Isaac – Chapitre 13
« Ils se transforment littéralement en ours quand quelqu’un les énerve. »
« Maintenant que tu en parles, je n’ai jamais vu de non-humain… Pas même au campus qui prône pourtant la diversité de milieu d’origine de ses étudiants. »
« Les non-humains ne se séparent de leur tribu qu’a de très rares occasions ; ils sont extrêmement réservés et isolés. Leur inscription au campus dépend entièrement de l’approbation de leur tribu elle-même. Apparemment, ce sont nos invitées elles-mêmes qui ont supplié leur clan de les laisser venir au campus. Cependant, sache qu’il y a tout de même quelques non-humains au campus, mais ils forment rarement des relations avec des humains et sont assez discrets sur leur signe distinctif, ce qui les fait passer quelque peu inaperçus. »
« Alors pourquoi ces gens extraordinaires viennent-ils pendant les Fêtes, au lieu de venir le jour de l’inscription comme n’importe qui d’autre ? »
« C’est sûrement à cause du temps de trajet ? »
« Comment ça ? »
« Comme la plupart des tribus sont relativement recluses et éparpillées sur tout le continent, il leur faut énormément de temps pour se rendre à Gabelin. »
« Même pourquoi ne pas utiliser les tramways ? »
« Eh bien, les tramways sont utilisés depuis une dizaine d’années, mais les non-humains sont si isolés qu’ils n’étaient même pas au courant de cette avancée technologique. Elles ont donc quitté leur tribu assez tôt en pensant arriver le jour de la rentré, mais à cause des tramways, leur temps de déplacement a été réduit considérablement. »
« Tu es en train de me dire qu’elles sont parties trop tôt en pensant que leur voyage serait beaucoup plus long ? »
« Oui. Et comme nous ne pouvons pas laisser les étudiants de l’université sans surveillance à Gabelin, le Campus a décidé de les accueillir comme invités jusqu’à la saison d’inscription. »
« Ha… compris. Je n’ai donc qu’à vider deux pièces, pas vrai ? »
Cela signifiait aussi qu’il devait vivre avec elles jusqu’à ce que le campus rouvre. Cela le dérangeait un peu de devoir sacrifier son confort et sa vie paisible en partageant sa « résidence ».
Une fois qu’Isaac eut accepté sa demande, Mazelan lui serra vigoureusement la main avec un sourire éclatant. Il regarda alors autour pour vérifier que personne ne les observe et chuchota dans les oreilles d’Isaac.
« Ce n’est qu’une rumeur, mais apparemment nos invités sont quelque peu « particuliers ». Sur ce, bon courage. »
« …»
Isaac était sûr que Mazelan lui confiait ce travail parce qu’il semblait gênant et que sa thèse n’était qu’une excuse. Les non-humains étaient déjà assez difficiles à gérer, mais s’ils étaient considérés particuliers même pour des non-humains, qui sait ce qui attendait Isaac.
Pendant les vacances, les étudiants du campus étaient pratiquement expulsés de force, car certains insistaient pour rester et étudier. L’université, au contraire, invitait les étudiants à rester. Ce qui était inattendu, c’est que le campus allait jusqu’à offrir un soutien financier au nom d’une « indemnité de déplacement ».
Le seul bémol, c’est que s’ils refusaient ce soutien, on leur accordait la priorité pour le premier navire quittant le campus. Les étudiants de familles riches refusèrent l’aide sans hésiter une seconde dans l’espoir de profiter de leur liberté un peu plus vite. L’aide était alors proposée aux étudiants plus pauvres. C’était un excellent exemple du fonctionnement du campus en tant qu’organisation tenant à sa renommée.
Les étudiants étant absents du campus, il n’y avait pas besoin de conférenciers ou de professeurs non plus. Le campus devenait alors une sorte de ville fantôme pendant les vacances. Une flotte entière fut constituée pour transporter tous les étudiants hors du campus. Isaac observa l’efficacité de l’administration de ce monde quand il vit cela pour la première fois.
Les vacances au Campus sont semblables à un jour férié sur le continent. La capitale, Gabelin, accueille une vague de visiteurs. Pas seulement les étudiants, mais toutes leur famille se rassemblent pour les saluer au port. L’Empire utilise cet événement pour entraîner sa Marine, effectuant un exercice militaire de grande envergure. Ils participent à des exercices de manœuvre, de transport et d’atterrissage. Et le montant d’argent recueilli auprès des étudiants et des familles est astronomique.
Isaac était curieux de savoir comment la capitale pouvait gérer un si grand afflux de personnes en si peu de temps, mais cela faisait aussi partie de la formation des militaires. Il s’agissait d’une formation en préparation à un afflux important de réfugiés entrant dans la ville pendant une crise mondiale, ce qui ajouterait aux tâches de la force de défense de la capitale le contrôle du trafic de masse pour maintenir l’ordre public. Isaac fut stupéfait quant à l’efficacité avec laquelle l’Empire utilisa cet événement.
