Tour des Mondes – Chapitre 365

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Chapitre 365 : Un dernier souffle haineux

Il ne reste qu’un tas de cadavres derrière moi. Ils ne sont plus que trois sur les trente et je n’ai pas plus d’une égratignure. Décevant, mais pour des idiots fanatiques, cela n’a pas d’importance.
Il ne reste que Géralt et deux femmes. Elles étaient peu nombreuses dans le groupe, mais elles sont aussi détraquées que les autres en ce qui concerne leur comportement avec Emy.
Je dévisage rapidement avec un léger sourire celle armée d’un revolver qui ressemble à une Pirate. L’autre semble être une Voleuse, mais les deux poignards qu’elle tient en tremblant me donnent l’impression d’avoir une Assassine en face de moi. Dans le doute, je ne la tuerai pas immédiatement pour pouvoir vérifier avec le vermillon que je ne fais pas une erreur. Géralt semble ne pas savoir quoi faire de son côté, mais je ne peux pas lui en vouloir après m’avoir vu massacrer ses compagnons.

Les deux femmes ont peur après ce qu’elles viennent de voir. Leurs mains tremblent légèrement alors qu’elles se préparent à m’affronter.
L’Assassine fonce dans ma direction et, par curiosité, je ne l’attaque pas.

« Quelle est ta classe ? »

Elle ne répond pas à ma question en continuant à m’attaquer, mais je pourrais étouffer un bâillement tellement elle a peu de chance de m’atteindre. La Pirate tire sur moi avec son mousquet, mais j’esquive la trajectoire de la balle tout en lui cisaillant le poignet. Je tourne mon attention vers la grimpeuse Assassine qui semble utiliser un boost d’agilité pour essayer de m’atteindre. Pourtant… même sans le boost, je suis plus rapide. C’est ridicule de la voir faire. En soupirant, je désactive la fusion. La femme Assassine semble avoir suffisamment piqué la curiosité de Nomad pour étouffer sa colère.

Mon corps me fait souffrir, mais c’est supportable. La troupe n’était pas d’un niveau capable de pousser Sigu dans ses retranchements. Je me sens en tout cas très fatigué mentalement. Faire la fusion moi-même est plus éprouvant que je ne le pensais. Je regarde rapidement en direction de Géralt, mais le grand méchant semble perplexe et ne pas savoir quoi faire entre fuir et se battre. C’est un peu tard dans un cas comme dans l’autre.
Je soupire en activant le vermillon. La corruption est encore présente dans son corps, donc elle n’a pas rencontré Angela. Elle est probablement un des Assassins normaux de la classe dont j’ai entendu parler.

— Es-tu une Assassine ?
— Ferme là !

Au moins, elle parle. En rangeant les crocs de basilic, j’attrape un stylet que je plante dans le cœur de la Pirate qui s’effondre rapidement.

— Tu ferais mieux de me répondre si tu veux ma sympathie. Tu es la première personne que j’affronte qui partage une classe avec moi et cela me semble… idiot de te tuer.

La grimpeuse semble à présent choquée de voir la Pirate tomber au sol. J’ai l’impression qu’elles sont amies. Elle se reprend assez vite et me regarde.

— … Tu comptes m’épargner ?
— Si tu ranges tes armes maintenant, je peux faire une exception. Rends-toi. Même avec lui, tu n’as aucune chance de gagner.

La grimpeuse recule de quelques pas et range ses armes dans son inventaire en levant les mains en l’air. Elle se mord la lèvre inférieure et me fusille du regard, mais je m’en contenterai, même si elle pourrait y mettre plus de bonne volonté… surtout si elle fait partie de ce groupe de moins que rien.

— Hors de question que je meurs ici pour rien.
— Les autres pensaient sans doute la même chose. Prends ça avant que je change d’avis.

Je lui jette une fiole de somnifère puis une clé. Elle regarde les deux objets en comprenant ce que je lui demande. Elle hésite quelques instants, mais en regardant l’allée couverte de cadavres quelques instants, elle prend finalement sa décision et avale le liquide.

— Peut-être que nous nous reverrons dans de meilleures circonstances, mais évite de faire des bêtises ou la prochaine fois je te tuerai. N’oublie pas le nom de Nomad, l’Assassin qui t’aura épargné, et n’essaye plus jamais de t’approcher d’Emy.
— C’est… d’accord.

