les enfants, mais la plus jeune des princesses agrippa plutôt les volants de sa robe, prit une profonde inspiration, adopta une expression calme et posée, et suivit le chevalier dehors.

— À plus tard, Filo.
— D’accord, à plus !

Mais il n’y aurait pas d’autre rencontre. Je n’allais pas céder Filo à une princesse quelconque, ou à Motoyasu.
Bon sang ! Tous les gens de ce foutu royaume me rendaient dingue.

— M. Naofumi, n’auriez-vous pas dû au moins écouter ce qu’elle avait à dire ?
— Ouais, mon garçon, elle a raison.
— Désolé, mais je peux pas faire confiance à la famille royale.
— Héros Porte-Bouclier…
— Quoi ? Oh, vous êtes encore là, vous ?

Je croyais qu’ils étaient partis en même temps que la princesse, mais, en me tournant, je vis que les soldats qui m’avaient pourchassé en ville étaient toujours présents.
Combien de ruses et de pièges j’allais encore devoir affronter ? Ces types-là étaient dans le coup, c’était évident !
Je leur fis signe de partir, mais ils ne bougèrent pas.

— Foutez-moi le camp ! On n’a rien d’autre à se dire !
— Je resterai là tant que vous ne nous aurez pas écoutés !

Eh oh, ça suffit les conneries…
De toute manière, ils n’étaient là que pour me dire de « livrer Filo à la princesse » ou un truc du genre.

— Bon, d’accord. Allez, causez, et vite.

Si je ne les laissais pas débiter leur petit discours, ils ne partiraient pas.

— Hmm… lors des vagues à venir… Quand la prochaine vague sera là, je souhaite combattre à vos côtés.
— Quoi ?

Qu’est-ce qu’il venait de dire ? Je me figeai d’un air incrédule et fixai le jeune soldat.

— Moi et bien d’autres hommes en bas de la hiérarchie militaire avons été impressionnés par votre attitude durant la dernière vague. De plus, je suis originaire de Riyute, et je ressens le besoin de m’acquitter d’une dette envers vous, pour avoir protégé ma famille et mes amis là-bas.
— Ah bon, vraiment ?
— Oui. Et, disons que… un certain nombre d’entre nous ont été favorablement marqués par vos actions, ce jour-là. Nous avons pris conscience que si quelqu’un se battait pour les autres, c’était bien vous, Héros Porte-Bouclier. Nous avons constitué un groupe, et nous voulons combattre avec vous.
— Avec moi ? Je pense pas que vos officiers respectifs soient très emballés par cette idée.

Les chevaliers et les dirigeants de ce royaume n’avaient jamais manifesté le moindre désir de coopérer avec moi. Lors de la dernière vague, alors que j’affrontais une horde de monstres, ils avaient décidé de faire pleuvoir des flèches sur moi depuis une position éloignée.

— Vous avez raison. Ils n’en seront guère satisfaits. Mais vous nous avez protégés lorsque nous en avons eu besoin. Nous désirons suivre votre exemple et aider les autres.
— Et vous avez donc cherché à me rencontrer ?
— Les gardes postés autour de la ville sont tous du même avis. Nous avons abordé le sujet, et nous sommes tombés d’accord que le premier vous apercevant devait vous arrêter et vous communiquer notre point de vue.
— Sans blague.
— Nous ne sommes pas supposés affronter directement les vagues. Ce n’est pas notre rôle dans la bataille. Quand bien même, nous sommes convaincus que notre priorité est de protéger les citoyens de ce royaume.

Quel bel état d’esprit. Si seulement les autres héros le partageaient…

— Alors, je vous en prie, Héros Porte-Bouclier. Lorsque viendra la prochaine vague, laissez-nous combattre à vos côtés.
— Si vous voulez juste affronter une vague, je vois pas trop pourquoi vous auriez besoin d’être avec moi.

Il devait y avoir une autre raison pour qu’ils m’offrent leur concours.
Il y avait probablement un système d’avancement au sein de l’armée qui récompensait les militaires se distinguant au combat. Dans ce cas, combattre aux côtés d’un héros contre une vague était un moyen redoutablement efficace d’améliorer leur prestige.
Et, même si nous étions des héros, nul ne pouvait décemment croire qu’il était capable de défier seul une vague. Ils savaient très bien que j’avais besoin de toute l’aide possible.
Dans la barre des magies de statut, il y avait une catégorie sous « membres d’équipe » appelée « Formations de combat ». Cela faisait sans doute référence à quelque chose que l’on pouvait utiliser durant la vague.