Alors que le continent entier était excité pour les vacances, Isaac fut laissé de nouveau sur le campus seul. Ça lui allait parfaitement. Il n’était plus nécessaire pour lui de quitter le port pour traiter avec les filles avec un sourire forcé.
La seule chose dont Isaac n’était pas content était que même la cafétéria étudiante fermait pendant ce temps, le forçant à acheter de la nourriture en masse pour durer les vacances. Il n’avait aucun problème à bien se nourrir, mais cuisiner et faire la vaisselle était une corvée.
« -Bâillement- Je me demande combien j’en attraperai aujourd’hui. »
Dernièrement, il avait passé la plupart de son temps à pêcher. Il n’aimait pas particulièrement cette activité, mais c’était à peu près le seul passe-temps qu’une personne seule et dans un port pouvait pratiquer.
Regarder la mer lui permettait de se vider l’esprit. Quand il pêchait, ses souvenirs le laissaient tranquilles. Les souvenirs, le passé… en être libéré un moment le faisait aimer la pêche.
« Hm ? »
Un petit point apparut à l’horizon, et comme le « point » se rapprochait de plus en plus, Isaac commença s’interroger. Il n’y avait aucun intérêt à faire venir le navire de ravitaillement alors que le campus était vide. Pourtant, ce qui se rapprochait était bien le bateau de ravitaillement avec lequel il était familier.
« Ah ! elle arrive déjà ? »
Se rendant compte qu’il avait un invité à recevoir, Isaac commença à nettoyer ses outils de pêche. Le navire accosta pile quand il eut fini de ranger ses outils.
« Hey ! Alors Isaac, toujours vivant à ce que je vois ! »
Dès que le navire eut terminé d’accoster, Gonzales sortit du navire pour faire un gros câlin à Isaac.
« Ça fait mal ! »
Etant marin depuis son plus jeune âge et son corps ayant été endurci par tant d’année dans des mers agitées, peu oseraient faire une compétition de force avec Gonzales. Et actuellement, Isaac voyait sa mort approcher alors que Gonzales le serrait sans faire attention aux gémissements d’Isaac.
« Hahaha, je suppose que j’étais trop excité. »
« Comment vont les affaires avec ton auberge ? »
« Bonnes ! Grâce à toi, la salle à manger est plus remplies qu’elle ne l’a jamais été ! »
Gonzales était sincèrement reconnaissant envers Isaac, ce qui fit sourire ce dernier.
Isaac était la poule aux œufs d’or de Gonzales. Grâce à lui, Gonzales avait réussi à sauver sa famille de la pauvreté, ce qui lui avait permis de gagner le respect de ses enfants. Isaac lui rappelait constamment que cette affaire ne durerait que 5 ans et qu’il ne devait donc pas gaspiller son argent inutilement malgré la tentation que la soudaine et importante rentrée d’argent pouvait lui provoquer. Dans le même temps, Isaac recommandait l’auberge de Gonzales aux élèves roturiers, leur assurant un accueil chaleureux à la mention de son nom.
« Quoi qu’il en soit, je doute tu sois venu pour me passer le bonjour, pas vrai ? Alors, où est-elle ? »
Le visage de Gonzales se tourna étrangement à la mention de l’invité et prit rapidement une position plus formelle.
« Ahem. Je dois rentrer immédiatement après avoir déposé cette invitée. Alors, prends soin de toi d’accord ? Je te souhaite bon courage pour la suite des évènements, tu en auras besoin. »
« J’ai un mauvais pressentiment… »
Alors que Gonzales courait rapidement vers le navire, quelque chose de surprenant débarqua du navire.
« … un ours ? »
C’était un petit ours. À part le fait qu’elle portait des vêtements et qu’elle marchait sur deux pieds, c’était indiscutablement un ours. Comme si cela n’était pas assez déstabilisant, elle ressemblait à un mignon ours en peluche. Sa fourrure blanche et duvette dépassait des bords de ses vêtements, et ses petites mains et ses petits pieds appelaient à être caressés.
« La tentation est incroyablement forte, même pour moi, c’est dire le niveau… Je sens que ma tâche devient plus difficile à chaque minute qui passe. »
Si des filles l’avaient aperçue, sa mignonnerie aurait été suffisante pour les faire s’évanouir.
« Bonjour, chère junior. Je m’appelle Isaac et on m’a demandé de vous faire visiter les lieux pour vous aider à vous familiariser avant votre entrée à l’université. »
« …»
Tandis qu’elle regardait Isaac avec ses grands yeux étincelants sans dire un mot, Isaac retint son envie de caresser sa tête et continua de parler.
« Vous ne voulez pas me donner votre nom ? Alors, par commodité, je vous appellerai Nounours. »
« … Kunette. »
« Kunette ? C’est un joli nom. »
L’ours hocha la tête sans dire un mot. Isaac commençait à se demander si tous les ours du Nord étaient comme ça, jusqu’à ce qu’il se souvienne Mazelan mentionnant le fait que la personnalité de leurs invitées était particulière, même selon les standards de leur peuple.
« Cela ne durera pas, mais essayons de nous entendre pendant votre séjour. »
Merci pour ce chapitre