Alors qu’elle vacille à cause du somnifère, l’inconnue se jette sur le corps de la Pirate en attrapant sa main pour y poser une clé. Je la laisse faire en mettant de côté ma rancœur. Elle cherche simplement à sauver son amie et je ne compte pas lui en vouloir pour ça.

L’instant suivant, elle perd conscience et elles disparaissent toutes les deux. Pour ce qui est des autres, certains avaient des clés dans leurs mains et ils ont disparu malgré une blessure mortelle. Sigu doit suffisamment être impressionnante pour qu’ils ne retentent jamais de croiser ma route. Si cela arrive, ils le regretteront mille fois. Géralt semble vouloir dire quelque chose alors que je me tourne dans sa direction.

— Tu es… tu es… Nomad ? Le premier coéquipier d’Emy ? Alors pourquoi les as-tu tous tués ? Nous sommes ses serviteurs !
— Évite de me prendre pour un idiot. Cela fait longtemps que je vous observe rôder autour d’elle et que je sais tout. Malheureusement pour toi, j’ai appris à être plus radicale qu’Emy envers les parasites. Je fais juste le ménage pour qu’elle puisse enfin se reposer. C’est le travail d’un Assassin après tout.
— Alors toute cette attaque, c’est de ta faute ! Tu les as tués froidement pour des… farces ?
— J’ai tout entendu. L’esclavagisme ne fait rire que toi et les cadavres derrière moi.
— Dans ce cas, j’ai une autre idée qui devrait te plaire. Je vais la laisser s’occuper de toi. EMY ! IL EST LA !

Il se met à hurler alors que je plante rapidement mon stylet dans sa gorge pour le faire taire. La lame rebondit simplement sans le blesser et je me rends compte qu’il a probablement la classe de Chevalier. Le problème, c’est qu’il y a des similitudes entre son armure et celle que possédait Emy en tant que Paladin. Si je me rappelle bien le peu que j’ai lu sur la classe dans le panthéon des Archivistes, ce sont des Guerriers supérieurs. Les prouesses au combat sont ce qui définit l’accès à plusieurs classes dans cette hiérarchie. Guerrier puis Chevalier ou Berserker et ensuite Paladin. Dans son cas, il était Chevalier. Pour ce qui est de la classe des Paladins, elle offre une multitude de boosts et plusieurs compétences de combat assez dangereuses, si je me souviens bien.
Être Paladin revient à être l’un des meilleurs combattants de la tour. Dans son cas, je n’attends pas grand-chose d’un Paladin encore au premier monde qui ne se bat jamais seul et qui joue les gros bras.

Il continue de hurler en appelant Emy alors que j’esquive un coup d’épée pour lui planter mon stylet dans l’œil. Juliette en profite pour entrer dans son corps et le déséquilibrer de l’intérieur. Il n’a le temps de hurler que quelques secondes de plus avant de s’effondrer complètement. Je découpe ses mains en utilisant son épée pour retirer une clé cachée dans son gantelet. Il ne sera pas sauvé comme certains. Sa mort n’aura pas été aussi gratifiante que je l’aurais espéré, malheureusement.

Même s’il est mort rapidement, le mal est fait. Son hurlement a retenti avec assez de force pour qu’Emy décide de se diriger vers ce qu’elle pense être l’origine du cri. Du moins, c’est ce que je vois à travers les yeux des corbeaux. La brume et la fumée étouffent suffisamment les bruits pour qu’elle ne me trouve pas tout de suite, mais je n’ai pas plus d’une minute.
La question est de savoir si je la confronte maintenant ou non.
Comme pour me prouver que c’est un peu tard, plusieurs dizaines de grimpeurs approchent de l’allée à cause des cris de Géralt. Vu leurs propres hurlements, je risque d’avoir tout le camp sur le dos. Malgré la fumée, affronter une centaine d’entre eux en même temps risque d’être déplaisant.

En soupirant, je dis à Micha sur son corbeau de préparer la deuxième vague de pièges. Un rassemblement est une bonne chose. Pendant que les personnes capables de se battre se concentrent sur moi, beaucoup de coins du camp sont laissés à la merci des animaux qui ont le champ libre pour achever les blessés et répandre de nouveaux incendies.