Il semblait logique de s’en servir à ce moment-là. Cela avait l’air d’être la bonne façon d’exploiter ce mécanisme. C’était probablement une fonction similaire à celle des MMORPG, où des guildes et des clans pouvaient s’affronter. Dans notre situation, l’ennemi n’était ni l’un ni l’autre, mais la logique derrière cette option semblait identique.
Dans le cas contraire, comment une seule personne et son groupe pouvaient espérer abattre toute une vague ? La témérité avait ses limites.
Certes, en arrivant au boss final d’une vague, les meilleurs joueurs, nous autres héros ici, devaient se dresser ensemble pour vaincre le monstre. Mais qu’en était-il du reste de la horde, de toutes ces créatures plus faibles ? On pourrait logiquement penser qu’une foule de gens ordinaires et de soldats s’occuperaient de les abattre.
Les récents événements avaient prouvé cette théorie.

La vague précédente était apparue près d’un village appelé Riyute, où les chevaliers et les soldats étaient parvenus à se rendre rapidement. Ils rétablirent la situation assez facilement.
Cependant, ce pays était vaste. Si la vague se produisait bien plus loin, les dégâts seraient incalculables.
Si cela arrivait, peu nombreux seraient ceux capables de protéger les gens.

Enfin bref. Si l’on mettait de côté les formations de combat et la stratégie, je voulais savoir pourquoi ces jeunes militaires désiraient combattre à MES côtés. Était-ce parce que j’étais le plus faible des héros ? Si la compétition faisait rage pour nous approcher, il paraissait cohérent de m’aborder en premier.
Ou alors, tout cela n’était qu’un mensonge. Peut-être aspiraient-ils simplement à m’arrêter quand la vague apparaîtrait, lorsque j’y serais transporté automatiquement.
À moins qu’ils n’essaient de faire en sorte que je compte sur eux, pour ensuite m’abandonner au moment critique, dans le seul but de me persécuter. C’était possible.

— Nous voulons juste nous battre à vos côtés pour protéger nos concitoyens.

Bien évidemment, il pouvait très bien raconter tout et n’importe quoi, cela n’était pas nécessairement véridique pour autant.

— Est-ce que vous essayez d’obtenir une promotion ou une récompense quelconque ?
— Pas du tout.

Il secoua la tête si rapidement qu’il était évident que ma question avait été anticipée. Ensuite, il pivota et fit signe à quelqu’un se tenant derrière lui. C’était un jeune garçon vêtu d’une robe de mage. Enfin, je disais cela, mais ce n’était rien de comparable aux robes violettes que j’avais aperçues dans la boutique de magie. Celle-ci paraissait moins chère et de qualité moindre. Elle était par ailleurs jaune. Les deux jeunes soldats s’alignèrent devant moi et s’inclinèrent profondément.

— Je… je viens de Riyute. Vous avez sauvé ma famille, alors je… je veux vous aider, si possible.
— Ah, je comprends, maintenant.

Il se sentait donc redevable envers moi pour cette raison. S’il provenait réellement de Riyute, je pouvais probablement lui faire confiance.

— Je suis certain que vous avez raison, un tas de gens seraient prêts à vous utiliser si cela leur garantissait une promotion. Mais je désire juste vous aider.
— Hmm, votre groupe contient quelques curieux spécimens, on dirait.
— Euh… Héros Porte-Bouclier ?

Le jeune garçon vêtu comme un sorcier leva son visage.
En le regardant de plus près, je vis que c’était un demi-humain.
Melromarc ne faisait rien pour cacher sa préférence entre humains et demi-humains, alors comment ce garçon avait-il fait pour survivre et, plus encore, pour devenir un soldat aux ordres de la Couronne ?
Ses habits étaient dans un état bien plus déplorable que ceux des mages que j’avais vus lors de la dernière vague. Cela pouvait-il s’expliquer autrement que par son âge et son rang ?

— Mon compagnon est un véritable adorateur du Héros Porte-Bouclier. Il y a longtemps, dans un autre pays, plusieurs légendes au sujet des autres Héros sont apparues. Lui a toujours cherché celles qui concernaient le Héros Porte-Bouclier.
— Hmm…

Il semblait donc vraiment y avoir un petit groupe de gens prêts à me croire et à vouloir m’aider. Ce gamin ne l’avait pas mentionné directement, mais, tandis que je battais le pavé comme marchand et sauveur à la fois, des gens paraissaient s’être rassemblés pour me soutenir.
Cela valait peut-être le coup.
À l’arrière de notre attelage, j’avais un sac rempli d’accessoires que je devais encore vendre. Je le pris.

—150 pièces d’argent. Si vous pouvez rassembler cette somme en échange de ça, j’examinerai votre proposition.
— Pardon ?
— Eh ben, quoi ? Si vous m’achetez ça, je vous croirai.
— M. Naofumi…

Raphtalia poussa un soupir et sembla épuisée. Il fallait croire que j’avais l’air de leur soutirer de l’argent alors qu’ils désiraient simplement m’aider. En théorie, cela devrait être le contraire. Mais c’était dans ma nature. S’ils en avaient après la gloire ou l’argent, c’était le meilleur moyen de révéler leur vrai visage.
Ma véritable inquiétude était qu’ils soient liés à la plus jeune des deux princesses, ce qui me forcerait à rejeter leur offre.

