NORDEN – Chapitre 112

Chapitre 112 – Désespoir

Quand elle entendit la porte d’entrée claquer et les bruits de pas s’éloigner, Blanche s’effondra. Ses jambes ne parvenaient plus à la soulever tant elles tremblaient à se briser. Une fois au sol, le corps traversé par des spasmes successifs d’une douleur aiguë, elle plaqua ses mains sur son visage qu’elle dissimula intégralement. Puis, n’y tenant plus, elle fondit en larmes. Elle n’avait pas compris réellement ce qui venait de se dérouler. Tout était allé trop vite. Elle n’arrivait pas à analyser comment, alors qu’elle accueillait chaleureusement ce baiser langoureux qu’elle attendait de sa part sans oser lui avouer, son propre comportement avait changé en une fraction de seconde. Tout ce bonheur qu’elle avait ressenti pendant ce bref échange s’était évanoui aussitôt qu’il avait posé sa main, pourtant si tendrement, sur son bassin.

Cette caresse lui raviva le cauchemar de son agression et le feu de la passion qu’elle éprouvait se mua en un brasier dévorant qui consumait ses entrailles afin de l’anéantir. La souffrance engendrée par ce toucher la transporta dans un état de panique, effrayée d’essuyer à nouveau pareil déchirement interne. Ce baiser engageait à plus, elle le savait. Et la pensée de se savoir pénétrée, soumise aux désirs bestiaux d’un homme, la terrifiait. Elle ne voulait revivre pareille blessure, sentir sa chair se consumer à chaque assaut acharné pour s’engouffrer toujours plus loin ; jusqu’à ce que la délivrance lui soit accordée après que le mâle, dans un râle animal, libère sa semence et se retire, son sabre luisant couvert de sang.

Le repousser avait été la meilleure chose à faire pour éviter d’engager un tel acte. Elle n’était finalement pas prête pour la chose, quand bien même ce serait avec ce garçon qu’elle jugeait à présent digne de confiance. Depuis un certain temps, il occupait son esprit et l’apaisait à chaque visite au point que les mardis ainsi que les jeudis devenaient les jours les plus attendus de sa semaine. Pourquoi avait-il fallu qu’il s’entête et s’emporte ? Comment avait-elle pu le craindre lorsque, se penchant au-dessus d’elle, exigeant seulement une réponse à sa question, ce fut le visage de son bourreau qui était apparu à la place du sien, la laissant totalement désemparée. Et ce cri du cœur témoignait de toute la panique qu’elle contenait en cet instant face à ce monstre qui l’avait tant brisée.

Ce geste de soumission, si spontané, elle ne s’y était guère attendue. Elle s’était trahie d’elle-même, honteuse et impuissante face à ce coup du destin. Et lui qui, dans un souci d’en savoir davantage, l’avait harcelée de cette éternelle question dont elle ne souhaitait nullement y répondre. Formuler une réponse claire, la prononcer à voix haute et distincte, scander le nom de ce bourreau, le révéler aux yeux de tous… Elle n’y était absolument pas prête. Il fallait encore qu’elle garde « ce petit secret », « cette intime confidence pour ce joli moment d’une douce complicité », dût-elle mourir avec cette implacable vérité.

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