Dans l’épaisse fumée mélangée à la brume, je peux sentir la terre vibrer alors qu’ils sont des centaines à approcher. Tout ça à cause d’un traître à son commandant. Amusant.
Je récupère ma cape sur la lance en approchant du corps de Géralt au sol. Juliette trouve amusant de me ralentir en prenant son temps pour revenir dans mon corps, mais à travers le lien, j’ai l’impression qu’elle me dit qu’elle sait bien que j’ai envie d’en finir avec ce combat.

Bien sûr, elle a raison, mais j’ai quand même des doutes sur mes capacités à me battre contre autant de grimpeurs. Je souris quelques instants en me disant que c’est déjà trop tard. Tant pis. Ils sont déjà là et je peux déjà voir les silhouettes sombres se dessiner dans la brume.

En sortant mes stylets, je me jette en avant en profitant de la confusion pour briser la cage thoracique d’un grimpeur avec un coup de pied et il s’effondre aussitôt. Plusieurs grimpeurs cherchent à m’empaler alors que je saute dans les airs en activant le vermillon. Presque aussitôt, je peux voir les proies les plus intéressantes. Une flèche rebondit sur mon armure alors que je retombe violemment sur le crâne d’un grimpeur. Ce n’est qu’une question de secondes avant qu’Emy ne me tombe dessus alors qu’elle approche en volant. Autant diminuer encore un peu les menaces.

*

Loin dans un tunnel sous les combattants, Romaro l’architecte ouvre la voie en manipulant des tonnes de terre et de pierre à la force de sa volonté. Des blocs passent derrière lui et rejoignent toute une chaîne de soldats et de grimpeurs qui évacuent la terre pour lui et rendent légèrement plus supportable le travail de titan qu’il réalise depuis des jours.

« Alors ?! Combien de temps ?! »

Romaro se retourne en entendant le vieil homme derrière lui. Un homme à la barbe et aux cheveux aussi gris que la cendre le regarde avec mécontentement. Toutes les cinq minutes depuis qu’ils sont bloqués sous terre, Thiffein n’arrête pas de l’embêter pour que le chantier continue d’avancer. Le mage à côté de Romaro, qui est concentré à chercher des pièges magiques, commence lui aussi à perdre patience et ne cache même pas son soupir en l’entendant.

— Arf. Vous les grimpeurs avez du mal avec la discipline. Quand je te pose une question, j’attends mieux que « bientôt » ou « il faut attendre ». Si tu ne fais pas mieux que ça, autant creuser un trou vers la surface pour se jeter dans la bataille.
— Écoute le vieux. Tu as beau être le donneur de quête, je n’obéis qu’à Emy.
— Et elle m’obéit. Cela fait de toi mon serviteur. Plutôt que de m’obliger à te rappeler ta position hiérarchique, tu ferais mieux de me répondre. Sans Djupa, cette guerre ne finira jamais.
— Les galeries ne devraient plus être très loin si tu as donné les bonnes distances. Sans doute une trentaine de mètres maintenant. Deux heures s’il n’y a pas plus de pièges.
— Tu n’as qu’à penser à l’or que nous trouverons là-bas pour te motiver. Je te donne vingt minutes.
— Tu penses que les menaces vont me faire aller plus vite ?
— Te plaindre est inutile, je vais préparer les hommes pour le combat. La prochaine fois que je viens, tu as intérêt à avoir débouché ce tunnel quelque part, grimpeur.

Thif s’éloigne alors en laissant Romaro s’énerver. Il parcourt une trentaine de mètres en arrière dans les galeries pour déboucher sur une grande salle où cinq cents grimpeurs se préparent à faire la guerre. Ce sont 500 des grimpeurs qui sont là depuis le premier débarquement et que la guerre a transformés en vétérans capables d’affronter n’importe quel obstacle.
Depuis l’apparition de la bulle, ils sont tous bloqués sous terre à entendre les combats au-dessus de leurs têtes. Beaucoup regardent Thif en repensant à sa stratégie de capturer le château pour couper toute retraite aux autres. C’est la seule raison pour laquelle ils n’ont pas forcé Romaro à creuser un tunnel vers la surface.

Thif regarde son armée en souriant.

« Préparez-vous. Dans quelques minutes, nous prendrons Djupa. »

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Correction : Hastin



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