— Très bien. Nous allons passer voir tout le monde et collecter la somme requise. Veuillez nous attendre, je vous prie.

Le jeune soldat à qui j’avais parlé fit cette déclaration et se retira.

— Mon garçon, je vais être franc, c’est pas joli-joli ce que tu viens de faire.
— Si quelque chose a l’air trop beau pour être vrai, alors ça l’est vraiment. Je dois m’assurer qu’ils ne mentent pas.

Le jeune type qui avait l’allure d’un sorcier était toujours là, debout sans bouger.

— Je te déçois ?

Il secoua la tête.

— J’ai foi en vous.
— Hé.

Curieux, ce petit bonhomme. Je réfléchissais à tout cela quand l’autre soldat revint. Il était essoufflé.

— Pff… pff… tout le monde a contribué. Voici la somme.
— Ça n’a pas traîné.
— J’étais en route pour aller voir les chevaliers, mais je me suis arrêté aux dortoirs en chemin. Ils ont tous donné.

Hmm… il avait donc demandé à pas mal de gens.
J’avais volontairement fixé un montant élevé. Il me transmit une lourde bourse, et je regardai son contenu.

— Chacun a donné un petit peu, mais le compte devrait être bon. Veuillez me croire.
— Ouais, d’accord. Tu représentes combien de personnes ?
— Voyons voir. Avec moi… cinq.
— Hmm.

Je pris cinq objets dans le sac et les tendis au garçon, tout en y joignant l’argent réuni.
L’un d’eux était un collier absorbant une certaine quantité de dégâts. Il était imprégné d’un effet spécial, le rendant très utile à posséder.
Un jour, alors que je réfléchissais à sa fabrication, j’avais fini par en concevoir un par accident. Je pouvais donc me permettre de le lui céder.
Durant les combats contre les vagues, on ne savait jamais quand sonnait sa dernière heure. S’ils s’apprêtaient à lutter à mes côtés, il me paraissait cohérent de les laisser mettre la main dessus.

— Hmm, c’est…
— Je t’ai demandé de rassembler cette somme, mais je n’ai pas dit que je m’en emparerais. Je voulais juste mettre à l’épreuve votre sincérité. Grâce à ce petit test, il a dû être plus facile de voir qui, au sein de ton groupe, désirait vraiment s’investir dans cette opération et qui n’en avait qu’après son avancement.

Certes, l’argent était frappé par la Couronne, donc ma confiance avait ses limites. Cependant, ils s’étaient tous montrés bien assez polis. J’allais donc miser sur eux pour l’instant.
Depuis le menu des formations de combat, je choisis l’option de chef et l’assignai au jeune soldat en face de moi.
Le statut d’équipe était paramétré de sorte que je la dirige, puis venaient ensuite Raphtalia et Filo. À la suite de cette configuration, je fus capable de confier l’autorité de la formation à ce garçon.
Cela lui conférait la capacité de donner des ordres, mais toujours sous ma supervision. Cela impliquait que je pouvais décider s’il recevait ou non de l’expérience à la suite des combats.

— C’est…
— Tu as compris ?
— Absolument.
— Si ça te convient pas, alors transmets la responsabilité à l’autre gars qui t’accompagne, là. Il suffit de rassembler un groupe de gens qui souhaitent participer. Mais que ce soit clair. Si vous tentez de vous servir de moi, ou d’employer une ruse quelconque, votre autorité s’effondrera et la formation entière se brisera.
— Bien compris ! Merci !

De nouveau, les deux s’alignèrent et s’inclinèrent profondément, avant de quitter la pièce.
Cette tournure inattendue des événements n’était pas dénuée de failles, mais il semblait que, peut-être, des gens commençaient vraiment à me croire.
Et ils étaient prévenus, à la moindre entourloupe, je serais sans pitié.

— Bon, très bien, c’est l’heure d’aller faire cette cérémonie de promotion.
— Dis, mon garçon. C’est pas toujours très classieux, ce que tu fais, mais tu te mets à te conduire en vrai Héros.
— Alors, vous essayiez réellement de déterminer s’ils mentaient ou non ?
— Comme je l’ai dit, ils en avaient peut-être après la gloire ou l’argent. Je devais m’assurer qu’ils étaient prêts à se sacrifier.

Nous quittâmes ensuite l’armurerie.
Nous avions peut-être eu quelques problèmes en chemin, mais, à présent, je pouvais revenir à mon objectif immédiat : la promotion de classe.

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